Elections 2023 : la Majorité exclut un glissement, l’Opposition prédit un «chaos électoral»

A six mois des élections du 20 décembre 2023, la période pré-électorale s’annonce déjà très agitée. Pendant ce temps, à l’Assemblée nationale, les députés nationaux ont entamé, dans un désordre indescriptible, l’examen du projet de répartition des sièges aux prochaines législatives nationales et provinciales ainsi qu’aux élections locales.
Premier couac : le boycott de l’opposition parlementaire, essentiellement incarnée par le FCC (Front commun pour le Congo) de Joseph Kabila, qui a préféré se mettre à l’écart d’un débat qu’il trouve trop entaché d’irrégularités. Dans la déclaration, lue lundi par François Nzekuye, l’un des ténors du FCC à l’Assemblée nationale, les élus nationaux, restés fidèles à Joseph Kabila, fustigent «un processus électoral qui présage des élections chaotiques et frauduleuses dans le pays» et disent tenir le pouvoir en place pour «seul responsable» de toutes les conséquences qui en résultent.
Le ton est tout aussi similaire dans le Bloc de l’Opposition formé par Moïse Katumbi, Augustin Matata Ponyo, Martin Fayulu et Delly Sesanga, qui se dit tout aussi prêt à activer l’article 64 de la Constitution qui «impose à tout Congolais le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation de la Constitution».
Le Nouvel Elan d’Adolphe Muzito s’est aussi signalé dans ces discussions. Si Muzito a préféré évoluer en solo, loin de quatre leaders du Bloc patriotique, il remet cependant en cause le chiffre des enrôlés au processus électoral et exprime des réserves sur le projet de répartition des sièges, en discussion à l’Assemblée nationale.
Compté parmi les artisans de l’alternance démocratique de janvier 2019, le CLC (Comité laïc de coordination) s’est aussi invité dans le débat, dénonçant dans un communiqué, «les violations flagrantes des principes démocratiques en RDC ». Aussi, demande-t-il, « au peuple congolais de ne pas céder au découragement ni à la fatalité. L’heure de bannir la peur et de se prendre en charge est arrivée ».
Si l’Opposition, toutes tendances confondues, prédit déjà un « chaos électoral», dans la Majorité au pouvoir, on n’est pas de cet avis. Patrick Muyaya, porte-parole du Gouvernement, voit dans cette attitude de l’Opposition une manière subtile de préparer le lit au glissement électoral, ouvrant la voie à un éventuel dialogue politique.
«Répondre aux revendications de l’Opposition aujourd’hui, c’est consacrer le glissement», a dit le porte-parole du Gouvernement, intervenant dimanche sur les ondes de RFI. Et d’ajouter : « Ils (Ndlr : leaders de l’Opposition) ne sont pas prêts pour les élections (…) On veut jeter le discrédit sur un processus peut-être parce qu’on sait déjà que, dès le départ, on est perdant […] ».
Voici en encadré, la série de déclarations de l’Opposition et du CLC.
Econews
Déclaration des députés du FCC en rapport avec l’examen de la loi sur la répartition des sièges
Nous, députés nationaux, membres du Front Commun pour le Congo (FCC en sigle), réunis ce jour, avons examiné la situation générale du pays et particulièrement l’évolution du processus électoral.

  1. SITUATION GENERALE DU PAYS
    S’agissant de la situation générale du pays, l’opinion nationale et internationale retiendra que, celle-ci est caractérisée notamment par :

  • l’incapacité notoire du pouvoir en place de présenter l’intégrité du territoire national et d’assurer la sécurité des personnes et de leurs biens tant dans la partie Est (Ituri, Nord-Kivu et Sud-Kivu, Nord Katanga, à Kabambare dans le Maniema, Ango dans le Bas-Uelé…), que dans la partie Ouest (Territoire de Kwamouth dans le Mai-ndombe, Batshongo dans le Kwango, Bagata dans le Kwilu, Madimba dans le Kongo Central…). Et, plus grave, à Kinshasa Capitale et siège des institutions de la République;
  • l’abandon d’une bonne partie de la République entre les mains des forces étrangères, conséquence d’une diplomatie irréfléchie;
  • violations flagrantes, manifestes et récurrentes des droits fondamentaux reconnus à tout être humain, à la presse, à l’opposition et la société civile; droits consacrés par la Constitution et les instruments juridiques internationaux dument ratifiés par la République Démocratique du Congo, notre pays;
  • appareil judiciaire à la solde du régime Tshisekedi, insé-curisant les justiciables. C’est ici l’occasion d’interpeller la communauté internationale d’être impartiale en sanctionnant les commanditaires et les exécutants de ces violations;
  • la dégradation de la situation sociale et économique du pays caractérisée par la chute vertigineuse du franc congolais face à une flambée des prix entrainant une perte du pouvoir d’achat comparable au pire moment de l’histoire de notre pays ;
  • la gestion chaotique du pays caractérisée notamment par le tribalisme, le détournement ostentatoire de deniers public, la corruption, la concussion, l’enrichissement illicite, insolant et honteux;

  1. PROCESSUS ELECTORAL
    Quanta l’évolution du processus électoral, nous réaffirmons notre position maintes fois exprimée de participer aux élections dans le délai constitutionnel, à condition d’avoir :

  • une CENI consensuelle, comportant en son sein des délégués dument désignés par leurs composantes;
    ?une cour constitutionnelle non inféodée dont les membres sont désignés conformément a la constitution et aux lois a la matière;
  • une loi électorale inclusive garantissant la transparence et l’égalité des chances à tous les compétiteurs.
    Il est constaté malheureusement qu’à ce jour, rien de tout cela n’est fait, et que Monsieur Tshisekedi s’entête à organiser avec sa CENI monocolore.
    En plus, l’enrôlement des électeurs, qui aboutit à un projet de loi sur la répartition des sièges que l’assemblée nationale examine ce jour, s’est déroulé dans un contexte de fraude, d’amateurisme, et d’absence criante d’un audit externe crédible le rendant non fiable décrié par tous;
    En effet, la cartographie électorale, la distribution des kits d’enr6lement, se sont réalisés sans tenir compte de la démographie et de la superficie des circonscriptions électorales de sorte que les circonscriptions sous peuplées se sont vu augmenter de kits et par conséquent, du nombre des sièges;
    Des mineurs ont été illégalement enrôlés et plusieurs personnes disposent à ce jour de plusieurs caries d’électeurs;
    Des matériels d’enrôlement ont été retrouvés plusieurs fois entre les mains des particuliers.
    Les cartes d’électeurs s’effacent au bout d’un temps et deviennent inutilisables, comment reco-nnaitrons-t-ils les électeurs le jour du scrutin ?
    Tout ceci démontre le caractère peu fiable du processus électoral qui présage des élections chaotiques et frauduleuses dans le pays.
    Fort de ce constat, plusieurs acteurs politiques et de la société civile ont rejoint notre position.
    En tout état de cause, nous tenons le pouvoir en place pour responsable de toutes les conséquences qui résultent de ces élections frauduleuses et chaotiques qu’ils tentent d’organiser.
    Par conséquent, les députes, membres du Front commun pour le Congo (FCC en sigle) décident de ne pas accompagner la dictature de Monsieur Tshisekedi, ni le hold up électoral qu’il a déjà planifié, et ne vont donc pas participer à l’examen et au vote d’un projet de loi déjà biaisée et corrompu aux conséquences dramatiques et incalculables sur l’avenir de notre démocratie et de la République.
    Fait à Kinshasa, le 29 mai 2023
    Les signataires

Communique de presse du Bloc de l’Opposition

Nous, signataires du présent communiqué, candidats à élection présidentielle prochaine, continuons d’exiger des élections crédibles, c’est-à-dire transparentes, impartiales, inclusives et apaisées, conformément à la Constitution de la République.
Rappelons que depuis plusieurs années, nous n’avons eu de cesse d’alerter l’opinion nationale et internationale que le processus électoral 2023 est mal engage. Ce processus évolue dans le cadre d’un chaos programme. Toutes les institutions ayant trait à l’organisation des élections et à la proclamation des résultats, la Commission Électorale nationale indépendante (CENI) et la Cour Constitutionnelle sont politisées et gérées par les membres d’une même famille politique.
Aujourd’hui, à l’instar de la loi organique portant organisation et fonctionnement de la CENI, la loi électorale, la nomination des juges de la Cour constitutionnelle, la désignation des animateurs des organes de la CENI, le passage en force s‘accentue avec la programmation a l’Assemblée nationale de l’examen et l’adoption du projet de loi sur la répartition des sièges en vue de matérialiser la fraude électorale à grande échelle que nous n’avons cessé de décrier.
D’aucuns pensaient que la CENI, avec toutes les contestations qui ont émaillé sa constitution, pouvait surprendre positivement les congolais en cherchant à organiser les élections en toute impartialité, conformément à l’article 211 de la Constitution. Mais, la première étape des opérations de la CENI; l’opération d’identification et d’enrôlement des électeurs à laquelle nous avons participé, s’est déroulée dans l’opacité la plus totale.
C’est une preuve supplémentaire de la planification et l’exécution de la fraude. L’obstination du régime Tshisekedi de présenter la loi sur la répartition des sièges sur la base de ce fichier corrompu sans audit par un tiers de confiance est une escalade dans la voie de la mise en œuvre du plan de fraude. Cette entreprise funeste vide le pacte républicain de Sun-City de toute sa substance.
Pour rappel, en réaffirmant notre engagement au processus électoral et pour sauver ce qui pouvait l’être encore, nous avions exigé que la CENI fasse la lumière sur l’opération d’identification et d’enr6lement des électeurs qu’elle a menée, en se soumettant au principe préalable de |’audit externe et indépendant du fichier électoral, par un cabinet international crédible et réputé en la matière. Nous n’avons pas été entendus! La seule réponse que nous avons reçue, c’est la détermination de |’Union sacrée à opérer un passage en force par la CENI qui a envoyé ses statistiques fabriques au gouvernement, en vue de la préparation du projet de loi sur la répartition des sièges, transmis en urgence, comme dans un jeu de cache-cache à l’Assemblée nationale qui l’a aussitôt alignée pour expédition.
La CENI a ainsi démontre a la face du monde qu’elle n’a qu’une seule mission, à savoir : organiser la fraude électorale en faveur M. Félix Tshisekedi et lui donner, tout aussi frauduleusement une majorité parlementaire en décembre 2023.
Les revendications du peuple congolais que nous portons sont construites sur les exigences constitutionnelles de bonnes élections pour la paix et la cohésion nationale, à savoir, des élections démocratiques, libres, crédibles, transparentes, impartiales, inclusives et apaisées. Conscient de notre histoire politique et soucieux de l’avenir de ce pays, nous nous opposons vigoureusement a une parodie d’élections, qui laisse au demeurant nos concitoyens de Rutshuru, Masisi et Nyirangongo en dehors comme pour consacrer la balkanisation.
C’est pourquoi les correctifs ci-après sont nécessaires pour adapter le processus aux exigences constitutionnelles et légales de transparence, d’impartialité, de liberté et d’inclusivité :
1) Procéder a la confection d’un fichier électoral fiable audite par un cabinet international dont l‘expertise en la matière et l’indépendance sont avérées. Ce cabinet doit être recruté au terme d‘une procédure claire, régulière et sans aucun privilège et conflit d’intérêt;
2) Restructurer la CENI, en respectant le droit des parties prenantes a designer librement leurs représentants;
3) Recomposer la Cour constitutionnelle dans le respect de la loi, en lui assurant toute son indépendance.

  1. Avec la volonté politique d’éviter le chaos au pays, ces correctifs peuvent être apportés auprocessus électoral sans aucun incident sur le calendrier des élections. Sans ces correctifs, il est difficile d’avoir des élections crédibles.
    Le peuple congolais n’acceptera aucun résultatfabriqué par la CENI pour le substituer aux observations et aux résultats issus des urnes à la fin des élections de décembre 2023. Il prendra entièrement ses responsabilités face à l’histoire.
  2. C’est pourquoi, de ce qui précède :
    1) Rappelons que l’article 64 de la Constitution impose a tout congolais le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation de la Constitution;
    2) Continuerons sans cesse à sensibiliser les congolais et congolaises et a les mobiliser dans la lutte contre la fraude électorale, en multipliant des actions sur l’ensemble du territoire national pour faire barrage à la volonté de M. Kadima d’instrumentaliser la CENI pour donner un nouveau mandat usurpé sur base d’un fichier électoral corrompu et d’un processus restreignant l’espace politique d’expression;
    3) Exhortons nos pères spirituels, en tant que leaders de la conscience nationale, a ne pas accompagner la CENI dans le triste sort qu’e||e veut imposer au peuple congolais;
    4) Encourageons la Société civile et toutes les forces vives à s’engager résolument dans l’effort pour l’avènement d’un Congo à la hauteur de sa promesse démocratique dans l’idéal de l’état de droit, de la justice et de la dignité pour le peuple congolais.
    5) demandons à la communauté internationale de soutenir le peuple congolais dans sa lutte de la marche irréversible vers la démocratie et l’Etat de droit en RD Congo.
    Fait à Kinshasa, le 29 mai 2023
    Les signataires
    FAYULU MADIDI Martin
    KATUMBI CHAPWE MOISE
    MATATA PONYO Mapon
    SESANGA HIPUNGU Delly
Observations du Nouvel Elan sur le projet de la loi relatif à la répartition des sièges
Nous avons l’honneur de vous présenter comme ci-après nos observations concernant le projet de la loi relatif à la répartition des sièges, bientôt sous discussions au Parlement.
Il est à noter qu’à travers ce projet, la CENI a levé les options ci-après :
– Elle a retenu, pour les prochaines élections, 43.941.891 électeurs;
– Elle a préconisé d’organiser les élections sur toute l’étendue du territoire national en dépit du fait que l’identification et l’enrôlement des électeurs n’ont pas eu lieu dans les territoires de Rutshuru, Masisi et Kwamouth (16 sièges en manque, soit 1.220.314 d’électeurs ou 2,7% du scrutin présidentiel en moins);
– Pouvoir tous les 500 sièges de députés nationaux.
Cependant, dans les provinces du Nord-Kivu et du Mai-ndombe, la CENI a décidé d’une chose et de son contraire.
Premièrement, elle a imputé à ces deux provinces respectivement 47 sièges pour le Nord-Kivu et 12 sièges pour le Mai-ndomba, sans leur allouer le nombre d’électeurs correspondants, dans le total d’électeurs enrôlés ou à enrôler sur l’étendue du territoire, l’enrôlement n’ayant pas eu lieu dans ces 3 territoires.
Ainsi par exemple, le Nord-Kivu a eu 3.026.907 ai lieu de 4.246.969 électeurs.
Deuxièmement, il découle de cette situation trois hypothèses possibles qui représentent pour la CENI et pour le pays, une quadrature de cercle :

1ère Hypothèse
Bien que le nombre d’électeurs est de 43.941.891 pour l’ensemble du territoire national, ne comprenant pas ceux de 3 territoires, si la CENI dans son calcul maintient l’hypothèse de 500 sièges pour l’Assemblée nationale, le quotient électoral serait minoré à 87.879. Pour nous, ce quotient serait faux parce qu’il découlerait d’un total d’électeurs de 43.941.891 qui éludait les électeurs de Rutshuru, Masisi et Kwamouth représentant un total de 1.220.314 enrôlés. Ce quotient induirait une répartition erronée des sièges. Car pour le Nord-Kivu, avec 47 sièges, le nombre des électeurs retenus devrait être non 3.026.907 mais plutôt 4.245.969.

2ème Hypothèse
Considérant le nombre d’électeurs de 43.941.891, si la CENI calculait le quotient du siège sur 484 sièges, excluant les territoires de Rutshuru, Masisi et Kwamouth qui n’ont pas connu d’enrôlement, le quotient de 90.415,41 électeurs qui va se dégager, serait aussi erroné parce qu’il découlerait d’une division du nombre d’électeurs de 43.941.891 par un nombre des sièges (484) qui aura éludé les 16 sièges de Rutshuru, Masisi et Kwamouth, alors que ces sièges sont programmés aux élections du 20 décembre 2023.

3ème Hypothèse
Ici, tous les sièges (500) dont ceux de 3 territoires (16 sièges) sont programmés ainsi que leurs électeurs respectifs. Ainsi, sur un total de 45.162.205 d’électeurs, le quotient d’électeurs serait de 90.324 (45.162.205 électeurs divisés par 500 sièges). Ainsi la répartition des sièges serait rationnelle, bien que théorique.
Conclusion : le fichier de 43.941.891 électeurs est faux parce qu’il ne comprend pas les électeurs de 3 territoires. Celui de 45.162.205 aurait été rationnel, s’il n’était pas fictif du fait que le total additionnel de 1.220.314 d’enrôlés qui en fait partie n’est que théorique, l’enrôlement dans ces 3 territoires n’ayant jamais eu lieu. D’où la quadrature de cercle.
Honorable Président, dans les cas où nos observations seraient pertinentes et exactes, nous vous demandons d’en tirer les conséquences et de ne pas recevoir le projet de loi en cause.
Veillez agréer, Honorable président, l’expression de nos sentiments patriotiques.
Pour la coordination
Paulin MBOMA BOKO
Président national du Nouvel Elan