Il faut sans délai renforcer le dispositif sanitaire et sécuritaire à l’aéroport International de N’Djili. Kinshasa, notre capitale, est vraiment exposé à la contamination importée de la COVID-19, mais aussi à l’insécurité des personnes et de leurs biens, car les mailles du filet sécuritaire sont à la fois fragile et trop grande pour permettre à un terroriste d’opérer sans beaucoup de difficultés.
Pendant que sous d’autres cieux et dans toutes les capitales du monde, les instructions strictes font régner l’ordre et la discipline en ce qui concerne le contrôle sanitaire et la lutte contre le terrorisme, à l’aéroport international de N’Djili, c’est la légèreté totale. Tout le monde est chef, tout le monde a un mot à dire sur qui doit passer au contrôle et qui ne doit pas l’être dans le rang des passagers.
Je pleure aux chaudes larmes pour mon pays, la RDC, mon grand Congo, moi qui ai fait le tour du monde entrain de me conformer à la lettre aux lois des pays où je suis passé, alors que chez moi, c’est le désordre très proche de la jungle.
Sans abuser de votre précieux temps, je m’en vais vous faire le témoignage accablant de ce que je viens de vivre à mon retour d’Allemagne, le vendredi 22 juillet 2022 à l’aéroport de N’Djili.
Départ de Kinshasa !
Je suis parti de Kinshasa, le dimanche 17 juillet 2022, à bord d’un régulier d’Ethiopian Airlines. Comme d’habitude, j’ai pris soin de me faire tester à la COVID-19 (test rapide le jour même du voyage à la Fondation Maison Pungwe, non loin de Memling dont le résultat sort deux heures après au coup de 45 USD par personne, prix officiel). Question de me conformer au délai légal de la validité du test Covid-19.
Mon test, mon passeport avec visa territorial Allemand en mains, je me suis pointé à l’aéroport pour les formalités de voyage au pavillon départ des vols internationaux. Je suis accueilli à la première barrière de la RVA où on m’exige de brandir tous mes documents de voyage. À l’entrée, je suis accueilli juste derrière la porte d’entrée à gauche par le service de sécurité sanitaire aux frontières qui vérifie la validité de mon test Covid-19, parce que je ne suis pas encore vacciné contre cette pandémie – un problème de conviction personnelle.
Cinq minutes après, je me dirige vers le guichet de Rawbank pour payer 55 USD, dont 50 pour le Go pass et 5 USD pour une taxe statistique pour la ville de Kinshasa. Juste après cette étape, je suis directement pris en charge par le service sécuritaire d’Ethiopian Airways qui vérifie mes documents dont le passeport, le visa, le document du vaccin ou encore la validité de l’attestation du test Covid-19, avant de franchir la 2ème barrière de la RVA en brandissant tous les documents de voyage.
Je fais le check-in difficilement, parce que je suis arrivé avec un léger retard, mais on m’accepte quand même parce que j’ai accepté de surclasser mon billet de classe économique en Business classe. Le check-in terminé, je suis encore pris en charge par le service de sécurité sanitaire aux frontières qui vérifie encore mon test Covid-19, avant d’apposer le sceau m’autorisant à me pointer devant le comptoir de la DGM dans une fille indienne.
Très courtoise et disciplinée, la dame de la DGM qui me reçoit vérifie mes documents de voyage, me pose quelques questions avant de me prendre en photo mon passeport. Elle appose le sceau de la DGM et me laisse passer pour la fouille, avant la salle d’embarquement.
Soudain un chef d’équipe, sans tenue mais Motorola en mains, oriente les passagers sous un ton ferme. Tout le monde se déchausse, la ceinture retirée, les équipements électroniques sortis des sacs. Tout le monde glisse sous le portique à Rayon X pendant que les sacs et autres bagages à mains sont passés au crible.
Après des échanges parfois houleux, tout le monde s’installe dans la salle d’attente. Les bafles de l’aérogare annoncent l’embarquement immédiat et tout le mode à la queue leu-leu s’avance devant un autre guichet d’Ethiopian Airways où on vérifie le boarding pass ou carte d’embarquement, avant de sortir du pavillon pour prendre le bus.
Juste avant de monter dans le bus, une autre fouille de routine.
En débarquant du bus sur le tarmac, nous sommes accueillis par les agents de la RVA qui revérifient principalement le Go pass. Juste au bas de la passerelle, c’est-à-dire au pied de l’avion, un autre contrôle des documents, principalement la carte d’embarquement et le passeport. Au-dessus de la passerelle à la porte de l’avion, un dernier contrôle où l’hôtesse ou le steward vérifie le boarding pass et le passeport pour orienter le passager vers son siège respectif.
Cette étape terminée, chaque passager s’installe confortablement dans son siège en attendant le décollage de l’avion.
Voilà détaillé à peu près, la trajectoire de tout passager qui voyage par l’aéroport international de N’djili.
Dans l’avion, peu avant d’arriver à destination, on remet à chaque voyageur le formulaire des services aéroportuaires du pays de destination, dans lequel le passager doit décliner son statut sanitaire par rapport à la Covid-19 et autres maladies.
À l’arrivée, tout comme au départ du pays visité, les contrôles sanitaire et sécuritaire sont stricts. On ne badine pas avec les instructions sanitaires et sécuritaires dans toutes les grandes villes du monde. Ici, il n’y a pas de discrimination, pas de privilèges des fonctions ou de rang social, tout le monde s’y conforme au risque de payer sans ménagement de fortes amendes ou parfois une prison ferme.
Retour à Kinshasa N’DjiIi!
Voici ce que j’ai vécu, le vendredi 22 juillet 2022 à mon retour au pays. Après avoir été soumis à un contrôle drastique partout où je suis passé (Berlin, Frankfurt et Addis-Abeba), à N’Djili, c’est un scandale que j’ai commencé à vivre au pays depuis le pied de l’avion.
Pendant que les bus de la RVA venaient prendre tous les passagers en débarquement, conformément au dispositif sécuritaire établi depuis des lustres, c’est une voiture long châssis, immatriculée Présidence de la République qui embarque quelques passagers privilégiés y compris les enfants de « je ne sais qui », sans qu’aucune autorité aéroportuaire de la RVA, DGDA, ANR, etc. n’intervienne.
Les privilégiés dont aucune identité n’a été prélevée pour savoir s’il y avait parmi eux des étrangers embarquent au vu et au su de tout le monde, au mépris du protocole établi officiellement. Destination : la sortie de l’aéroport.
Nous autres, « les sans privilèges », nous sommes embarqués sous une forte surveillance dans des bus et escortés jusqu’aux pavillons de l’INRB. Une dizaine des policiers mains nues nous accueillent en nous montrant la porte du passage obligé pour le contrôle de la Covid-19.
Une fois à l’intérieur, un agent de l’INRB, parlant d’une voix forte, filtre les passagers en autorisant à ceux qui sont vaccinés de montrer la preuve de leur vaccination et de s’en aller bonnement poursuivre d’autres formalités à la DGM. Ceux qui sont détenteurs des attestations des tests Covid-19 doivent se faire tester encore en payant 46 USD. Si vous payez par carte bancaire dans le terminal d’une banque commerciale. Si c’est cash, le passager paye 45 USD. Et s’il n’a pas rempli le formulaire de l’INRB en ligne avant de voyager, eh bien, il est obligé de remplir sur place le formulaire INRB dans un téléphone prévu pour cela que manipule volontiers une gentille dame prêt à servir tous ceux qui se trouvent dans cette catégorie de passagers.
Comme d’habitude, c’est dans cette pièce où il y a un véritable affrontement verbal entre le personnel de l’INRB et les passagers d’origine congolaise, qui pour la plupart, refusent carrément de payer 45 USD pour un autre test Covid-19, avant d’entrer dans la ville.
J’aide le personnel à convaincre ceux qui s’énervent que cette disposition est légale et que d’autres pays le font aussi.
Tout le monde se soumet difficilement après avoir beaucoup bavé. Arrive maintenant mon tour, moi qui n’ai pas rempli le formulaire INRB en ligne. La facilitatrice accepte volontiers de m’aider en me posant quelques questions auxquelles je réponds gentiment. Arrive maintenant le moment de payer. Je sors ma carte bancaire pour payer, mais le terminal de Rawbank qui est sur place est complètement déchargé. Il faut aller chercher un autre terminal plus loin dans le pavillon départ. Je patiente près de 30 minutes avant de voir arriver un terminal chargé. Alors j’en profite pour poser des questions aux agents de l’INRB qui sont à mes côtés en leur disant « time is money, le temps c’est de l’argent ». Comment peuvent-ils être négligents à ce point jusqu’à faire perdre plus de 30 minutes à un passager? Et si je n’étais pas compréhensif, j’allais moi aussi râlé pour m’avoir bouffé mon temps à cause de leur négligence. Nous finissons par nous entendre. Je leur promets quand même de dénoncer cette négligence coupable.
C’est ce que je suis entrain de faire à travers cet article. Je sors du pavillon INRB, il n’y a personne pour m’orienter vers la porte du pavillon arrivée vols internationaux de la RVA. Heureusement, je connais le circuit, je me dirige seul vers le comptoir arrivée vols internationaux de la RVA.
Les formalités se passent bien devant les agents de la DGM, très accueillants mais fermes. Comme je n’avais pas de bagages en soute, je sors des comptoirs de la DGM pour me retrouver nez à nez avec les agents du service de contrôle sanitaire aux frontières qui vérifient mes papiers avec légèreté en me disant : « Tomoni ba papiers, mais tikela biso sucrée na biso omikendele nayo », traduisez « Nous venons de voir vos papiers, mais laissez-nous un pourboire avant de partir ». Je regarde cette dame qui me parle ainsi droit dans les yeux en lui demandant : « Madame, c’est comme ça que vous vous comportez ici ? Elle arbore un sourire de culpabilité et me laisse passer ».
Arrivée à la hauteur des tapis roulants, comme je n’avais pas de bagages en soute, je me suis dis de faire un tour dans les toilettes. Je trouve à l’entrée des toilettes femmes une dame et devant les toilettes hommes un Monsieur gentil. Je fais un tour dans les toilettes hommes, il n’y a même pas une goute de savon liquide, voire en dur. Tous les sèche-mains sont hors usage. Je me retourne vers le Monsieur et la dame qui s’occupe de la propreté des toilettes en leur posant la question : « Où est le savon ? ». Réponse sèche : « Il n’y en a pas depuis hier soir ».
Puis j’insiste : « Mais comment vous nettoyez les toilettes ». Ils me répondent à l’unisson : « Avec de l’eau simplement ! »
Je repose la question : « Et que font les autorités de la RVA qui vous emploient ici? » Réponse courte: « Elle n’ont pas encore donné du savon ».
Scandalisé, je quitte les toilettes en leur promettant de venir faire un don de savons liquide aux toilettes de l’aéroport International de N’Djili. Je m’avance vers la sortie en ajustant très bien mon masque Covid-19 jusqu’en dessous des sourcils pour passer inaperçu, car les douaniers qui travaillent au scanner de la sortie me connaissent bien. Un expatrié est devant moi avec son sac à dos, les douaniers l’interpellent et l’oblige à faire passer son sac à dos sous scanner. Le Monsieur s’exécute. J’essaie de forcer mon passage, les douaniers m’interpellent d’un ton ferme : « Monsieur tous les bagages doivent passer sous scanner ». Je m’exécute.
À la porte de sortie, je trouve un policier avec un bandeau rouge à l’épaule gauche entrain de se chamailler avec les policiers en tenue de la RVA.
Le Monsieur en bandeau rouge cherche à s’imposer, mais les policiers de la RVA sont fermes. Je m’arrête quelques minutes pour observer la scène. Je m’approche du policier en bandeau rouge qui est ivre en lui posant la question: « Pourquoi vous voulez violer les instructions en faisant entrer les non passagers dans la porte de sortie des passagers qui viennent de débarquer ? ». Il me regarde et ne dis mot.
Je me retourne alors vers les agents RVA en leur posant la question: « C’est comme ça que vous travaillez en désordre ? ». L’un a pris le courage de me répondre : « Monsieur SEKANA, ici tout le monde est chef, makambo tomonaka awa eza ebele ». Traduction : « Monsieur SEKANA, tout le monde est chef ici, nous vivons de choses en ce lieu ».
Ayant déjà été identifié et démasqué, je retire mon masque et me présente aux agents RVA en leur disant : « Vous êtes à la porte d’entrée du pays, vous devez vous comporter avec beaucoup de responsabilité, car l’image de notre pays en dépend. Je vais dénoncer tout ce que je viens de vivre ici à l’aéroport dans un article que je vais signer. Mais je vous demande une chose, lorsque cet article va paraître, ayez le courage d’assumer vos responsabilités devant vos autorités qui vont vous interpeller après avoir lu mon article. Ne dites pas que vous ne m’aviez pas vu assister à ce désordre ».
J’ai remis ma carte de visite à l’un de ses agents et je suis parti de l’aéroport.
Dehors, j’ai trouvé une foule des gens qui attendaient les passagers comme d’habitude. Tout le monde parle à haute voix. Il y a même la bousculade entre la foule et les passagers qui viennent de débarquer.
Ce film vécu m’a beaucoup interpellé. J’ai commencé à me poser des questions. Pourquoi ailleurs dans presque tous les aéroports du monde, il y règne l’ordre, la discipline et le respect des normes, alors qu’à N’Djili, c’est une jungle?
Alors j’ai décidé de partager avec vous mon carnet de voyage. Mais je ne peux pas vous quitter sans formuler quelques recommandations pertinentes aux autorités compétentes.
L’aéroport international de N’Djili est une vitrine, mieux une porte d’entrée et de sortie de notre pays, qui doit être très sécurisée. L’ordre, la discipline ainsi que le respect des normes internationales et nationales doivent y être observées scrupuleusement.
Devant les dispositifs sécuritaires, il n’y pas de privilégiés, car le privilège est une grosse faille à laquelle peuvent recourir les terroristes pour nous attaquer.
Nous avons perdu beaucoup de compatriotes à la Présidence de la République, peut-être à cause de ces privilèges qui les ont soustraits des services de contrôle. Il faut réglementer et bien limiter les privilèges à quelques personnalités, chefs de corps et ne jamais généraliser ce privilège aux membres de famille élargie, amis et connaissances.
Il faut supprimer et sanctionner l’usage ou le recours aux pourboires comme à Singapour !
Les toilettes publiques d’un aéroport international comme N’Djili doivent bénéficier d’une attention particulière des autorités de la RVA. Elles doivent y veiller matin, midi et soir, comme sous d’autres cieux.
Il faut mettre fin au retrait des marchandises ou l’exfiltration des passagers au pied de l’avion sous quelques prétextes que ce soit.
Les images des caméras de surveillance doivent être exploitées chaque jour pour sanctionner tous ceux qui marchent à conflits ouverts avec les lois du pays. Les données des passagers doivent rester le plus longtemps possible dans le système de la RVA pour faciliter la tâche aux agents, car selon l’agent qui m’a accueilli, 24 heures après, elles sont sorties du système. En outre, il faut supprimer la multiplicité des services à l’aéroport international de N’Djili.
Que mon Dieu bénisse abondamment notre pays la RDC et tous ses habitants !
Jérôme SEKANA P.P.
DG de l’AGM et coordonnateur de l’ONG Toile d’Araignée.