Patrick Muyaya : «Le Gouvernement ne peut accorder des subventions aux médias qu’il ne connaît pas»

Au rendez-vous hebdomadaire avec les médias, le lundi 17 octobre 2022, consacré aux grandes articulations du compte-rendu de la 73ème réunion du Conseil du gouvernement, le ministre de la Communication et Médias, Patrick Muyaya Katembwe, a explicité les préalables à remplir par les organes de presse pour espérer bénéficier de la subvention de la part du gouvernement, aux termes de la nouvelle loi en gestation sur l’exercice de la liberté de presse en République Démocratique du Congo. Patrick Muyaya, tout en se félicitant du travail d’assainissement du secteur dans la suite des états généraux de la communication, a par ailleurs annoncé la fermeture prochaine des médias non en règle.

Après la loi de 1996 qui régit l’exercice de la presse en République Démocratique du Congo, Patrick Muyaya Katembwe, porte-parole du Gouvernement, aura le mérite d’avoir comblé un vide qui dure depuis 26 ans. Vendredi en Conseil des ministres, le Gouvernement a présenté et fait adopter « l’avant-projet de loi modifiant et complétant la loi n°96-002 du 22 juin 1996 fixant les modalités de l’exercice de la liberté de la presse ».

Selon Patrick Muyaya, l’élaboration de cet avant-projet de loi « vient marquer le premier pas de la marche vers la salubrité médiatique recommandée par le Président de la République au cours des états généraux de la communication et médias ». Il vise également à «conformer le secteur des médias à l’évolution des nouvelles technologies de l’information et de la communication et à encadrer, entre autres, l’exercice de la presse en ligne ».

Lundi devant la presse, réunie lundi dans le cadre du briefing hebdomadaire, le ministre de la Communication a fait le point de grandes décisions issues du dernier Conseil des ministres. En ce qui concerne la presse, il note que «c’est un vide qui est comblé en donnant plus de pouvoir à l’organe de régulation, le CSAC ».

Se conformer à la loi pour des subventions de l’Etat

Le ministre de la Communication et Médias a d’emblée rappelé que la subvention des médias est bel et bien inscrite dans la loi. Mais l’Exécutif ne peut accorder des subventions aux médias qu’il ne connaît pas. « Lorsque je parle de la connaissance des médias ici, c’est au sens administratif du terme. Les médias doivent être connus du ministère; ils doivent bénéficier des avis favorables des récépissés et toutes les conditions qui sont remplies pour qu’on arrive à cette fin. Aujourd’hui, nous avons bouclé le processus d’assainissement du secteur des médias, il est juste question que nous décidions de la fermeture de certains », a déclaré Patrick Muyaya. Ajoutant que des dispositions sont en voie d’être prises à cette fin puisque, malheureusement, l’Etat y serait bien obligé.

Les médias plombés par un environnement de pauvreté

Prenant à témoin l’assistance, le ministre Muyaya a insisté sur le fait qu’il y a des médias qui existent mais sans aucune preuve légale. L’une des raisons, selon lui, est la pauvreté ambiante. «Les médias congolais souffrent du contexte général de pauvreté dans lequel se trouve le pays. Vous ne pouvez pas avoir de médias riches dans un contexte de pauvreté. Si vous allez maintenant creuser sur ce qui sont des véritables promoteurs de différents médias, vous verrez qu’il y a beaucoup de chaînes liées soit aux pasteurs ou soit aux politiciens et qui évoluent  suivant les fluctuations des carrières de l’homme politique ou du pasteur», a-t-il souligné.

L’heure est donc venue «de nous regarder dans les yeux et de nous dire est-ce que cet environnement de foisonnement de médias nous permet d’évoluer de manière viable pour ne pas dire économiquement ? De quoi vivent les médias ?  Quelle est la marge publicitaire ? Quel est le marché publicitaire dont les médias disposent ici ? Il est étroit».

Le porte-parole du Gouvernement a par ailleurs salué l’adoption du texte du projet de loi sur l’exercice de la liberté de presse qui sera, une fois promulgué, le point de départ du changement voulu par tous les acteurs du secteur des médias : «Il faudrait qu’on voit avec vous justement les praticiens du métier, dans quelle mesure on peut nous assurer que nos médias soient bien réorganisés et comme ça on peut bien discuter avec la FEC (Fédération des Entreprises du Congo) ou tous  ceux qui ont besoin de nos services pour la publicité et fixer un standard minimum parce que vous allez dans votre média vous dites 100 USD mais on va dans un autre média qui dit, donnez-moi 20 USD, comment on va faire ? C’était un long sujet lors des états généraux et je crois que le débat va continuer ».

Nécessité d’un encadrement fiable

En ce qui concerne particulièrement l’audiovisuel, les conditions du contrôle technique, seront renforcées. Les médias devront justifier des  capacités techniques incluant au moins un studio avoir un responsable formé pour s’assurer de la qualité du travail. «Lorsque nous allons sévir, il ne faut pas que les gens considèrent que nous sommes en train de brimer l’exercice de la liberté de la presse; au contraire, nous sommes en train de l’encadrer pour être sûr que lorsque nous déciderons de donner des subventions aux médias qu’on soit en mesure de les lister, on sait qu’il y a 100, on va donner à 100 mais lorsqu’il y a 260, le partage dévient compliqué», a-t-il expliqué.

On rappelle que lors des états généraux de la communication organisés en janvier dernier, il a été question de dégager des propositions des réformes pertinentes touchant au régime juridique des médias en général et de la presse en ligne en particulier, au statut du journaliste, à la dépénalisation des délits de presse qui pourra être précédée d’un moratoire dont les modalités d’encadrement feront l’objet d’une concertation entre le gouvernement et les organisations professionnelles, à la modernisation des médias publics, et aux défis de la presse congolaise en général. 80 résolutions et recommandations avaient été adoptées à l’unanimité lors de ces assises.

Econews