Le chef de file des députés pétitionnaires, Crispin Mbindule, victime de la realpolitik de l’Union sacrée de la nation (USN). Porté en lumière après avoir réussi à pousser Vital Kamerhe à la démission, le député se voit aujourd’hui lâché par sa propre majorité. La validation inattendue du rapport de la Commission spéciale, qui clôt le dossier en épargnant les trois autres membres du Bureau visés, a provoqué sa colère et son sentiment de trahison. L’homme qui a livré Kamerhe se retrouve isolé, sacrifié sur l’autel de la raison d’État.
L’arène politique congolaise à l’Assemblée nationale vient de connaître un dénouement aussi brutal qu’implacable. Moins d’une semaine après avoir réussi à faire tomber le Président de l’institution, Vital Kamerhe, et la Rapporteure adjointe, Dominique Munongo, le député Crispin Mbindule, chef de file des pétitionnaires, se retrouve à son tour au banc des accusés, victime d’une manœuvre politique de l’Union Sacrée de la Nation qui l’a désormais jeté aux oubliettes.
L’ascension fulgurante de Crispin Mbindule, passé de l’ombre à la lumière en menant l’offensive contre le Bureau de l’Assemblée, aura été de courte durée. Sa persévérance, conjuguée aux pressions internes au sein de la majorité, a fini par obtenir la démission de Vital Kamerhe, suivi de celle de Dominique Munongo. Pour Mbindule et ses troupes, c’était le triomphe du contrôle parlementaire et la preuve de leur influence.
Cependant, cet acquis s’est rapidement transformé en piège. Les démissions des deux têtes d’affiche du Bureau, au lieu de servir de rampe de lancement pour une purge complète, ont été utilisées par l’Union Sacrée comme le point final du dossier.
Le revers de la plénière
Le coup de théâtre est survenu lors de la plénière, où l’Assemblée nationale a validé le rapport de sa Commission spéciale. Contre toute attente, cette validation a eu pour effet d’épargner définitivement les trois autres membres du Bureau qui étaient également sous le coup d’une procédure de déchéance.
Pour l’Union sacrée, la messe est dite. La démission de Kamerhe a permis de désamorcer la crise la plus pressante sans déstabiliser l’institution au-delà du nécessaire. La majorité au pouvoir estime que, grâce aux départs de Kamerhe et Munongo, le dossier des pétitions est désormais définitivement clos. La suite se jouera autour d’une seule question : Qui remplacera Vital Kamerhe au perchoir ?
Trahison et colère : la mise à l’écart du purgeur
Pour Crispin Mbindule, cette issue est une trahison pure et simple. Il ne cache pas sa rage et son sentiment d’avoir été instrumentalisé, puis abandonné. Il a publiquement mis en cause le président de la Commission spéciale, Peter Kazadi, et le président ad intérim de l’Assemblée nationale, Jean-Claude Tshilumbayi, les accusant de l’avoir lâché après qu’il ait fait le sale boulot.
Dans un défi lancé à la nouvelle donne politique, Crispin Mbindule a promis de réunir les députés pétitionnaires pour prendre sa revanche. Une menace qui, dans le contexte actuel, sonne davantage comme un baroud d’honneur. Au sein de l’Union sacrée, son sort est scellé : l’instrument de la purge est jugé obsolète. La formule est cinglante : « Après avoir livré Kamerhe, il est bon pour la poubelle. » Mbindule est relégué au passé, son rôle ayant été accompli.
L’écho sombre de la prophétie d’un journaliste rodé
Ce scénario politique, digne d’un règlement de comptes, avait été anticipé par le journaliste professionnel Kudura Kasongo. Sur sa page Facebook, il avait formulé une mise en garde glaçante qui résonne avec une actualité amère : «Aucun tueur à gages ne survit ! Il sera liquidé le moment décidé. C’est la doctrine. Dans la maffia, la camorra et dans les services qui fonctionnent sur la loi du silence, aucun tueur ne survit. Il est, à son tour, exécuté, en termes soft neutralisé ».
Cette prophétie, qui voyait en Mbindule l’exécuteur politique dont la survie n’était pas garantie une fois sa mission accomplie, semble se réaliser de manière frappante. Le député, qui rêvait peut-être d’un nouveau statut après sa victoire, découvre la froide et impitoyable logique du pouvoir au sein de la majorité.
Sa volonté de se venger réussira-t-elle à faire bouger les lignes désormais fermées de l’Union Sacrée, ou n’est-il qu’un pion définitivement sacrifié sur l’échiquier politique ?
Econews

