Les entreprises publiques sont malades. C’est un secret de polichinelle. Seules quelques-unes restent encore viables – par apparence. Mais, dans le fond, toutes sont en « faillite virtuelle». Malgré cette situation désastreuse, le partage des entreprises du portefeuille de l’Etat est toujours à l’ordre du jour au sein de l’Union sacrée de la nation. Pour le moment, les violons sont loin de s’accorder. Pour cause : il y a d’un côté Modeste Bahati Lukwebo, président du Sénat et autorité morale de l’AFDC-A, qui revendique une part correspondant à son poids politique, et de l’autre, il y a Moïse Katumbi, leader d’Ensemble pour la République, qui entretient encore un flou sur ses rapports avec l’Union sacrée. Ce qui explique le blocage. Au sein de l’Union sacrée, l’enlisement dans le partage du «butin de la guerre» commence à agacer. Pour le moment, le Chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi, joue à la retenue, préférant prendra tout son temps pour gérer, au mieux de ses intérêts, toutes les ambitions d’une Union sacrée fébrile, prête à imploser à tout moment.
Les nominations à la tête des entreprises publiques sont bloquées. Mais, le processus – du reste très avancé – est interrompu à cause du véto de Modeste Bahati Lukuebo, président du Sénat et autorité morale de l’AFDC-A (Alliance des forces démocratique du Congo et Alliés), qui a émis des réserves sur le quota attribué à sa formation politique. Une trentaine de postes mais majoritairement des administrateurs passifs. Pour le président du Sénat, il faut revoir la répartition.
A sa manière, le président de l’AFDC-A l’a fait comprendre au Chef de l’État qui s’était montré sensible à cette prise de position d’un poids lourd docile de la coalition au pouvoir.
Pour mettre toutes les chances de son côté, le stratège Bahati n’avait-il pas fait vite de plébisciter Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo comme le candidat de sa famille politique à la présidentielle de 2023?
Bahati a toujours reçu ce qu’il convoite à cause de sa grande capacité de négociation. Il sait s’effacer et rebondir au bon moment. Déterminé à améliorer sa liste d’élus, il joue serrer pour placer les siens à des postes de gestion dans les entreprises du portefeuille de l’Etat.
Les hésitations de Katumbi
De l’autre côté, le camp présidentiel prend son mal en patience. Du quota unilatéralement accordé à Ensemble pour la République de Moïse Katumbi, le président de la République et le gouvernement ne souhaitent pas connaître une cascade de démissions après les nominations. Il est question d’attendre que le chairman d’Ensemble pour la République se prononce clairement sur son appartenance ou non à l’Union sacrée de la nation.
Tant que l’ex-gouverneur de l’ex-Katanga ne se serait pas prononcé, le jeu de cache-cache va se poursuivre et les nominations dans les entreprises publiques devront tout aussi attendre, créant un profond malaise au sein d’une Union sacrée de la nation qui voudrait déjà placer ses pions à des postes stratégiques dans la perspective des élections de 2023.
De temps en temps, le Président de la République sortira des ordonnances de nomination pour des cas qui relèvent de l’urgence. Il l’a déjà fait pour les ambassadeurs. Mais, sur les nominations dans les entreprises du Portefeuille de l’Etat, Félix Tshisekedi se refuse à un quelconque forcing. Il se veut méthodique pour ne pas énerver les membres d’une Union sacrée de la nation dont les fondements restent encore fragiles. C’est tout le dilemme !
Condamnées à mort
Bien que malades et reconnues en situation de «faillite virtuelle », les entreprises du portefeuille de l’Etat seront néanmoins entre les grands gagnants de la rupture de la coalition FCC-CACH. Au sein de l’Union sacrée de la nation, tous sont hantés par le grand désir de préparer déjà les échéances électorales de 2023. Alors, placer ses pions dans les entreprises du Portefeuille de l’Etat les plus juteuses restent une priorité pour les ténors de l’USN.
Entre les impératifs politiques et les contraintes économiques, le Gouvernement semble avoir fait son choix. De ce point de vue, le partage des entreprises publiques semble être inévitable.
Qu’est-ce qui fera alors l’objet du partage ? Ce sont en réalité des canards boiteux que se répartissent les ténors de l’USN.
On se rappelle qu’en réunion du Conseil des ministres, le 3 septembre 2021, le Gouvernement avait peint un tableau sombre de ces entreprises publiques.
En effet, le Gouvernement est arrivé à la conclusion que les entreprises publiques sont dans un état déficitaire, soulignant que huit milliards de dollars américains seront nécessaires pour restructurer ou redresser ces entités.
Adèle Kayinda Mayina, ministre d’État chargée du Portefeuille, a mis sur la table le rapport établi à l’issue des états des lieux du portefeuille de l’État organisés au mois de juin dernier avec le concours du Copirep (Comité de pilotage et de la réforme des entreprises publiques). Ce rapport relevait que la situation financière de ces entreprises reste très préoccupante dans la quasi-totalité de ces entreprises, avec un outil de production vétuste et obsolète ainsi que des équipements insuffisants.
Pour Mme la ministre, la survie de ces entreprises passait par une réforme en profondeur. Un engagement que le Gouvernement n’est pas prêt à assumer.
Pour l’Union sacrée de la nation, l’urgence est de se partager ce qui reste encore de ces entreprises du Portefeuille de l’Etat. Pour y arriver, il faudra cependant franchir deux obstacles majeurs : Bahati et Katumbi.
Econews