La scène était censée marquer un tournant : des « négociations directes » à Luanda entre Kinshasa et la coalition rebelle AFC/M23, sous médiation angolaise. Un espoir, aussi tenu soit-il, de désamorcer une crise qui ensanglante l’Est de la RDC depuis des années. Mais le rideau est tombé avant même le premier acte. La délégation rebelle a claqué la porte, invoquant les « sanctions européennes récentes » qui, selon elle, biaisent le dialogue.
Kinshasa, présent, se retrouve face au vide. Quant à l’Angola, médiateur attitré, son crédit diplomatique en sort écorché.
Le timing des sanctions de l’Union européenne – frappant des responsables du M23 et du Rwanda à peine 24 heures avant les pourparlers – interroge. « Comment négocier sous la menace d’un couteau sur la gorge ? », s’insurge un observateur.
Si Bruxelles brandit habituellement ces mesures comme des outils de dissuasion, leur déploiement à la veille d’un dialogue crucial ressemble à un coup de semonce maladroit. L’UE aurait-elle pu patienter, ne serait-ce que quelques jours, pour laisser une chance à la diplomatie ?
En précipitant son geste, elle a offert au M23 une excuse en or pour se retirer, tout en affaiblissant la position de Luanda.
Luanda, qui a investi capital politique et ressources dans cette médiation, se retrouve piégé. Les efforts du président João Lourenço, pourtant salués jusque-là, sont réduits à néant par une décision unilatérale de Bruxelles. Pire : l’UE semble avoir oublié que la diplomatie ne se réduit pas à un jeu de sanctions. Elle exige du temps, de la nuance, et parfois l’art de fermer les yeux sur certaines réalités pour atteindre un compromis salvateur.
Aujourd’hui, le front est gelé. Les armes se taisent, mais dans une tension insoutenable. Les humanitaires redoutent une reprise des combats plus violente encore, tandis que les civils, otages de cette impasse, paient le prix fort.
L’impasse de Luanda doit servir d’électrochoc. L’UE gagnerait à aligner son calendrier sur les processus de paix régionaux, plutôt que d’agir en ordre dispersé. Les sanctions, si nécessaires soient-elles, doivent être déployées avec chirurgie, non comme des coups d’éclat médiatiques.
La paix mérite mieux qu’un jeu d’échecs où chaque coup calculé éloigne un peu plus l’horizon de la réconciliation.
Econews