Sous l’impulsion de la médiation angolaise, le gouvernement de la RDC et la coalition rebelle AFC/M23 engagent ce mardi des « négociations directes » à Luanda, dans l’espoir de mettre fin à la guerre qui déchire l’Est du pays. Malgré les réticences de Kinshasa à céder aux exigences des rebelles et un malentendu protocolaire sur l’invitation du coordonnateur de l’AFC, les deux camps ont accepté de se rencontrer et de se parler de vive voix. Alors que la délégation congolaise, confirmée par la Présidence de la République sans plus de détails, et les rebelles, modérés dans leurs positions, entament des pourparlers sous tension, la question reste entière : ces discussions houleuses parviendront-elles à transformer l’essai en paix durable ?
Sous l’égide de la médiation angolaise, le gouvernement de la République Démocratique du Congo (RDC) et la coalition rebelle AFC/M23 entament ce mardi 18 mars à Luanda des «négociations directes», une première depuis la recrudescence des violences dans l’Est du pays. Ces pourparlers, annoncés comme un « pas nécessaire » par les parties prenantes, s’ouvrent dans un climat de méfiance mutuelle, mais avec l’espoir tenu de dessiner une issue pacifique à un conflit qui dure depuis plus d’une décennie.
DES POSITIONS ENCORE FIGEES
La médiation angolaise, mandatée par l’Union africaine, a réussi l’exploit de réunir autour d’une même table Kinshasa et les rebelles du M23, pourtant qualifiés de « terroristes » par les autorités congolaises. Si le gouvernement de Félix Tshisekedi a longtemps refusé de répondre aux exigences de la coalition, jugées «inacceptables», Luanda a fait preuve de «sagesse diplomatique», selon des sources proches du dossier, en insistant sur l’urgence d’un dialogue de vive voix.
«Une délégation officielle sera bel et bien présente à Luanda», a confirmé ce week-end Mme Tina Salama, porte-parole du Président de la République, Félix Tshisekedi, tout en restant évasive sur sa composition.
«À ce stade, nous ne pouvons pas dire qui fera partie de la délégation», a-t-elle déclaré, alimentant les spéculations sur le niveau d’engagement réel de Kinshasa.
Du côté des rebelles, l’AFC/M23 a également accepté de modérer ses positions, malgré un contentieux protocolaire : l’invitation officielle a été adressée au président du M23 plutôt qu’à Corneille Nangaa, coordonnateur de l’AFC. Un «malentendu » dénoncé par la coalition, mais qui n’a pas fait capoter les discussions.
Les attentes des deux camps restent diamétralement opposées. Kinshasa exige un «désarmement immédiat» des combattants du M23 et leur retrait sans conditions des territoires occupés. Les rebelles, qui dénoncent une marginalisation politique et sécuritaire des communautés locales, réclament, eux, des garanties constitutionnelles et une intégration dans les institutions.
«Ces négociations sont un test pour la crédibilité du Gouvernement et la sincérité des rebelles», analyse un diplomate sous couvert d’anonymat.
La médiation angolaise devra donc naviguer entre ces écueils, alors que les discussions s’annoncent houleuses. «Personne ne veut apparaître comme faisant le premier pas vers des concessions», souligne un observateur basé à Luanda. Les récentes accusations de Kinshasa contre le Rwanda, accusé de soutenir militairement le M23, ajoutent une couche de complexité au dossier.
L’EST DE LA RDC DANS L’ATTENTE D’UNE TREVE
Dans l’Est de la RDC, où les combats ont provoqué le déplacement de plus de 800.000 personnes depuis 2022, la population observe ces négociations avec un mélange d’espoir et de scepticisme. «Nous voulons croire à la paix, mais nous avons été trop souvent déçus », confie un habitant de Goma joint par téléphone.
La communauté internationale, notamment les Nations Unies et l’Union européenne, appelle les deux parties à « saisir cette opportunité historique ».
Pour l’heure, aucun calendrier n’a été rendu public, mais les médiateurs espèrent des avancées concrètes d’ici la fin de la semaine.
Si les négociations de Luanda échouent, les risques d’une reprise en force des hostilités sont élevés. Mais en cas d’accord, même partiel, elles pourraient marquer un tournant dans l’un des conflits les plus enkystés d’Afrique Centrale.
Reste à savoir si Kinshasa et l’AFC/M23 sauront dépasser leurs griefs pour écrire, enfin, une page commune.
Econews