Selon le ministre des Finances, à ce jour, le Gouvernement a mis à la disposition de la CENI (Commission électorale nationale indépendante) plus de 400 millions USD pour son fonctionnement et la prise en charge de certaines opérations électorales, dont l’enrôlement des électeurs, lancé dans dix provinces de l’Ouest depuis le 24 décembre 2022. A l’Observatoire de la dépense publique (ODEP), une ONG spécialisée dans la gestion des finances publiques, on voudrait voir un peu plus clair dans la gestion des fonds mis à la disposition de la CENI. L’ODEP estime que seule une ligne budgétaire de 250 millions USD était prévue dans le budget 2022 pour le compte de la CENI. Si le Gouvernement dit avoir décaissé plus de 400 millions USD pour le compte de la centrale électorale, l’ODEP conclut qu’une bonne partie de crédits alloués à la CENI ont été faits en dehors du budget. Une faute de gestion qui remet en cause, note l’ODEP, la transparence dans le fonctionnement de la CENI. Au regard de tous ces dysfonctionnements, le prof Florimond Muteba, président du Conseil d’administration tire une conclusion alarmiste : « Le manque de transparence de la CENI hypothèque la poursuite du processus électoral ». Pour cette raison et bien d’autres, l’ODEP estime que Denis Kadima, président de la CENI, doit s’expliquer sur l’utilisation des fonds reçus du Gouvernement, soit plus de 400 millions USD pour la seule année 2022.
Les premiers ratés des opérations d’enrôlement des électeurs, lancées le 24 décembre 2022 dans la première aire opérationnelle, soit 10 provinces, ont jeté le doute sur la capacité de la CENI, sous la présidence de Denis Kadima, de garantir un processus électoral apaisé, crédible et transparent. A la Société civile, les dysfonctionnements relevés dans ces opérations d’enrôlement ont suscité l’intérêt de s’interroger sur l’utilisation des fonds mis à la disposition de la centrale électorale.
Ce mercredi 28 décembre 2022, des acteurs de la Société civile livrent leurs observations dans une manifestation prévue au bâtiment de la territoriale. En attendant, la Société civile a annoncé les couleurs. Elle est convaincue d’une chose : «La CENI est mal gérée ».
C’est l’Observatoire de la dépense publique (ODEP) qui a été la première ONG à lancer l’alerte. L’ODEP note qu’une nette opacité entoure la gestion des fonds mis à la disposition de la CENI.
Des inquiétants crédits extra-budgétaires
L’ODEP a de bonne raisons de s’inquiéter de l’opacité qui entoure la centrale électorale.
Le prof Florimond Muteba, président du Conseil d’administration de l’ODEP, cherche à comprendre la base sur laquelle a été décaissé le montant de plus de 400 millions USD mis à la disposition de la CENI par le Gouvernement.
A Econews, le prof Muteba a exprimé ses inquiétudes en ces termes : «Ces révélations sont du ministre des Finances. Or, suivant la loi des finances 2022, c’est une ligne de crédit de 250 millions de dollars américains qui a été prévue pour la CENI. Alors, quand le Gouvernement dit avoir déjà mis à la disposition de la CENI plus de 400 millions de dollars américains, cela voudrait dire qu’une bonne partie de ces fonds a été exécutées en extra-budgétaire. Ce qui est grave en matière des finances publiques».
Par ailleurs, le professeur Muteba est d’avis que «le Gouvernement a donné l’argent à la CENI sans se soucier de son utilisation». Et d’ajouter : «Il est difficile de retracer dans les états budgétaires des fonds réellement mis à la disposition de la CENI».
Manque de transparence
Un article, repris par le site d’infos en ligne actua-lite.cd, indique, citant l’ODEP, que les données des états de suivi budgétaire (ESB) du ministère du budget relèvent que les dépenses de paiement pour le fonctionnement de la CENI, de janvier à octobre 2022, ont explosé à 49 millions USD sur des prévisions à hauteur de 6 millions USD, soit un dépassement de 786 % du taux d’exécution. La rémunération a connu une exécution normale et les autres rubriques n’ont connu aucune exécution, selon le ministère du budget.
Selon les états de suivi budgétaire (ESB), le crédit alloué à la CENI au 31 octobre 2022 est de 581 milliards FC, soit 290 millions USD. Ce crédit est reparti de la manière ci-après, selon les ESB : Budget électoral : 500 milliards FC, soit 250 millions USD; Fonctionnement : 12 millions 693 FC soit 6 millions 346 USD; Intervention économique, sociale,… : 176 millions 094 FC, soit 88 millions USD; Investissement sur ressources propres : 35 millions 046 FC, soit 17 millions 523 USD; Rémunération : 20 millions FC, soit 10 millions USD.
Concernant l’exécution du budget de la CENI au 31 octobre 2022, les états de suivi budgétaire ne font allusion qu’à trois rubriques. Premièrement, le «Total paiement» qui a coûté à la CENI 119 millions 943 FC, soit 59 millions 971 USD contre 484 millions FC soit 242 millions USD, soit 24,7 % de taux d’exécution. Deuxièmement, le «paiement de fonctionnement» qui a coûté à la CENI 99 millions 768 FC, soit 49 millions 884 USD contre 12 693 millions FC, soit 6 millions USD, soit 786 % de taux d’exécution. Et troisièmement, le «Paiement rémunération » qui est évalué à 20 millions FC, soit 10 millions USD contre 20 millions FC, soit 10 millions USD, soit 100% du taux d’exécution.
Contrairement aux chiffres des états de suivi budgétaire, le ministre des Finances, Nicolas Kazadi, a indiqué que le total des décai-ssements effectués pour les opérations électorales est de 414,6 millions USD, soit un taux de décaissement de 165,6% par rapport aux prévisions arrêtées par la Loi des finances, exercice 2022. C’était au cours de la réunion du Conseil des ministres du Gouvernement, tenue le vendredi 4 novembre 2022.
Les chiffres indiqués par le ministre Nicolas Kazadi au cours du Conseil des ministres, n’ont jamais été rendus publics. A l’ODEP de s’interroger : «Quid du véritable déboursement ? »
En conclusion, l’ODEP déplore le manque de transparence dans la gestion des fonds alloués à la CENI. Cette ONG, spécialisée dans le contrôle citoyen des finances publiques, ne cache pas ses inquiétudes du fait des états de suivi budgétaire qui ne mentionnent pas la mise à disposition des fonds pour les questions électorales en dépit de différents achats effectués par la CENI.
Le budget du processus électoral «n’est pas traçable ni au condensé hebdomadaire de la BCC, ni aux ESB du ministère du budget», précise le document du ministère du budget, consulté par l’ODEP. Ce qui témoigne, selon l’ONG, le manque de transparence de la gouvernance de Denis Kadima
L’ODEP tient à la gestion orthodoxe des fonds alloués à la centrale électorale, gage d’un processus électoral réussi, transparent libre et apaisé. Ce mercredi, dans une conférence prévue au bâtiment de la Territoriale, l’ODEP et d’autres organisations de la Société civile promettent d’éventrer le boa sur la gestion obscure de la CENI, sous Denis Kadima.
Econews