Le Congolais appartient depuis toujours à cette race qui ne s’embarrasse pas de paradoxes. Il aime tellement son pays au point que son vœu le plus cher est de le quitter. De partir sous d’autres cieux et autant que faire se peut, pour toujours. Il n’en oublie pas pour autant ses racines, gardant le lien avec sa famille (nombreuse) et n’hésitant pas à envoyer son écot à chaque décès, à chaque naissance, chaque fête à l’occasion de la réception de l’un ou l’autre neveu à l’examen d’Etat. Le tout, en se gardant bien de révéler sa véritable activité professionnelle.
Il peut être vigile dans une grande surface, faire la plonge à longueur de nuits, dealer de la drogue dans les quartiers mal famés ou faire le ménage dans les homes de vieillards… Peu importe. L’essentiel est de renvoyer au pays l’image d’une «réussite» dont s’enorgueillissent parents, amis et connaissances. Le summum, c’est quand certains parmi eux se font bâtir des maisons au pays. Entretenant dans le cœur des filles à marier les rêves les plus fous…
C’est dans cet ordre des choses qu’il faut placer l’incroyable engouement autour de la DV Lottery organisée chaque année par le Département d’Etat des Etats-Unis. 20.000 candidats sont tirés au sort dans des pays ayant affiché un faible taux d’immigration aux Etats-Unis au cours des cinq ans précédents Autant dire que les chances de gagner sont minces.
Le phénomène a favorisé la floraison d’une multitude d’intermédiaires offrant leur assistance aux candidats à l’émigration, grugés à l’envi. En dépit des rappels de l’ambassade américaine qui s’égosille à proclamer la gratuité de la formulation des candidatures, rien n’y fait. Des promesses mirifiques d’une vie meilleure au pays de l’Oncle Sam l’emportent sur les règles élémentaires de prudence.
Il faut partir à tout prix ! Et la myriade des églises et sectes, toutes loges confondues, rentrent dans la danse avec force prières et séances de délivrance du démon de l’échec. Les familles elles-mêmes n’hésitant pas à hypothéquer des propriétés pour investir dans le voyage éventuel de «l’espoir» du clan.
Quant aux autorités, elles ne disent mot. Comme si le gonflement de leur diaspora outre-Atlantique reviendrait à leur enlever une épine du pied. Au lieu de s’interroger sur la perception populaire de leur gouvernance. Parce que soit dit en passant, un peuple rassasié n’éprouve pas l’envie de quitter la terre de ses ancêtres.
Econews