Siégeant vendredi en matière de contentieux de candidatures à l’élection présidentielle de décembre prochain, c’est ce lundi que la Cour constitutionnelle rend son verdict dans les différentes affaires portées à son arbitrage. Une seule défraie la chronique, c’est celle qui oppose Noël Tshiani à Moïse Katumbi, tous deux candidats à la présidentielle de cette fin d’année. Initiateur de la requête, Noël Tshiani remet en cause la nationalité du leader d’Ensemble pour la République et exige son invalidation sur la liste de 24 candidats retenus provisoirement par la CENI (Commission électorale nationale indépendante). Ce que rejette catégoriquement le camp Katumbi. Toujours est-il que le dernier mot revient à la Cour constitutionnelle, alors que la CENI a dit n’avoir décelé aucune irrégularité dans le dossier Katumbi.
A moins de deux mois de la présidentielle du 20 décembre 2023, on n’est pas encore fixé sur la liste définitive de ceux qui seront sur la ligne de départ. Si la CENI (Commission électorale nationale indépendante) a joué sa partition n’écartant aucune candidature sur la liste de 24 candidats qui lui ont transmis leurs dossiers, le dernier mot revient à la Cour constitutionnelle, avant la publication le 18 novembre 2023, soit la veille du lancement de la campagne électorale, de la liste définitive à la présidentielle.
Les empoignades engagées à la Cour constitutionnelle autour des requêtes en invalidation des candidatures du président sortant d’une part, et de Moïse Katumbi, d’autre part, connaîtront (peut-être) leur épilogue ce lundi 30 octobre.
Le spectacle – d’aucuns ont carrément évoqué un scandale – vécu le vendredi dernier à la Haute Cour (car c’en est un) a suscité une levée de boucliers qui surchauffe la Toile. Et les passions des uns et des autres iront crescendo jusqu’au prononcé des arrêts définitifs selon la lecture qu’en fera la Cour sur les suggestions décriées du procureur qui a eu le mérite de mettre à vif les nerfs de l’opinion nationale et fait lever le sourcil dans certaines chancelleries « amies ».
Dans le premier cas, la requête déposée par le candidat Seth Kikuni mettant en cause le dossier du candidat Félix Tshisekedi, accusé de faux et usage de faux, pour la raison que le libellé de son identité ne correspond pas à celui déclaré au dépôt de sa candidature lors du scrutin présidentiel de 2018 et qu’il aurait gagné. En deux temps trois mouvements, la requête est écartée d’un revers de main. Motif : elle est frappée de «forclusion de délai ». A la poubelle donc la requête !
Quant à celle (requête) de Noël Tshiani contestant la nationalité congolaise au candidat Moïse Katumbi et déposée 24 heures après, elle est déclarée recevable et séance tenante, le juge exige que lui soient communiquées les pièces du dossier afin de s’en faire sa propre religion ! En clair, le procureur estimerait ainsi qu’une requête déposée un lundi (contre Fatshi) est frappée de « forclusion de délai » et non celle déposée le mardi suivant (contre Katumbi) jugée, elle, recevable.
Jamais sans doute les honorables lambris de la Cour constitutionnelle ne retentirent autant de noms d’oiseaux proférés par les camps respectifs des uns et des autres, exercice au cours duquel les armées de conseils chauffés à blanc ont particulièrement brillé avant de descendre dans l’arène diffamante des réseaux sociaux où des invectives malséants prospèrent depuis :«Injustice flagrante ! Tribalisme rampant ! Justice des deux poids deux mesures… ».
Thambwe Mwamba récidive
Dernier ministre de la Justice de l’ère Kabila, Alexis Thambwe Mwamba a eu à gérer le dossier chaud de la nationalité de Moïse Katumbi, alors en disgrâce dans l’entourage de Kabila.
Des rumeurs les plus persistances ont fait état du retrait de la nationalité congolaise du leader de Ensemble pour la République, sur décision de Thambwe Mwamba. C’est sur quoi s’appuie ses détracteurs pour l’écarter de la course présidentielle de décembre prochain.
A la surprise générale, Alexis Thambwe Mwamba, sénateur de son état, resté fidèle au FCC (Front commun pour le Congo) a fait une apparition médiatique, attestant n’avoir jamais signé un acte de retrait de la nationalité de Katumbi.
A l’Union sacrée de la nation, on a crié à la trahison, estimant que le sénateur de Kindu aurait été corrompu par le camp Katumbi pour prendre sa défense.
Ce week-end, Alexis Thambwe Mwamba est revenu à la charge, balayant toutes les allégations mises à sa charge par le camp du pouvoir.
Sur son compte X (ex-twitter), le tri-hebdomadaire Africanews le relaie en ces termes : «J’ai aujourd’hui 80 ans. J’ai travaillé pendant 38 ans avec des fonctions étatiques, 7 fois ministres, PDG, ambassadeur et maintenant je suis sénateur… Moïse Katumbi va me donner combien d’argent? Je ne suis pas membre de son parti. Il n’est pas de la même famille politique que moi… Nous avons des ministres et des députés avec des nationalités diverses. Il y a même un candidat président de la République bien identifié avec une nationalité étrangère incontestable. Personne n’en parle parce qu’ils sont du bon côté de l’histoire, mais les gens s’acharnent sur Katumbi par hypocrisie. Katumbi est Congolais. Ses documents sont authentiques. Le pays est au bord de l’implosion si sa candidature est invalidée… Mon souci, c’est l’intégrité du pays».
La CENI prend également la défense de Katumbi
Outre le collectif de ses avocats, Moïse Katumbi a également un allie de taille : la CENI.
Vendredi devant la Cour constitutionnelle, la CENI a confirmé l’authenticité du certificat de nationalité annexé au dossier de Katumbi. Dans ces conditions, il n’est pas évident que la haute Cour contredise va en contre-sens de la CENI. Qui pis est, Noël Tshiani, initiateur du contentieux en nationalité Katumbi, ne dispose d’éléments irréfutables pour appuyer son acte d’accusation. Le seul élément en sa possession, a-t-on appris, est un article de Jeune Afrique remettant en cause, sans preuves évidentes, la «con-golité » de Katumbi.
«La requête de Noël Tshiani était basée sur un article de Jeune Afrique attribuant la nationalité italienne à Moïse Katumbi », a dit vendredi Me Hervé Diakiese, avocat de ce dernier, à la sortie de la Cour constitutionnelle. Et d’ajouter : «La CENI a confirmé la ‘congolité’ de Katumbi devant la haute Cour en brandissant son attestation de nationalité originale, seul document légal de détention de la nationalité congolaise ».
Quoi qu’il en soit, on est encore au stade de supputations. En effet, le dernier mot revient aux neuf juges constitutionnels qui se décident ce lundi sur les contentieux en candidats à la présidentielle soumis à leur arbitrage, avant la publication, le 18 décembre 2023, de la liste définitive de ceux qui vont défier Félix Tshisekedi, le 20 décembre 2023, devant les urnes.
Hugo Tamusa