Élections 2023 : Un «hold-up électoral» à découvert s’organise

Congolese policemen drive past Congo's Independent National Electoral Commission (CENI) headquarters in Kinshasa, Democratic Republic of Congo, January 9, 2019. REUTERS/Baz Ratner

Il y a eu récemment « Congo hold-up », selon les conclusions d’une enquête menée concomitamment par des ONG et médias occidentaux. Mais, en 2023, il faudra se préparer déjà à un « hold-up électoral ». A deux ans des élections de 2023, le décor d’un tripatouillage du jeu électoral est déjà planté. Tout part du désordre qui a entouré la nomination de nouveaux animateurs de la Céni. Et la nomination du tout nouveau secrétaire exécutif de la Céni, autrement dit le chef de la logistique électorale, est venue confirmer tous les soupçons antérieurs d’une Céni (Commission électorale nationale indépendante) monocolore. En réalité, deux proches du parti au pouvoir, l’UDPS, seront aux commandes de prochains scrutins, avec d’un côté Denis Kadima, dans le rôle politique de président de la Céni, et de l’autre, Thotho Totokani Mabiku au secrétariat exécutif national. Si on doit intégrer, dans ce schéma, une Cour constitutionnelle taillée à l’image du pouvoir, autant dire qu’en 2023, le jeu électoral est déjà bouclé.

La nomination d’un membre actif de l’UDPS, le parti au pouvoir, au poste de secrétaire exécutif national de la Céni (Commission électorale nationale indépendante), ne fait que renforcer le discrédit qui pèse sur cette institution d’appui à la démocratie.

«Il existe d’autres Congolais qui pouvaient bien occuper ce poste sans trop de casse », a protesté sur Twitter le sémillant Jean-Claude Katende de l’Association africaine des droits de l’homme (Asadho). Son objectivité n’a jamais été contestée par des observateurs neutres.

Le doute n’est plus permis. Tout indique que le Président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, n’y va pas de main morte. Il fait tout pour rempiler. Cette victoire à la présidentielle de 2023 est devenue une question de vie ou de mort. Si bien que le camp Tshisekedi a verrouillé le processus en amont et en aval.

Ce constat fait par un opposant, semble se passer de tout commentaire. Il y a eu Denis Kadima, président investi de la Commission électorale nationale indépendante que les églises Catholique et Protestante ont considéré comme proche du Chef de l’État. Malgré ces accusations fondées ou infondées – c’est selon – le Président Tshisekedi a persisté et signé : Kadima ou rien ! Il n’a pas tenu compte des avis négatifs de ces principales confessions religieuses du pays.

Allant jusqu’au bout de sa logique, c’est à travers une adresse solennelle à la nation qu’il a justifié son choix. Officiellement, c’était six confessions religieuses qui avaient choisi Denis Kadima. Mais, politiquement, c’était le choix du Président Tshisekedi. C’est une évidence.

Comme si cela ne suffisait pas, au niveau du choix du secrétaire exécutif national de la Céni, l’opinion croyait que la stratégie politique d’impliquer les églises allait marcher. Que non !

Une fois de plus, le Président Tshisekedi n’a pas fait les choses à moitié. En se mettant subtilement à l’écart du processus de désignation du remplaçant de Ronsard Malonda, la Présidence de la République a néanmoins joué un rôle crucial dans ce choix.

Sans surprise, c’est sur un ancien conseiller du Chef de l’Etat, à l’époque président de l’UDPS, et membre du collège Economie, finances et audit de son cabinet à la Présidence de la République, que le choix éclairé de l’assemblée plénière de la Céni est tombé.

Décidément, le camp Tshisekedi a décidé de ne plus reculer. Le processus électoral sera contrôlé totalement. Le technicien par qui passe la manipulation des résultats est déjà là en place. Il ne lui reste plus qu’à se mettre au travail.

Ingénieur polytechnicien disposant d’une expérience avérée en informatique, Thotho Totokani est celui par qui le parti au pouvoir pense s’offrir une victoire en 2023. Son CV, très limité sur des questions électorales, n’a donc pas joué sur la balance. Bizarre !

Pour rempiler, le Chef de l’Etat évolue désormais à découvert. Il ne se cache plus.

Défense maladroite

Dans le camp présidentiel, les défenseurs ont pris le relais pour défendre ce choix, en lieu et place de la Céni.

Pour ces détracteurs, M. Totokani est bel et bien un membre actif de l’UDPS. Sa nomination comme conseiller du président du parti, ses prestations dans les médias, … légitiment cette thèse. Sur ce point, il n’y a aucun doute possible. Il est de l’UDPS. En prenant sa défense, l’UDPS confirme, sans le dire, son parrainage.

Quel crédit sera accordé à des scrutins organisés par des membres d’un parti bien déterminé avec des accompagnateurs débauchés dans des formations politiques qui ne partagent pas la stratégie d’une manipulation éhontée des résultats issus des urnes?  C’est la grande inconnue des scrutins de 2023. Le grand problème se situe donc à ce niveau.

Le Président Tshisekedi a tout oublié, préoccupé par son deuxième mandat. La compétition électorale à venir ne sera pas saine. Des désistements seront enregistrés en cascade. Il est encore temps de rassurer tout le monde pour éviter un chaos généralisé. Le «hold-up électoral» qui se met en place ne profitera nullement à la stabilité du pays. Il n’est pas trop tard pour se ressaisir.

Econews