Sur le papier, mais sur le papier seulement, devrait-on insister, les arrêts de la Cour constitutionnelle sont sans appel. La Haute Cour connaît des contentieux électoraux, par exemple, en dernier ressort. Ses arrêts sont opposables à tous et ne sont susceptibles d’aucun appel. Ceci, sur le papier.
Quatre mois après la tenue des élections générales, et la publication de la liste provisoire des députés élus transmise à la Cour constitutionnelle, ça tangue dans tous les sens. Etape n°1 : la Cour invalide plus de 80 députés déclarés élus. L’anathème jeté sur eux les couvre d’opprobre. Ils sont chargés notamment de violences sur agents électoraux, détention illégale de machines à voter et d’actes de vandalisme sur les installations de la CENI. Des accusations d’une gravité telle que certains en appelaient déjà à des poursuites judiciaires contre des personnalités dont certaines étaient et sont encore des intouchables du régime.
Etape n°2 : les «invalidés » introduisent vaille que vaille des dossiers établissant, selon eux, des «erreurs matérielles » dans le décompte des voix. Une petite minorité parmi les plus chanceux et pourvus de patronymes qui portent voient leurs dossiers déclarés recevables et fondés.
Quant aux autres, ils peuvent s’orienter vers les sénatoriales à venir. Pendant que les gouverneurs de province débarqués, désormais lavés de tout soupçon, ont toute la latitude de briguer un nouveau mandat, avec l’engagement bien ancré de «consolider les acquis» du premier mandat du chef de l’Etat.
Etape n°3 : après la grosse frayeur, les députés repêhés retrouvent leurs sièges laissés tout chauds par leurs désormais ex-collègues qui, à leur tour, sont fondés à évoquer la jurisprudence des «erreurs matérielles» !
Dans cet imbroglio à n’en plus finir, voilà que le procureur de la Cour de cassation met au défi (sans trop y croire apparemment) la centrale électorale de produire les preuves des infractions commises par les uns et les autres lors de la longue semaine des scrutins de décembre 2019. Ce à quoi la CENI ne peut donner suite. Et pour cause : les preuves matérielles des délits évoqués n’existent tout simplement pas !
Du point de vue des non-initiés aux arcanes de l’administration de la justice congolaise, l’instauration, ou l’introduction de la notion d’erreurs matérielles venue corser les procédures apparaît comme un écran de fumée destiné à masquer des avantages revenant aux inamovibles des régimes politiques successifs.
Mwin M.