L’économie de la RDC devrait connaître une croissance de 6,1% en 2022. La hausse des prix des métaux devrait compenser la hausse des prix des denrées alimentaires et du pétrole, et conduire à une amélioration des termes de l’échange et à un compte courant équilibré.
Toutefois, le déficit budgétaire devrait se creuser en raison de l’augmentation des dépenses sociales et d’infrastructure. Les perspectives de croissance, bien que favorables, restent vulnérables aux chocs des prix des produits de base et aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement, ce qui pourrait entraver la réduction de la pauvreté.
Conditions et défis clés
La République démocratique du Congo (RDC), qui abrite la deuxième plus grande forêt tropicale du monde et de vastes gisements de métaux, n’a pas encore réussi à transformer ses richesses naturelles en développement économique. L’économie est fortement concentrée sur l’extraction du cuivre et du cobalt, qui constituent plus de 80% des exportations (en grande partie à destination de la Chine). Son énorme potentiel agricole n’étant pas exploité, la RDC est un importateur net de denrées alimentaires, ce qui accroît sa vulnérabilité aux chocs externes et climatiques. L’instabilité politique, la faible capacité institutionnelle, la mauvaise gouvernance et les épisodes récurrents de violence ont empêché la RDC de jeter les bases d’une économie diversifiée et résiliente, capable de générer des opportunités économiques pour une population en croissance rapide, ce qui a conduit à la persistance de niveaux élevés de pauvreté. Les contraintes structurelles persistantes se traduisent par un secteur privé sous-développé et une économie informelle importante.
Le contexte politique fragile est alimenté par la dynamique complexe des coalitions politiques. Parvenir à un consensus politique – principalement en vue des élections présidentielles de 2023 – et accroître la présence et la crédibilité de l’État, notamment par une meilleure gouvernance, sont essentiels pour maintenir la stabilité et faire avancer les réformes structurelles qui attireront les investissements et créeront des emplois. La nécessité pour l’Etat de fournir, en quantité et en qualité, des services aux citoyens implique que les ajustements, induits par les dépenses en cas de manque de recettes ou de chocs extérieurs, pourraient compromettre les perspectives de croissance à long terme ainsi que la stabilité politique. Il est donc crucial d’améliorer la mobilisation des recettes intérieures pour élargir la marge de manœuvre budgétaire.
La pauvreté reste très répandue dans le pays, la majorité des pauvres vivent dans l’extrême pauvreté. Bien qu’il existe d’importantes disparités géographiques entre les provinces, la plupart des pauvres vivant le long de deux corridors densément peuplés allant de l’ouest (Kongo Central) à l’est (Haut Katanga), et du nord (Ituri) au sud (Tanganyika), le taux de pauvreté excède 50%, même dans les provinces les plus riches. La RDC reste le deuxième pays d’Afrique subsaharienne après le Nigeria en termes de nombre de personnes extrêmement pauvres, malgré quelques améliorations au cours des dernières décennies.
Développements récents
La RDC a maintenu une forte dynamique de croissance et devrait connaître une croissance de 6,1% en 2022 (contre 6,2% en 2021). Les investissements et les exportations du secteur minier restent les principaux moteurs de la croissance, soutenus par l’amélioration des prix des minéraux et l’augmentation des investissements publics. Au cours du premier semestre 2022, le volume de la production de cuivre et de cobalt a augmenté respectivement de 34,2% et 38,3% en glissement annuel, grâce à la mine de cuivre de Kamoa-Kakula. La croissance des secteurs non miniers (notamment les services) devrait légèrement ralentir pour atteindre 4,1% en 2022 (contre 4,5% en 2021).
Le solde courant devrait être équilibrée en 2022 (2021 : -1,0%), la hausse des factures d’importation de denrées alimentaires et de carburant étant compensée par de solides recettes d‘exportation soutenues par la hausse des prix et des volumes des produits de base. Les réserves de change devraient atteindre 8,3 semaines d’importations en 2022, contre 6,3 semaines un an plus tôt. L’inflation devrait augmenter à 9,5% en 2022, exacerbée par la hausse des prix mondiaux de l’énergie et des denrées alimentaires.
Le déficit budgétaire devrait se détériorer pour atteindre 3% en 2022 (contre 1% en 2021), l’amélioration de la mobilisation des recettes ne pouvant compenser entièrement l’augmentation des dépenses d’investissement et’ des transferts courants. Les recettes sont estimées à 14,4% du PIB en 2022, en raison des prix favorables des produits de base et de la numérisation du processus de collecte des recettes, tandis que les dépenses (18,7% du PIB) devraient augmenter en raison des ajustements salariaux et des subventions aux carburants. Le déficit sera financé par des émissions sur le marché intérieur, des emprunts concessionnels extérieurs et des décaissements du FMI dans le cadre de la PEC, ce qui portera la dette publique estimée à 24,7% du PIB à la fin de 2022 (2021 : 23,7%).
Les dernières projections de la Banque mondiale situent l’extrême pauvreté à 62,3% en 2022, soit une baisse de 1,3 point de pourcentage par rapport à 2021. Cette diminution est due à des performances économiques favorables, malgré les effets négatifs de la pandémie de COVID-19 et de la guerre en Ukraine.
Perspectives
La croissance du PIB devrait passer à 6,6% en 2024. Le secteur minier devrait ralentir à 9% en 2024, contre 10,1% en 2023, avec la fin de l’expansion de Kamoa Kakula, tandis que la croissance des secteurs non miniers reprendra progressivement pour atteindre 5,4% en 2024.
Le déficit budgétaire pourrait se réduire à un niveau estimé à 1,7% du PIB en 2024, après avoir atteint 3,1% en 2023 en raison de l’élection présidentielle. Le secteur extérieur devrait se détériorer légèrement, en raison de la hausse des importations de biens d’équipement (compte tenu des projets d’expansion des mines) et de la détérioration des termes de l’échange malgré la baisse des prix mondiaux du pétrole et la croissance des exportations de minéraux.
L’extrême pauvreté devrait diminuer de 2,2 points de pourcentage d’ici 2024, compte tenu des perspectives économiques favorables, malgré les effets négatifs durables de la pandémie, de la forte croissance démographique et de la guerre en Ukraine.
L’économie de la RDC reste vulnérable aux fluctuations des prix des produits de base et aux performances de croissance des principaux partenaires commerciaux, qui pourraient être perturbées par des conflits géopolitiques et une résurgence de la pandémie. Les conséquences économiques de la guerre en Ukraine, par le biais de la hausse des coûts alimentaires mondiaux et des prix du pétrole, pourraient exercer une pression plus forte sur le déficit budgétaire, sur l’inflation et sur la consommation des ménages, exacerbant ainsi la pauvreté et les inégalités.
Avec le secteur agricole employant plus de 60% de la population en âge de travailler, la vulnérabilité aux risques liés au changement climatique (inondations, sécheresses) est importante. Enfin, l’incertitude politique persistante à l’approche des élections présidentielles prévues en 2023 pourrait retarder les efforts de réforme, aggraver les déséquilibres budgétaires et générer des arriérés. Compte tenu de la persistance des conflits dans l’Est, le défi immédiat de la RDC est de renforcer la sécurité et de maintenir la stabilité politique et macroéconomique, tout en accélérant les réformes en cours pour assurer une croissance durable.