Souveraineté, consolidation de la résilience, nouveau modèle de développement,… Le discours du roi Mohammed VI annoncé vendredi à l’occasion de l’ouverture de la nouvelle législature est une véritable feuille de route qui trace les grandes priorités auxquelles le nouveau gouvernement devra s’atteler sur les cinq prochaines années.
A nouvelle étape, nouvelle stratégie. Le discours du roi Mohammed VI, prononcé vendredi dernier à l’ouverture de la première session de la première année législative de la 11e législature, est une véritable feuille de route qui fixe les orientations auxquelles l’exécutif devra s’atteler au cours de son mandat de cinq ans. En effet, le discours royal intervient cette année après la séquence de désignation du nouveau gouvernement conduit par Aziz Akhannouch et le parachèvement de la constitution des exécutifs des régions, des villes et des différents conseils communaux et provinciaux, suite aux élections législatives, régionales et communales du 8 septembre dernier. Organisés le même jour, ces scrutins ont enregistré un taux de participation important et permis un large renouvellement au sein des instances représentatives aussi bien à l’échelle du parlement qu’au niveau des conseils des collectivités territoriales.
«Ce scrutin consacre la victoire du choix démocratique fait par le Maroc, ainsi que la normalité des alternances dans la gestion des affaires publiques», a déclaré le souverain marocain, commentant les élections du 8 septembre.
Consolider la souveraineté
«Cette législature s’amorce à un moment où le Maroc entre dans une phase nouvelle qui requiert la mutualisation des efforts autour des priorités stratégiques. Ainsi, notre pays sera plus apte encore à poursuivre son processus de développement et à relever les défis extérieurs». C’est ainsi que le souverain annonce trois grandes priorités stratégiques qui cadreront le travail de l’équipe gouvernementale.
Premier pôle, la souveraineté, lorsque le chef de l’Etat marocain rappelle que la crise pandémique a révélé le retour en force du thème de la souveraineté, avec des enjeux de compétition internationale : « Nous soulignerons d’abord la nécessaire consolidation de la place occupée par le Maroc et la défense impérieuse de ses intérêts supérieurs, particulièrement dans la conjoncture présente qui charrie dans son sillage défis, risques et menaces. De fait, la crise pandémique a révélé le retour en force du thème de la souveraineté. Qu’elle soit sanitaire, énergétique, industrielle, alimentaire ou autre, sa préservation est devenue l’enjeu d’une véritable compétition qui suscite des réactions fébriles chez certains. Si de nombreux pays ont connu d’importants dysfonctionnements dans la fourniture et la distribution des produits de première nécessité, le Maroc a réussi, lui, à gérer ses besoins en la matière et à assurer un approvisionnement normal et suffisant de ses marchés ».
Pour consolider les efforts de résilience entamés notamment depuis le début de la pandémie, ainsi que l’autonomie et la sécurité stratégiques du pays, le roi Mohammed VI ordonne la mise en place d’un dispositif national intégré portant sur la réserve stratégique de produits de première nécessité, notamment alimentaires, sanitaires et énergétiques, avec une mise à jour continue des besoins nationaux.
L’injonction royale sur ce sujet hautement stratégique procède d’une lecture géopolitique et géoéconomique, tirant les leçons de la crise de Covid-19 et prenant en considération les risques et les incertitudes d’un environnement international en perpétuelles turbulences. Ce devrait donc constituer un axe important du nouveau programme gouvernemental, lequel aura notamment à prévoir la réforme du cadre juridique organisant les stocks de sécurité, l’engagement d’investissements conséquents dans les capacités nationales de stockage et de réserves stratégiques, ainsi que le développement de la production nationale de certains produits importés.
Consolider la résilience
Le second volet de la stratégie royale porte sur la relance économique, notamment pour surmonter les difficultés créées par la crise pandémique. Le souverain livre dans ce sens une vision optimiste et rassurante, et affirme que le Maroc va poursuivre sereinement son projet de développement, tout en en accélérant le rythme des réformes. «En termes de protection de la santé des citoyens et de soutien aux secteurs et aux catégories touchés, nous disposons d’acquis solidement engrangés. De fait, en assurant la gratuité du vaccin, en dépit du coût qui se chiffre en milliards, l’Etat s’est acquitté de son devoir, veillant à ce que les besoins fondamentaux des citoyens soient satisfaits et que la période de crise soit la moins pénible possible pour eux», rassure le roi du Maroc.
Un nouveau modèle de développement
La troisième priorité de la feuille de route royale porte sur le déploiement du nouveau modèle de développement (NMD) : «Quant au troisième volet, il a trait à l’opérationnalisation du modèle de développement et au lancement d’une nouvelle génération de projets et de réformes intégrés. C’est pourquoi Nous aspirons à ce que cette législature soit le point de départ de cette dynamique volontariste ambitieuse incarnant l’intelligence collective des Marocains.
A cet égard, il convient de rappeler que le modèle de développement n’est pas un plan de mesures figé au sens conventionnel du terme. Il constitue plutôt un cadre général propice à l’action et apte à instaurer de nouvelles règles, à ouvrir de larges perspectives devant chacun et tous. En outre, «le Pacte national pour le Développement’ représente un levier essentiel pour la mise en œuvre de ce modèle, en ce qu’il symbolise un engagement national souscrit envers Notre Majesté et à l’égard des Marocains », explique le souverain marocain.
La Législature va ainsi s’atteler à la mise en œuvre du nouveau modèle de développement (NMD), un chantier stratégique annoncé par le roi Mohammed VI en août 2019. Le gouvernement et le parlement inscriront leur action dans le cadre du référentiel que constitue le «Pacte national pour le développement». Le souverain tiendra à rappeler que le NMD n’est pas un «plan de développement» au sens conventionnel, comme le Maroc en a connu dans les années 1970 et 80), mais «constitue plutôt un cadre général propice à l’action et apte à instaurer de nouvelles règles, à ouvrir de larges perspectives devant chacun et tous». «Le Pacte national pour le Développement» représente, comme le souligne le roi Mohammed VI, «un levier essentiel pour la mise en œuvre de ce modèle, en ce qu’il symbolise un engagement national souscrit envers Notre Majesté et à l’égard des Marocains».
Dans la phase de mise en œuvre du modèle de développement, le gouvernement s’est vu chargé par le chef de l’Etat de «définir les priorités et les projets à mettre en chantier au cours de son mandat et mobiliser les ressources nécessaires pour assurer leur financement». L’Exécutif mené par Akhannouch devra également parachever les grands projets déjà lancés, au premier rang desquels le chantier royal de généralisation de la protection sociale, et celui de la refonte et la mise à niveau du système de santé. Il en est également de la réforme des entreprises et établissements publics, ainsi que la réforme fiscale que le souverain a demandé de compléter et de conforter, avec la plus grande célérité, par l’adoption une nouvelle charte de l’investissement.
Une conjoncture nationale favorable
«En dépit des effets inédits générés par la crise et le repli de l’économie mondiale, l’économie nationale connaît une embellie significative». C’est par ces termes que le souverain a tenu les efforts de résilience consentis depuis le début de la pandémie et rassurer sur la situation économique du pays. Cet optimisme annoncé s’explique par les indicateurs au vert de la conjoncture au titre de 2021, comparés à ceux de certains pays voisins, qui enregistrent notamment des niveaux supérieurs d’inflation et de pression sur les réserves en devise.
En effet, la croissance économique devrait dépasser les 5,5%, un taux jamais réalisé depuis des années, mais également un des plus élevés de la région MENA et en Afrique. Ce taux de croissance permet à la richesse nationale de revenir pratiquement à son niveau d’avant la crise épidémique du Covid-19.
Aujourd’hui et grâce à une gestion réussie de la crise sanitaire, particulièrement le bon déroulement de la campagne vaccinale, aux mesures de soutien aux entreprises et aux catégories affectées, ainsi qu’au plan de relance lancé sur instructions du roi Mohammed VI, les moteurs de l’économie marocaine sont en reprise, à l’exception -conjoncture internationale oblige – du secteur du tourisme et des secteurs connexes.
Indicateur important de confiance dans l’économie marocaine, le flux des IDE a connu une croissance importante à fin août 2021 (de 16%, selon l’Office de change). Il en est de même des transferts des MRE qui ont connu un niveau record de 46%. Les réserves en devise, elles, se situent ainsi à un niveau confortable, équivalent à sept mois d’importations.
Les chiffres cités vendredi dernier dans le discours du souverain marocain, et bien d’autres, sont autant d’indicateurs qui doivent inciter à l’optimisme et à la confiance, doublés de davantage de volontarisme et de prise d’initiative de la part des acteurs économiques.
Le moment n’est donc pas à l’attentisme et aux analyses pessimistes qui laminent la confiance. Il est plus que jamais, celui de prendre l’initiative, d’investir et de saisir les nouvelles dynamiques et opportunités du monde post-Covid. Comme le soulignera le souverain marocain, « dans ce contexte positif, nous devons demeurer réalistes et poursuivre notre action avec responsabilité et patriotisme, loin de tout pessimisme et à l’écart d’une certaine rhétorique négativiste».
Mounir El Figuigui (La Tribune/France)