Grandes manœuvres politiques à l’Hôtel de ville de Kinshasa : Gecoco Mulumba en croisade contre Ngobila, ou le plan de l’UDPS pour récupérer Kinshasa

Le Gouverneur de la ville de Kinshasa, Gentiny Ngobila (à droite), et son adjoint Gecoco Mulumba

Après les mois d’angélisme, vient la séparation d’entre le Gouv’ et son adjoint, même s’ils sont tous des tshisekedistes au sein de l’Union sacrée. Loin du souci d’une bonne gouvernance, pour laquelle Ngobila s’est déjà battu aussi bien contre des députés provinciaux (dont Mukebayi Nkoso) que son premier adjoint Néron Mbungu, la croisade du Vice-Gouv’ vise surtout, pour l’UDPS, à prendre le contrôle de la capitale en prévision des élections générales de décembre 2023; tout en se gardant de trop humilier Ngobila qui se trouve à Kinshasa chez-lui dans le grand espace kongo s’étendant du grand Bandundu au Kongo central en passant par Kinshasa.
«Nous nous entendons très bien. S’il y avait divergence d’idée, on allait pas avancer du tout». Ainsi s’exprimait Gérard Mulumba, dit Gecoco, au sujet de sa collaboration avec le Gouverneur de la ville de Kinshasa, Gentiny Ngobila. Le duo semblait être une paire pour le salut des kinois tant le nouveau Vice-Gouverneur n’avait pas attendu le temps d’observation pour se jeter à l’eau aux côtés de son titulaire pour attaquer certaines opérations particulièrement impopulaires sur terrain.

Le glas a sonne pour Ngobila
Mais depuis le début, les observateurs avertis ne se faisaient aucune illusion sur l’arrivée de Gérard Mulumba aux côtés de Ngobila Mbaka plusieurs mois après la démission de Néron Mbungu, ancien Vice-gouverneur visé par une motion de défiance à l’Assemblée provinciale de Kinshasa pour avoir, justement, formulé en son temps les mêmes dénonciations que Gécoco Mulumba aujourd’hui. Les visionnaires assuraient que cette arrivée annonçait le déclenchement du processus d’élimination de Ngobila pour permettre à l’UDPS de reprendre le contrôle de la ville de Kinshasa en prévision des élections générales de décembre 2023.
Après l’arrivée au ministère de l’Intérieur de Peter Kazadi, un dur des durs dans le pré-carré du parti et de la cour présidentiels, il fallait bien en faire autant pour la capitale qui, de tout temps lors des élections, a toujours été un casse-tête pour les régimes au pouvoir. Et le casting sur Gérard Mulumba n’avait rien de mieux. Même si l’homme est un «ancien nouveau » au sein de l’UDPS après avoir bourlingué au PPRD, puis au MLC au fil des cycles électoraux, personne n’a perdu de vue sa proximité biologique qui ferait de lui l’homme le plus sûr pour ces élections qui arrivent sans désemparer.

Les parapluies à la présidence perdues, l’ACP ne pouvait plus rien pour Ngobila
Gécoco Mulumba vient ainsi d’abattre les cartes pour déclencher la défenestration de Ngobila. Exit ses grandes manœuvres avec son parti politique, l’ACP, qui, de l’avis des analystes, jouit d’une perception plutôt négative auprès de l’opinion kinoise en raison de la gestion catastrophique de son fondateur. Un bois mort donc pour Tshisekedi et dont il faut absolument se débarrasser pendant qu’il est encore temps.
Mais ce n’est pas tout. A la défaveur du Gouv’ en sursis on parle aussi de la descente aux enfers de son principal parapluie à la présidence. Fortunat Biselele dit Bifort fut, en effet, le grand soutien de Ngobila avec qui il partage une alliance conjugale.
De plus, les conditions de l’éloignement de Bifort ne pouvaient pas laisser les choses en l’état sur la proximité de Ngobila avec le régime. Même si, politiquement, Gentiny Ngobila est sans reproche sur sa loyauté et sa fidélité, l’homme devait être mis au rancart, estiment les observateurs.
Donné pour avoir été à la base de l’élimination de Daniel Aselo, un autre UDPS à la tête du ministère de l’Intérieur à qui il avait ouvertement reproché d’avoir fait nommer des bourgmestres sans consulter le Gouverneur et son adjoint qu’il est, Gérard Mulumba semble donc avoir entamé le plan de destitution de Gentiny Ngobila pour permettre à l’UDPS d’asseoir sa stratégie de conquête de la capitale où son parti politique a du mal à se positionner. Ce n’est pas pour rien qu’au lieu de s’en remettre à l’Assemblée Provinciale de Kinshasa pour destituer Ngobila, il a choisi de saisir Peter Kazadi de l’Intérieur. Un allié sûr qui, même s’il n’a pas le pouvoir de démettre un Gouverneur de province, ne manquerait pas moins de le maintenir à sa disposition et laisser les coudées franches au Vice-Gouverneur.

Marcher tout de même sur les œufs avec Ngobila
Et le tour aura été joué en douce, sans passer par une épreuve de force. Parce que l’autre enjeu est d’éviter toute forme d’humiliation de Ngobila qui traîne derrière une réalité sociologique non négligeable sous les tropiques.
En effet, natif de la zone kongo regroupant le grand Bandundu, la ville de Kinshasa et le Kongo central, Gentiny Ngobila est aussi membre influent du fameux club «Bana Kin » dominé justement par des ressortissants de ces trois provinces.

JDW