Pour Adolphe Muzito, leader de Nouvel élan et actuel coordonnateur de Lamuka, principale plateforme de l’opposition, les chefs coutumiers, longtemps relégués au second rôle, doivent changer de fusil d’épaule pour s’imposer dans le débat national. « Vous vous consolez d’avoir le pouvoir spirituel. Mais il faut plutôt avoir le pouvoir matériel », leur a-t-il lancé, recevant dernièrement un important groupe de chefs coutumiers congolais.
Dans un langage de vérité, l’ancien Premier ministre Muzito a invité les chefs traditionnels à une reprise en main, en s’investissant dans le contrôle du vrai pouvoir qui est foncier, minier, bref économique. « Vous vous consolez d’avoir le pouvoir spirituel. Mais il faut plutôt avoir le pouvoir matériel », a déclaré Mfumu Mpa, qui s’adressait à un important groupe de chefs coutumiers congolais. Le pouvoir coutumier est reconnu par l’Etat congolais. Bien plus, les chefs coutumiers sont également des dépositaires traditionnels des terres ancestrales, du moins sur papier.
«C’est de la distraction. Il n’y a pas de pouvoir politique sans pouvoir économique », martèle M. Adolphe Muzito qui a volontairement choqué les chefs coutumiers afin de les pousser à prendre conscience de leur inutilité actuelle.
S’exhibant avec des habits de pouvoir ancestral, les chefs coutumiers sont en réalité dépouillés de tout. Ils n’ont absolument rien, à part le prestige et l’apparat. « On vous reconnaît le pouvoir mais on ne vous reconnaît pas le soubassement de ce pouvoir parce que vous n’êtes propriétaire de rien », a enfoncé l’ancien Premier ministre, disciple du nationaliste Antoine Gizenga.
«Lorsqu’un capitaliste vient installer une usine dans la communauté, tout le monde ira chez lui parce qu’il devient le chef, capable de donner le salaire», a-t-il expliqué à une assistance intéressée par ce discours qui consiste à révolutionner leur mentalité. Un discours direct et limpide qu’ils n’ont jamais écouté avant. «Si vous n’entrez pas dans le capitalisme pour devenir des chefs de demain type capitaliste, le pouvoir politique vous ne l’aurez plus. Les gens vont vous ignorer», a-t-il encore cogné.
Il va plus loin pour les inviter à travailler dans le sens de se valoriser économiquement. « Qu’on reconnaisse vos droits notamment les droits fonciers et miniers parce que c’est alors que vous aurez le vrai pouvoir », a-t-il conseillé. « Le pouvoir est d’abord économique avant d’être politique », a estimé M. Muzito. « Arrêtez de faire du fétichisme là où on vous agresse de manière capitaliste », a-t-il déclaré, prévenant que ces capitalistes sont des « descendants des esclavagistes blancs » qui maintiennent les chefs coutumiers dans un état d’irresponsabilité et de vulnérabilité alors qu’ils ont un pouvoir économique réel qu’ils ignorent.
«Il faut agresser les dirigeants politiques actuels par des marches pacifiques. Il ne faut pas penser que lorsque vous gesticulez ils n’ont pas peur» parce qu’ils vous savent économiquement faibles, dit-il.
Hugo Tamusa