Dépendante à 98% de la Chine, l’Europe espère produire enfin ses propres terres rares indispensables aux technologies de demain.
C’est une véritable mine d’or. Ou plutôt de minerais. Le 12 janvier 2023, la société minière suédoise LKAB a annoncé avoir découvert le plus grand gisement de terres rares d’Europe, dans le nord du pays scandinave. Près d’un million de tonnes d’oxydes de terres rares ont été repérées dans le sol, de quoi alimenter toute l’industrie européenne.
Mais c’est quoi des terres rares au juste ? Il s’agit d’une série de minéraux divisée en une vingtaine d’éléments aux noms peu familiers comme le scandium, l’yttrium, l’europium ou encore le thylium. Leur découverte remonte au 18ème siècle mais leur exploitation industrielle a réellement démarré dans les années 70 pour la fabrication des tubes cathodiques des téléviseurs. Aujourd’hui, ils sont devenus indispensables dans la fabrication de smartphones, d’appareils médicaux, de technologies laser ou encore dans l’éolien ou l’automobile pour la création de batteries.
Un marché stratégique
À l’heure où toute l’Europe opère l’électrification de son parc automobile, cette découverte tombe à point nommé. Aujourd’hui, la Chine est le premier producteur mondial de terres rares avec des réserves estimées à 40 millions de tonnes soit 60% du marché international. Les États-Unis alimentent quant à eux 15% de la production sans oublier la Russie qui repose sur un gisement de 30 millions de tonnes. Le continent européen ne possédait jusque-là aucune exploitation et dépendait totalement de ces mastodontes. «L’électrification, l’autosuffisance de l’UE et son indépendance vis-à-vis de la Russie et de la Chine commenceront par la mine. Nous devons renforcer les chaînes de valeur industrielles en Europe et créer de réelles opportunités pour l’électrification de nos sociétés », s’est réjouie la ministre suédoise de l’énergie, du commerce et de l’industrie, Ebba Busch.
Le gouvernement suédois qui contrôle à 100% la société LKAB espère débuter l’extraction de ses terres rares d’ici 10 à 15 ans. D’ici là, il va falloir valider les permis de concession, poursuivre les recherches sur la structure du gisement, bâtir des usines dédiées au traitement des minéraux et mettre au point des techniques chimiques de séparation des terres rares pour obtenir les produits désirés : les oxydes de terre rare.
Une menace écologique
Autre point qu’il va falloir régler, le plus épineux : l’étude sur l’impact environnemental et humain du projet. Paradoxalement, si les terres rares servent à l’industrie des énergies propres, leur exploitation est extrêmement polluante. En Chine, plusieurs cas de contamination des nappes phréatiques ont été observés ainsi qu’une une pollution des sols et des cultures aux métaux et au dioxyde de soufre.
Sur place, en Suède, se trouvent également des peuples autochtones, les Samis, qui ont déjà dû être déplacés pour permettre l’exploitation d’une vaste mine de fer. En 2007, le centre-ville de Kiruna, la capitale de la région, a même été déménagé à plusieurs kilomètres pour laisser le champ libre aux mineurs.
Autant dire que les négociations vont être délicates, d’autant plus que le gouvernement suédois est entré dans un processus de réconciliation avec les populations locales l’Arctique après plus d’un siècle d’expropriations et de mépris culturel. Au pays de Greta Thunberg, il va falloir jongler entre écologie et économie. Une équation qui n’a toujours pas sa solution.
Avec caminteresse.fr