Plombé par une crise économique aigue, le Ghana se tourne vers le FMI

Le Ghana, qui a longtemps été le pays africain subsaharien le plus endetté, fait face à une inflation très accrue. Le président ghanéen Nana Akufo-Addo a voulu rassurer la population sur la crise économique dans un discours, dimanche 30 octobre.
Face à l’inflation record et à l’effondrement de la monnaie nationale, il a promis de «rétablir l’ordre» sur les marchés pour contrer la dépréciation du cedi. Il a affiché sa volonté de soutenir la production locale pour réduire la dépendance aux produits importés. Enfin, le président ghanéen a exhorté la population à soutenir sa décision de solliciter un prêt du FMI, le Fonds monétaire international. Un discours qui n’a pas vraiment convaincu.
Ils étaient nombreux à exprimer leur déception lundi 31 octobre sur les réseaux sociaux. Les Ghanéens, frappés par la crise économique, n’ont pas trouvé de signaux encourageants dans le discours de Nana Akufo-Addo. Loin de là.
Il a exhorté les Ghanéens à soutenir le gouvernement pour faire face à l’inflation record et à l’effondrement de la monnaie nationale, notamment en soutenant sa décision controversée de faire appel au Fonds monétaire international (FMI). Mais ces discussions inquiètent. Philip Abayori, président de la Chambre d’agriculture, garde un mauvais souvenir de la dernière intervention de l’institution :
Avant le programme d’ajustement structurel du FMI en 1983, le Ghana était capable de produire suffisamment sa propre nourriture et se nourrir. Nous avions une industrie avicole et une industrie de la pêche très dynamique. Mais le FMI a voulu que le gouvernement n’intervienne pas dans les affaires et qu’il laisse le secteur privé agir. Le jour où le gouvernement s’est retiré de l’économie, l’industrie agricole ghanéenne s’est effondrée.
Si Nana Akufo-Addo a toutefois tenté de rassurer ses concitoyens en affichant sa volonté de soutenir la production locale, ses annonces ont laissé les agriculteurs sur leur faim, explique Philip Abayori : « Nous voulons que l’agriculture profite d’un traitement de faveur, à l’instar de ce qui se fait en Europe et dans d’autres pays. Par exemple, nous devrions pouvoir bénéficier d’une remise sur le carburant. Les agriculteurs ici utilisent du gazole, et si le prix du carburant continue d’augmenter, cela va nous coûter très cher de produire, car les taux de change sont déjà très élevés, et en plus, il y a l’inflation. Nous devrions également pouvoir bénéficier d’un crédit, mais à des taux préférentiels pour ne pas emprunter au taux très élevé actuel. Autre problème: nous importons tellement de riz de Thaïlande et d’autres pays, alors que nous avons les mêmes terres qu’eux, en plus des ressources en eau. Nous devrions être capables de produire localement. C’est ce que nous faisions avant le programme d’ajustement structurel de 1983. La terre est là. La seule chose qui nous faut, c’est du capital et de la technologie. Après, nous pourrons redresser l’économie en soutenant l’agriculture. Le président a beau voulu rassurer, nous voulons des mesures concrètes».
Après le discours du président ghanéen, les agriculteurs restent sur leur faim, selon Philip Abayori, président de la chambre d’agriculture

Des mi-mesures irréalisables ?
Quelques jours après l’appel au limogeage du ministre des Finances, par des membres de son propre parti, Nana Akufo-Addo était attendu au tournant. Selon l’analyste Kobi Annan, il a toutefois raté le coche.
Il a été un peu forcé de s’exprimer devant la population et ça s’est vu parce qu’il a fait beaucoup de promesses creuses et irréalisables. Il a répété plusieurs fois: « Nous espérons », mais sans donner de détails. L’une des mesures qu’il a mentionnées sera mise en place au cours des cinq prochaines années, et j’ai vu sur Twitter quelqu’un réagir pour dire : «super, nous avons maintenant un président qui remet tout à 2028, que faisons-nous d’ici là ? » Cela dit, il ne pouvait pas annoncer grande chose. Tout dépend de la conclusion des négociations avec le FMI.
Initialement prévu d’ici à trois semaines, un accord avec le FMI est désormais attendu pour la fin de l’année.
Avec RFI