Le 27 juin 2025, dans le Bureau ovale, le président américain Donald Trump annonce la signature d’un accord de paix historique entre le Rwanda et la RDC, mettant un terme à trois décennies de conflit ayant fait près de six millions de morts. « C’est une honte, nous allons y mettre fin », déclare-t-il, pointant du doigt l’inaction de ses prédécesseurs. Derrière ces mots se cache une réalité plus sombre : l’implication passée des États-Unis dans la déstabilisation de la RDC, orchestrée sous l’ère Clinton au nom d’intérêts économiques et géopolitiques. Des archives déclassifiées aux témoignages d’experts, une vérité émerge : la guerre congolaise fut aussi un terrain d’affrontement entre globalistes et souverainistes, entre pillage des ressources et quête de justice. Aujourd’hui, Trump tente de réparer les erreurs du passé, mais les réseaux maffieux, les résistances chinoises et les vieux démons régionaux menacent cette fragile paix. La RDC retrouve-t-elle enfin son destin, ou l’histoire se répétera-t-elle une fois de plus ?
Analyse des enjeux cachés de l’Accord du 27 juin et des responsabilités historiques américaines avec le politologue Freddy Mulumba Kabuayi wa Bondo.
« J’ai demandé combien de temps dure cette guerre (entre le Rwanda et la RDC), un ami très impliqué a dit 30 ans, et au moins 6 millions de personnes ont été tuées pendant cette période. C’est incroyable. Quelqu’un a dit que c’était la plus grande guerre sur la planète depuis la seconde guerre mondiale. C’est une honte, nous allons y mettre fin.» Tels sont les propos du Président américain Donald Trump tenus dans le bureau ovale de la maison blanche le 27 juin 2025 à Washington après la signature de l’accord paix entre les ministres des affaires étrangères du Rwanda et de la RDC en présence du Vice-Président américain, Secrétaire d’Etat et l’Envoyé spécial du Président D. Trump. Ces propos du Président D. Trump exigent une analyse au-delà du texte de l’accord pour décrypter le sens et les enjeux en commençant par l’ancienne Administration Clinton.
De la responsabilité de Bill Clinton dans la tragédie Zaïro-congolaise
Du 20 janvier 1993 date de l’entrée du Président Bill Clinton à la Maison Blanche au 20 janvier 2025 la fin du mandat du président Joe Biden, la politique étrangère américaine était marquée par une vision internationaliste, celle de l’élargissement économique et démocratique qui a constitué la doctrine de Bill Clinton. (Charles-Philippe David, Au sein de la Maison Blanche, la politique étrangère réorientée 1993-2000), Les presses SciencesPo, Paris, 2015). Selon le géopolitologue américain, John J. Mearsheimer, cette vision libérale mène tout droit à une politique active de changement de régime, dans le cadre de laquelle l’objectif est de renverser les autocrates et les remplacer par des démocraties libérales. Entre 1993 et 2017, les administrations Clinton, Bush et Obama, chacune aux commandes de la politique étrangère américaine pendant huit ans, étaient pleinement engagées dans la poursuite de l’hégémonie libérale. (The great delusion, liberal dreams and international realities, Center for international and area studies at Yale, usa, 2018).
C’était dans cette mouvance mondialiste globaliste libérale que la nouvelle renaissance africaine a vu le jour. Aux yeux de l’Administration Clinton, le président ougandais Yoweri Museveni, le président érythréen Isaias Afwerki et le premier ministre éthiopien Meles Zenawi étaient considérés comme les représentants des nouveaux dirigeants africains et l’incarnation d’une nouvelle génération d’hommes d’État qui ont rejeté les politiques ratées de leurs prédécesseurs et sont prêts à relever les défis de l’économie mondiale et du monde de l’après-guerre froide. (Marina Ottaway, Africa’s New leaders, Democracy or State Reconstruction ? Carnegie Endowment for International Peace, 1999.) Cette nouvelle renaissance africaine ne pouvait pas être possible avec la République du Zaïre dirigée par le Maréchal Mobutu au pouvoir depuis plus ou moins 29 ans. D’où la décision de l’administration Clinton de changer le régime à Kinshasa au lieu de soutenir sa démocratisation débutée le 24 avril 1990 en soutenant la guerre contre la RDC jetant ainsi un discrédit sur l’image des Etats-Unis.
Dans ces conditions, deux projets se croissent : celui de l’Administration Clinton associé aux hommes d’affaires d’Arkansas pour contrôler les matières premières ainsi que la balkanisation de la RDC et celui des réfugiés Tutsi (1959) de chasser le pouvoir Hutu du Rwanda et annexer les provinces du Kivu de la RDC. Le récit du romancier britannique John le Carré est éloquent à ce sujet. « Rien que des théoriciens avant-gardistes, des néo-conservateurs en vue, des sommités de la géopolitique. Le genre de types qui se réunissent dans les stations de ski pour décider du destin des nations. Ce n’est pas la première fois qu’ils se penchent sur le Congo oriental, et qu’est-ce qu’ils y voient ? L’anarchie comme résultat probable des prochaines élections, les Chinois qui grattent à la porte pour rafler toutes les matières premières. Alors, que faire ? Les Congolais n’aiment pas les Américains, et c’est réciproque. De leur côté, les Rwandais méprisent les Congolais, ils sont disciplinés et surtout efficaces. Alors, le plan des américains, c’est de consolider la présence économique et commerciale du Rwanda au Congo oriental jusqu’à la rendre incontournable. Ce qu’ils veulent, concrètement, c’est une annexion en douceur, et ils comptent sur un coup de main de la CIA. (John Le Carré, The Mission Song, David Cornwell, Londres, 2006).
Du côté du porteur du projet de contrôle des richesses et de l’implosion du Congo, on retrouve les néo conservateurs associés aux hommes d’affaires d’Arkansas, l’Etat où Bill Clinton était Gouverneur avant d’entrée à la maison blanche en 1993. C’est une multinationale l’American Mineral Field International (AMFI) créée en 1995 quelques mois après le génocide du Rwanda, qui a été forgée comme un instrument destiné à exécuter en Afrique la volonté de domination économique des financiers occidentaux et particulièrement d’assouvir en RDC les desseins des sociétés américaines dont les dirigeants participent aux grands enjeux stratégiques mondiaux qui relèvent de la science, de la technologie, des finances, des industries ou de la politique.
Dans ces conditions, l’AMFI a fait appel au service de conseiller militaire Willy Mallants, un ex-colonel belge qui a participé à la mise à mort de Patrice Lumumba avant de devenir conseiller militaire à Kinshasa. Sa mission était de nouer de contact avec les forces rwandaises et ougandaises pour renverser le régime du président Mobutu.
Il faut relever ici qu’il y avait déjà une tension était palpable au sein des institutions ougandaises entre les réfugiés rwandais tutsis qui occupaient des postes stratégiques et les élites ougandaises. Devenus un facteur d’instabilité pour le régime de Museveni en Ouganda, les réfugiés rwandais tutsi qui avaient le rêve de rentrer au Rwanda pour prendre le pouvoir vont profiter l’offre faite à Museveni par l’administration Clinton et les hommes affaires américains pour chasser du pouvoir les Hutus au Rwanda. En réalité pour l’administration Clinton, le Rwanda était le passage obligé pour chasser le président Mobutu du pouvoir et non changer le régime Hutu d’Habyarimana à Kigali.
Selon certaines indiscrétions, les stratèges américains voulaient utiliser l’épuration ethnique de Kasaïens du Shaba (Katanga) en 1991 pour monter une rébellion afin de chasser Mobutu du pouvoir. Mais ce projet fut abandonné car les Kasaïens ne pouvaient accepter de jouer des américains.
C’est dans ces conditions, les réfugiés tutsis rwandais éparpillés à travers la région des grands lacs étaient mis à contribution. Une coalition des réfugiés rwandais Tutsi est montée ressemblant les réfugiés tutsis de l’Ouganda, du Zaïre, de la Tanzanie, du Burundi, du Kenya et ceux de l’Europe et des Amériques pour d’abord chasser le pouvoir hutu en 1994 avant d’aller à l’assaut du Zaïre du Maréchal Mobutu après le génocide rwandais de 1994. (Buyoya Makutu, la géopolitique de l’instabilité dans la région des grands Lacs, Réflexions sur les réfugiés, ces acteurs/auteurs des mutations géopolitiques, L’Harmattan, paris 2009).
En effet, l’armée patriotique rwandaise (APR) composée essentiellement des réfugiés rwandais tutsis a pris le pouvoir à Kigali suite de la mort de deux présidents rwandais et burundais dans l’attentat de l’avion du 6 avril 1994. Le décès du président Habyarimana a provoqué l’’exode massive des populations hutus vers le Zaïre-Congo du Marechal Mobutu. En réalité, il s’agissait d’une intervention masquée et d’un coup d’Etat contre le président Mobutu comme le démontre l’écrivain franco-camerounais Charles Onana. « Cet exode massif des populations rwandaises vers le Congo-Zaïre procède simplement d’une stratégie masquée d’invasion du Zaïre et du projet de coup d’Etat contre le président Mobutu par les troupes de Paul Kagamé aidées par les Etats – Unis. Pour être précis encore, la façon de conduire les opérations militaires au Rwanda et le quadrillage territorial par les troupes du FPR/APR montrent très clairement que l’exode des populations a été organisé aux fins d’une invasion du Zaïre et de l’éviction de son président », Souligne Charles Onana en s’appuyant sur les cartes militaires de la CIA et de la direction du renseignement militaire français (DRM). Onana conclut sur ce point que « la prise du pouvoir des rebelles tutsis au Rwanda et l’invasion du Zaïre étaient intimement liées.» (Charles Onana, Holocauste au Congo, Le silence de la communauté internationale, L’Artilleur, Paris, 2024).
Aux projets du Rwanda et de l’Administration Bill Clinton s’ajoute celui du président Youweri Museveni de l’Ouganda héritier des idées de l’ancien président Tanzanien Julius Nyerere concepteur de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Est. Pour le président ougandais Yoweri Museveni, Mwalimu Nyerere avait annoncé son intention de créer un seul pays après les Indépendances de l’Ouganda, du Kenya et de Tanganyika. Reprenant le rêve de Nyerere, Museveni ambitionne de placer sous une autorité les Banyambo, les Bahaya, les Banyankole, les Bajinja, les Bakerewe, les Banyarwanda, les Banyamulenge (Congolais), les Baganda, etc. (Mark J. Mwandosya (editors and contributors) 38 Reflections on Mwalimu Nyerere, Dar es Salam, Tanzania, 2022).
De tout état de cause, les projets des réfugiés rwandais de prendre le pouvoir à Kigali, du président Museveni de créer un Etat fédéral de l’Est et de l’administration américaine ont profité à l’ancien président Bill Clinton à travers la Fondation Clinton et la Clinton Global Initiative (CGI) comme le démontre l’écrivain américain Peter Schweizer dans son ouvrage « Clinton Cash ». Grace à ses relations avec les milieux financiers et miniers, quelques mois après l’annonce présidentielle d’Hillary Clinton, le 6 juillet 2007, la Fondation Clinton a annoncé qu’un investisseur minier suédois solitaire, Lukas Lundin, s’engageait à verser 100 millions de dollars par l’intermédiaire d’une association caritative appelée Lundin for Africa. Au moment où Lukas Lundin s’est engagé à verser 100 millions de dollars à la Fondation Clinton, l’opération congolaise réalisait des « profits faramineux ».
En 2009, une commission gouvernementale de la RDC a affirmé qu’une société canadienne, First Quantum Minerals Ltd., avait remporté une concession lucrative pour un Lonshi (d’une valeur d’un milliard de dollars canadiens) par des méthodes douteuses. Selon la commission, First Quantum avait remporté la concession de Lonshi sans appel d’offres. L’entreprise aurait offert des paiements en espèces et des actions à certains responsables gouvernementaux pour l’obtenir. Les autorités congolaises voulaient annuler le contrat et suspendre la licence de l’entreprise. Hillary est intervenue et a tenté de faire pression sur le gouvernement congolais pour qu’il rétablisse la licence de l’entreprise. En janvier 2012, First Quantum a reçu 1,25 milliard de dollars pour ses actifs congolais. First Quantum a été fondée par le Canadien Jean Raymond Boulle, ami et bienfaiteur de longue date de Clinton. (Peter Schwelzer, Clinton Cash, HarperCollins, New York 2015.)
Trump déboulonne les réseaux maffieux des globalistes dans le grands lacs
Après la signature de l’accord de Paix au Département de l’Etat par les ministres des affaires de la RDC et du Rwanda sous la supervision de Secrétaire d’Etat américain Marco Rubio, deux invitations signées par D. Trump en direct à la Maison blanche sont adressées aux présidents Félix Tshisekedi de la RDC et Paul Kagame du Rwanda pour venir signer à Washington trois accords séparés : entre la RDC et les USA, la RDC et le Rwanda et les Usa et le Rwanda. Ce qui signifie que le dossier congolais est sous contrôle des Etats-Unis pour la première fois dans l’histoire des relations américano-congolaises. Cela signifie la fin de la mainmise de la maffia internationale sur la Région des Grands-Lacs durant 30 ans. Certains points méritent d’être soulevés.
Premier point. Le président D. Trump a remis la tragédie congolaise de 30 à l’agenda internationale que toutes les administrations américaines avaient négligé. « J’ai couvert l’administration du président Biden, j’ai insisté à plusieurs reprises sur ce conflit, des gens meurent au Congo. Ils ne m’ont jamais donné de réponse », s’exclame Ariana, journaliste angolaise accréditée à la maison blanche devant le Président D. Trump. Le président américain soutien les dires de la journaliste. « D’autres présidents auraient dû faire ce que je fais maintenant, ils n’ont jamais fait. Je pense qu’ils n’ont jamais essayé. Je ne pense pas qu’ils n’auraient pu le faire. Je ne pense pas qu’ils avaient essayé et s’ils avaient fait, ils n’auraient pas réussi. »
Deuxième point. La RDC reprend son leadership de l’Afrique centrale usurpé durant 30 ans par l’Ouganda de Museveni et le Rwanda de Paul Kagame d’une part et d’autre part par le leadership de l’Afrique de l’Est confié au Kenya et celui de l’Afrique centrale de l’Angola par l’Administration Joe Biden. Bref, la RDC est de retour sur la scène mondiale sous la protection de l’Amérique de Trump qui met fin à la tutelle des multinationales depuis 1885 à la Conférence de Berlin de 1885. Maintenant, c’est aux congolais d’assumer leur leadership en développant la volonté de puissance et les ambitions de grandeur.
Troisième point. Le président américain a affiché sa volonté politique de mettre fin au pillage des richesses, à l’holocauste et à l’occupation de la partie est du Congo. Ses menaces à l’endroit de non-respect de l’accord résument tout. « Nous travaillerons avec eux pour qu’il soit appliqué. Ils peuvent respecter leurs propres accords mais nous exercerons une pression pour nous assurer qu’il soit respecté. Elles savent que cela doit se faire sinon des mauvaises choses arriveront. Je dirais simplement qu’il y aura des lourdes sanctions en cas de violations et je ne passe pas qu’ils le feront. Je pense qu’ils sont sincères mais nous pensons que nous avons de sanctions financières très sévères et autres. »
Quatrième point. Derrière ces accords entre les Etats-Unis d’Amérique, la RDC et le Rwanda, il se joue une compétition technologique et économique rude entre la Chine et les Etats-Unis pour le leadership mondial. Pour certains analystes, la guerre de 30 ans au Congo a profité à des acteurs étrangers comme la Chine, qui peuvent exploiter les richesses congolaises en toute impunité. La Chine contrôle déjà de vastes étendues du territoire congolais, notamment dans les régions riches en minéraux où les dirigeants du pays ont une autorité limitée. Là, les exploitants miniers chinois exploitent des ressources à l’échelle industrielle, échappant ainsi à tout contrôle international. Pékin, pour sa part, étend son emprise par le biais de contrats miniers opaques et de partenariats militaires, garantissant ainsi que les minéraux essentiels aux industries de défense et de technologie américaines restent hors de portée de Washington. (La paix instable entre le Rwanda et le Congo, Foreign Policy du 7 juillet 2025).
Cette analyse de Foreign policy est corroborée par celle d’Andrew Korybko journaliste américain d’origine russe. Pour lui, la RDC et le Rwanda autoriseraient probablement les États-Unis à remplacer les entreprises chinoises dans ce commerce, même au détriment éventuel de leurs liens avec la République populaire. Si cela se concrétise, le dernier quart de siècle d’instabilité régionale pourrait enfin prendre fin au bénéfice des habitants de l’est de la RDC. Cependant, la saisie légale par les États-Unis des exploitations minières illégales chinoises pourrait pousser la RDC à remplacer les exploitations légales chinoises dans le sud-est, même si cela implique des démarches juridiquement douteuses. Dans ce cas, les États-Unis gagneraient un avantage stratégique dans la course technologique mondiale grâce à leur contrôle sur ces minéraux essentiels, qu’ils pourraient utiliser comme arme contre la Chine et aggraver les tensions entre grandes puissances. (L’accord de paix congolais-rwandais, négocié par les États-Unis, tiendra-t-il ? Andrew Korybko, 6 juil. 2025).
Observations d’ordre général
La déclaration de la ministre des Affaires de la RDC, il y avait des inquiétudes. Elle exhorte le président D. Trump de « rester engager, rester à bord, nous avons besoins des Etats-Unis pour s’assurer que cet accord tienne et que vous teniez responsables.». Qu’est-ce qui peut expliquer la crainte de la ministre à propos de l’application de l’accord par le Rwanda ? Trois observations sont avancées.
D’abord, il est illusoire de croire que cet accord de paix signé à Washington mettra fin à 30 ans d’occupation des territoires congolais riches en minerais par les rwandais et les ougandais. L’histoire des rebellions en Rdc est riche d’enseignements. En 1961, la sécession de la riche province du Katanga fut mise grâce à l’intervention des troupes de l’ONUC (Opération des Nations Unies au Congo) et l’armée congolaise. En 2013, Après l’occupation de Goma par l’armée rwandaise avec les rebelles de M23, la brigade d’intervention de la Monusco composée des soldats Tanzaniens et congolais les ont chassé jusqu’à la frontière avec le Rwanda et l’Ouganda les pays dans lesquels ils ont trouvé refuge. (Julien Paluku, Le Nord-Kivu entre démocratie et guerres, MediasPaul, Kinshasa, 2016.) L’histoire se répète cette fois-ci les troupes rwandaises occupent Goma, Bukavu depuis six mois et 3 ans le territoire frontalier de Bunagana. Seule la politique de la paix par la force peut régler la question congolaise. (Le retour de la paix par la force, présentation de la politique étrangère de Trump, Foreign Affairs 18 juin 2024).
D’ailleurs, Paul Kagame ne sera jamais prêt à abandonner les provinces du Kivu. « En raison de nos tailles relatives, relève Patrick Karegeya (ancien patron des renseignements rwandais, nous ne quitterons jamais la RDC, par exemple, tant qu’il n’y aura pas à Kinshasa un gouvernement auquel nous pouvons faire. Plus jamais nous n’autoriserons une guerre sur le territoire rwandais. Nous n’avons tout simplement pas la profondeur géographique stratégique. (Michela Wrong Do Not Disturb, The story of a political Murder and an African regime Gone Bad, London, 2022,)
Ensuite, le président Trump (souverainiste) fait face à la résistance des globalistes mondialistes qui ont financé la guerre de l’AFDL pour occuper et piller la RDC depuis 1994. En plus, la Chine et l’Union Européenne qui ont beaucoup d’intérêts au Rwanda ne veulent pas les perdre. Pour La fin de la guerre signifie la perte de leurs intérêts. Que faire ? Pousser Paul Kagame à résister aux menaces du Président D. Trump en faisant des manœuvres dilatoires pour perdre du temps jusqu’à la fin de son deuxième mandat laissant ainsi la crise congolaise insoluble. (Le multilatéralisme peut survivre à Trump, Foreign Affairs du 24 décembre 2024)
Enfin, le doute de Vagner Kayikwamba, ministre des affaires de la RDC sur le respect de l’accord à la Maison Blanche suscite une autre inquiétude : l’absence dans l’accord de sanction contre le Rwanda pour le génocide de plus de 10 millions, l’occupation de territoire et pillage des richesses congolaises durant 30 ans.
Vu l’omerta actuel sur la tragédie congolaise, c’est aux congolais de demander la justice et non les américains. Sinon l’histoire risque de se répéter. En effet, entre 1885 et 1906, le génocide de 10 millions de congolais perpétré par Léopold II, Roi des Belges fut jeté dans les oubliettes de l’histoire et l’Etat Indépendant du Congo annexé à la Belgique au lieu et à la place d’un procès contre ses crimes (Adam Hochschild, Les fantômes du Roi Léopold, Un holocauste oublié, Belfond, 1998)
Freddy Mulumba Kabuayi
Politologue.
Leçons de l’histoire : négociations de Doha en 2025 (Qatar) sur les traces de celles de Kampala en 2013
Dans les négociations entre le gouvernement congolais et les rebelles de l’AFC/M23 soutenus par le Rwanda, sont bloquées par la volonté du Rwanda de contrôler les provinces du Nord-Kivu et Sud-Kivu. A Doha, les rebelles demandent la gestion de deux provinces pour une durée de 8 ans. Cela signifie le détachement des deux Kivu pour les annexer au Rwanda.
Ce n’est pas la première fois que le Rwanda sous couvert des rebelles demande la gestion des provinces du Kivu avec le soutien des globalistes et certaines puissances occidentales. Selon le journal Le potentiel, en 2013 à Kampala, les rebelles de M23 avaient proposé au gouvernement congolais un projet de gestion de toute la partie de l’Est de la RDC. L’article 5 de ce projet d’accord disposait que « Du fait des guerres récurrentes ayant entrainé la destruction des infrastructures, du tissu socio-économique, la fracture de la cohésion sociale et l’absence de toute perspective de développement suite au déficit d’une paix durable et de la sécurité durant les dernières décennies dans l’Est de la RDC le gouvernement s’engage à décréter la partie Est de la RDC (Nord-Kivu, Sud-Kivu, Ituri, Haut-Uélé, Maniema et Tanganyika) comme une zone sinistrée. A ce titre la zone déclarée sinistrée devra jouir de 1. Un statut administratif particulier ; 2. D’un plan de développement spécial ; 3. D’une large autonomie fiscale et financière ; 4. D’un concept opérationnel particulier pour sa sécurisation ; 5. D’un programme spécifique de sécurisation pour la concrétisation de différents Accords régionaux.
Dans l’article 23 du projet de rebelles du M23 en 2013, les intentions affichées sont claires. « Dès lors que la partie Est de la RDC sera sécurisée, débarrassée de toutes les forces négatives étrangères et de tous les groupes armés nationaux et que, les déplacés internes et le réfugiés seront retournés, réinstallés et réinsérés dans leurs lieux d’origine, le M23 s’engage à déposer définitivement les armes ; – Démobiliser les membres de l’ARC qui ne souhaiteront les revendications de la population congolaise.»
Cette aventure de rebelles du M23 soutenue par l’Ouganda et du Rwanda va terminer par deux documents signés séparément par le Gouvernement congolais et le mouvement rebelles M23. La déclaration du Gouvernement de la RDC à la fin des pourparlers de Kampala faite à Nairobi, le 12 décembre 2013 et la déclaration sur les engagements du mouvements du 23 mars au terme du dialogue de Kampala faite à Nairobi, Kenya le 12 décembre 2013.
Malgré ces deux déclarations de Nairobi, les rebelles de M23 étaient chassés de territoires de congolais et se sont réfugiés en Ouganda et au Rwanda pour réapparaitre en 2019 quand Félix Tshisekedi a été élu président de la République Démocratique du Congo.
Ce sont les mêmes manœuvres dilatoires que le Rwanda et l’Ouganda utilisent pour s’installer durablement dans les provinces de l’Est du pays afin de mettre la base d’une nouvelle entité politique à attacher au future Etat fédéral de l’Afrique de l’Est. (Nicaise Kibel Bel Oka, les rebellions rwandaises au Kivu (1996-2024), une stratégie de la balkanisation du Congo, Bruxelles, Scribe, 2024.)
Freddy M.K.