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Kinshasa prolonge de trois mois l’embargo sur les exportations de cobalt 

La République démocratique du Congo (RDC), premier producteur mondial de cobalt, a prolongé de trois mois l’embargo sur ses exportations de ce métal stratégique. Une décision visant à réduire les stocks excédentaires et à soutenir les prix, qui ont déjà bondi de 45 % depuis février. Les opérateurs miniers, dont CMOC et Glencore, dans l’attente d’éventuelles alternatives comme un système de quotas.

La République Démocratique du Congo (RDC), premier producteur mondial de cobalt, a décidé de prolonger de trois mois supplémentaires la suspension de ses exportations de ce métal stratégique.

Initialement prévu pour prendre fin ce dimanche 22 juin 2025, l’embargo, instauré en février dernier pour une durée de quatre mois, vise à rééquilibrer un marché mondial saturé, où les prix avaient chuté en raison d’un excès d’offre.

Une mesure pour soutenir les prix

Dans un communiqué publié samedi 21 juin 2025, l’Autorité de Régulation et de Contrôle des Marchés des Substances Minérales Stratégiques (ARECOMS) a justifié cette prolongation par la persistance de «stocks toujours importants sur le marché ». L’objectif affiché reste le même : réduire l’offre globale pour faire remonter les cours.

La RDC, qui assure environ 70 % de la production mondiale de cobalt, accueille les géants du secteur, tels que le chinois CMOC et le suisse Glencore. Aucune réaction officielle de ces entreprises n’a encore été enregistrée, alors que cette décision impacte directement leurs activités.

Un embargo aux effets déjà visibles

Depuis l’instauration de l’embargo en février, les prix du cobalt ont connu une nette hausse. Sur le London Metal Exchange (LME), la tonne est passée de 20.900 USD fin février à 30.200 USD actuellement, soit une augmentation d’environ 45 %. Cette progression confirme l’influence majeure de la RDC sur le marché.

Toutefois, l’ARECOMS n’exclut pas d’ajuster sa position dans les trois mois à venir. L’institution pourrait opter pour une «modification, prolongation ou levée » de la suspension. L’introduction d’un système de quotas, évoqué ces derniers mois, reste une alternative possible à l’embargo total.

Quelles conséquences pour le marché ?

Les analystes suivent de près cette situation, alors que le cobalt est un métal clé pour la transition énergétique, notamment dans la fabrication de batteries pour véhicules électriques. La prolongation de l’embargo pourrait accentuer les tensions sur les chaînes d’approvisionnement mondiales, déjà sensibles aux fluctuations des matières premières.

Confrontée à la chute des prix du cobalt, la RDC a récemment suspendu pour quatre mois toute exportation de ce minerai stratégique dont elle est le premier producteur mondial, jouant d’une arme potentiellement à double tranchant. La mesure, inattendue, pourrait éloigner de potentiels investisseurs, mais aussi inciter les acheteurs, ultradépendants des ressources congolaises, à trouver des alternatives, mettent en garde certains spécialistes.

En 2024, selon l’Institut américain d’études géologiques, la RDC a fourni 76 % de la production mondiale de cobalt, un minerai essentiel à la fabrication de batteries des véhicules électriques et dont la demande a explosé depuis 2000.

La suspension des exportations a commencé à faire remonter les prix, particulièrement sur le marché chinois. La Chine dispose de stocks, mais les entreprises les estiment insuffisants pour couvrir les quatre mois de suspension et, faute de fournisseurs alternatifs, les prix pourraient s’emballer au deuxième trimestre, prévenait Robert Searle, pour qui cette politique comporte des risques pour la RDC.

L’interdiction, qui «a pris par surprise » les entreprises chinoises ayant « investi des milliards de dollars dans l’industrie minière congolaise », «pourrait freiner des investissements supplémentaires », craignait-il, mais aussi refroidir les potentiels investisseurs occidentaux que la RDC tente d’attirer.

En outre, «une hausse des prix du cobalt et des perturbations [d’approvisionnement] pourraient entraîner une plus grande utilisation de batteries avec des technologies utilisant moins de cobalt ou des batteries LFP » dans les prochaines années, avançait Robert Searle.

Francis N.