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Médiation de l’UA à la crise dans l’Est : Lourenço part, Faure Gnassingbé prend le relai

L’Union africaine (UA) a officialisé samedi la passation de médiation dans la crise de l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) au président togolais Faure Gnassingbé, succédant ainsi à l’Angolais João Lourenço. Ce dernier a jeté l’éponge le mois dernier face à l’enlisement persistant des hostilités, malgré des années de pourparlers infructueux.

La désignation de M. Gnassingbé, confirmée dimanche par le gouvernement togolais, relance un processus de paix en quête de crédibilité, dans une région minée par les conflits et les rivalités géopolitiques.

João Lourenço quitte son rôle de médiateur sur une note amère. Depuis

sa nomination dans le cadre du «processus fusionné » de Luanda et Nairobi, aucune avancée tangible n’a été enregistrée. Pire : la coalition rebelle AFC/M23, soutenue, selon Kinshasa et plusieurs rapports internationaux, par le Rwanda, a renforcé son emprise territoriale.

Ces derniers mois, ses combattants se sont installés à Goma et Bukavu, deux villes clés du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.

La région, théâtre d’un conflit larvé depuis des décennies, reste une poudrière où s’entremêlent enjeux sécuritaires, économiques et diplomatiques.

Malgré une demi-douzaine de trêves décrétées depuis fin 2021 – toutes violées en quelques semaines –, les civils subissent exactions, déplacements forcés et crise humanitaire.

GNASSINGBE, UN MEDIATEUR EN TERRAIN MINE

Le président togolais, connu pour son pragmatisme et son rôle discret dans plusieurs médiations ouest-africaines, hérite d’un dossier explosif.

Dans un communiqué partagé dimanche par son ministre des Affaires étrangères, Robert Dussey, l’UA a confirmé sa nomination comme «médiateur entre la RDC et le Rwanda», chargé de « contribuer activement à une paix durable dans les Grands Lacs ». M. Dussey a salué la «confiance» de l’UA, tandis qu’un porte-parole del’organisation a authentifié le document auprès de l’AFP.

La mission de Faure Gnassingbé s’annonce titanesque. Il devra non seulement ramener à la table des négociations le Président Félix Tshisekedi et son homologue rwandais Paul Kagame – dont les relations sont exécrables –, mais aussi convaincre l’AFC/M23, acteur clé mais non-étatique, de jouer le jeu du dialogue. Un défi d’autant plus complexe que Kigali nie toute implication dans le conflit, tandis que Kinshasa exige un retrait inconditionnel des rebelles et la fin du « soutien rwandais ».

Malgré l’échec des initiatives passées, un fragile espoir renaît depuis les pourparlers de fin mars à Doha, organisés sous médiation qatarie. Pour la première fois, des représentants de l’AFC/M23 et de la RDC ont discuté directement, suivis d’une rencontre – aussi symbolique que tendue – entre Tshisekedi et Kagame. Si ces échanges n’ont pas encore produit d’accord concret, ils illustrent une volonté, ne serait-ce que tactique, de maintenir ouvertes les voies diplomatiques.

Reste à savoir si Faure Gnassingbé saura capitaliser sur cette dynamique. Contrairement à João Lourenço, dont l’Angola partage unelongue frontière avec la RDC, le Togo, pays d’Afrique de l’Ouest, pourrait incarner une neutralité perçue comme un atout. « Son absence de liens historiques avec la région des Grands Lacs pourrait le rendre plus crédible», estime un diplomate africain.

LES DEFIS INVISIBLES

Au-delà des déclarations d’intention, le nouveau médiateur devra affronter des réalités peu reluisantes. La région est un nœud d’intérêts conomiques liés à l’exploitation de l’or, du coltan et du cobalt, ressources convoitées par des acteurs locaux et internationaux.

Par ailleurs, la méfiance entre Kigali et Kinshasa est telle que chaque concession est perçue comme une capitulation.

Enfin, l’implication de puissances extérieures – certains évoquent des rivalités entre la France, la Belgique et les États-Unis – complique encore le paysage. Dans ce contexte, la tâche de Faure Gnassingbé ne se limitera pas à la diplomatie : il lui faudra déminer un champ de tensions où chaque mot, chaque geste, est scruté à la loupe.

La médiation togolaise intervient à un moment critique pour l’UA, souvent critiquée pour son inefficacité dans la résolution des crises. Si Faure Gnassingbé échoue, ce sera un nouveau camouflet pour l’organisation panafricaine.

S’il réussit, il redonnera espoir en une solution africaine aux conflits dans le continent.

Econews

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