Servitude pénale à perpétuité assortie de 10 ans de sûreté incompressible pour meurtre de Rossy Mukendi et condamnation à 10 ans de servitude pénale pour violation des consignes. C’est la peine maximale infligée à Mme Carine Lokeso, commissaire supérieur adjoint de la Police Nationale Congolaise (PNC), reconnue coupable de l’assassinat en février 2018 de l’activiste des droits de l’Homme Rossy Mukendi Tshimanga, abattu par les éléments de la PNC sous ses ordres.
Dans les milieux de la Société civile, tout comme dans la famille de Rossy Mukendi, c’est le soulagement. «Le peuple gagne toujours», a-t-on clamé à l’unanimité lorsque la Cour militaire de Kinshasa/Matete a rendu son jugement sur cette affaire lundi à Kinshasa. Carine Lokeso a donc été condamnée pour violation des consignes et de meurtre de Rossy Mukendi. Ce qui lui a valu également une radiation pure et simple de la PNC. C’est la désillution pour celle qui terrorisait il y a quelques années le district de Mont-Amba, se croyant au-dessus de la loi. Son garde du corps, le policier Gérard Tokis Nkumbo, qui était sous ses ordres le jour du meurtre, a été condamné à 10 ans de prison ferme.
Outre la peine de servitude pénale, les deux policiers ainsi que la République Démocratique du Congo (RDC) ont été condamnés à payer la somme de 125.000 dollars US aux parties civiles.
Me Arsène Tshimanga, jeune frère de l’activiste Rossy Mukendi, cité par dépêche.cd, se dit satisfait du verdict qui permettra enfin à l’âme du défunt de reposer véritablement en paix.
«Nous pensons que ce jugement est un ouf de soulagement, surtout pour nous la famille. C’est depuis 2018 que la famille avait fait le deuil, sans pourtant connaître les assassins ou les meurtriers de Rossy Mukendi Tshimanga. C’était une façon pour nous de souhaiter que l’âme de Rossy repose en paix dès lors que les assassins ou les meurtriers n’étaient pas connus», a-t-il déclaré.
Soulagement dans la Société civile
Dans la Société civile, on salue unanimement ce verdict.
Me Georges Kapiamba, coordonnateur de l’ONG ACAJ, salue cette décision de la Cour militaire de Kinshasa/Matete et estime que les responsables des forces de l’ordre doivent protéger les droits de l’Homme.
Même son de cloche du Bureau conjoint des Nations Unies aux Droits de l’Homme (BCNUDH) en RDC qui a salué cette étape importante dans la lutte contre l’impunité, tout en invitant les autorités à expédier les autres procédures concernant les dossiers des répressions violentes liées à la période électorale et à traduire tous les auteurs de toutes les violations graves des droits de l’homme devant les juridictions compétentes quel que soit leur grade. Le BCNUDH réitère également son appel à indemniser les victimes et leurs ayant droits et à initier les réformes nécessaires pour créer les garanties de non-répétition.
Le coordonnateur de la Nouvelle société civile congolaise (NSCC), Jonas Tshombela, pense que ce verdict va servir d’exemple à ceux qui se croient intouchables.
«Nous sommes satisfaits de ce verdict qui vient corriger l’injustice qui a couvert ce dossier judiciaire. Ce major a bénéficié de la complicité du système d’impunité qui était mis en place foulant aux pieds les lois de la République. Ceci devra servir d’exemple à ceux qui estiment qu’ils sont des intouchables, tôt ou tard la justice les rattrapera. Même au ciel la vie humaine est sacrée, elle devra le savoir », a réagi Jonas Tsho-mbela, cité par Actualite.cd.
Ancien ministre des Droits humains dans le dernier gouvernement de Joseph Kabila, Marie-Ange Mushobekwa n’est pas restée indifférente à ce verdict. Elle estime que la Cour militaire de Kinshasa/Matete a rendu justice à la famille de l’activiste Mukendi et rappelle que cette peine est l’une des recommandations formulées par la commission d’enquête mixte «CEM-3121» qu’elle avait dirigée quand elle était aux commandes du ministère des Droits humains.
«Je pense que justice a été rendue à la veuve et aux orphelins de Rossy Mukendi. Je salue cette condamnation que la commission 3121 que j’ai dirigé avait recommandée», a-t-elle écrit sur son compte twitter.
Les travaux de la CEM -3121 s’étaient déroulés du 5 février au 10 mars 2018. Plusieurs violations et atteintes aux droits de l’homme en lien avec les manifestations publiques organisées sous le régime Kabila fils, à l’appel du Comité laïc de coordination (CLC), avaient été documentées. Le rapport de cette commission avait mentionné quatorze morts, soixante-cinq blessés, quarante cas d’arrestations, détentions, tortures et traitement cruels, inhumains et dégradant ainsi que dix cas d’extorsion et vol à main armée.
Pour rappel, Rossy Mukendi (36 ans) avait été tué le 25 février 2018 à la paroisse Saint Benoît de la commune de Lemba (Kinshasa), alors qu’il participait à une marche pacifique organisée par le Comité Laïc de Coordination pour réclamer le départ de Joseph Kabila du pouvoir et l’organisation d’élections.
Francis M.