Dans la province du Nord-Kivu, défaits en 2013, les rebelles du M23, ont refait surface. Certaines localités ont été prises de cible par ces rebelles . A Kinshasa, on hésite à pointer du doigt Kigali qu’on soupçonne d’armer le M23. En bon terme avec Kampala, Kinshasa écarte pour le moment la piste ougandaise, se concentrant juste sur le Rwanda. Mardi, son ambassadeur en RDC, Vincent Karega, a été convoqué par le chef de la diplomatie congolaise, Christophe Lutundula. Le regain d’activité du M23 prouve qu’entre Kinshasa, Kigali et Kampala, la sincérité n’a jamais été au rendez-vous. Apparemment, les trois capitales ne partagent pas le même agenda sécuritaire dans la région des Grands Lacs.
Fini l’hypocrisie entre les présidents Félix-Antoine Tshisekedi, Paul Kagame et Yoweri Museveni. La pseudo-fraternité ainsi que les cosmétiques mutualisations ont servi à endormir les Congolais pour qu’enfin l’estocade soit donnée.
Dans la nuit de dimanche à lundi, le M23, soutenu, selon un communiqué des Forces armées de la RDC, par les Forces de défense du Rwanda (RDF), a mené des incursions et attaqué les positions des FARDC (Forces armées congolaises) de Tchanzu et Runyoni, dans le territoire de Rutshuru.
Pour le général Sylvain Ekenge, porte-parole du gouverneur militaire de la province du Nord-Kivu, la main rwandaise derrière l’activisme militaire du M23 ne fait l’ombre d’aucun doute.
Selon des sources de la Société civile de la province du Nord-Kivu, les combats ont repris mardi matin entre l’armée et ce mouvement rebelle.
Plus tard dans la soirée, dans une interview au Journal Afrique de TV5 Monde, le ministre de la Communication et Médias, porte-parole du Gouvernement, Patrick Muyaya Katembwe, a employé le conditionnel, mais néanmoins enfoncé le clou.
« Il est temps de mettre fin à cette forme d’hypocrisie qui existerait ou cette forme de complicité entre le M23 et le gouvernement du Rwanda », a-t-il déclaré, « parce que nous, nous voulons regarder le Rwanda comme un pays partenaire, comme nous regardons l’Ouganda ».
Selon des informations recoupées par Econews, on apprend que Kinshasa n’a pas apprécié la communication du porte-parole du gouverneur militaire du Nord-Kivu « qui ne s’est pas retenu à indexer le Rwanda». «L’avis de la hiérarchie n’a pas été sollicité au préalable. Les autorités tentent d’apaiser », note une source officielle.
Sans surprise, Kigali remonté, n’a pas caché sa colère. «Nous réfutons catégoriquement les accusations sans fondement » de l’armée congolaise, a répliqué mardi dans un communiqué diffusé sur Twitter le gouverneur de la province rwandaise de l’Ouest, François Habitegeko. L’armée rwandaise « n’est en aucune façon impliquée dans les activités belliqueuses » en RDC, a-t-il ajouté.
L’offensive du M23 qui a progressé sur le sol congolais comme du beurre est la parfaite illustration de la sournoiserie de ces deux chefs d’Etat voisins. Kagame et Museveni taisent leurs divergences lorsqu’il s’agit de l’agression de la Rd Congo. C’est le point qui unit les deux dirigeants de la région des Grands Lacs africains. Pour comprendre comment ces deux agresseurs ont agi, il faut remonter à la défaite du M23.
Les rebelles défaits du M23 avaient trouvé refuge en Ouganda et au Rwanda. Ils y ont été accueillis comme des héros d’une expédition militaire. Puis, des négociations pour leur retour ont piétiné pour diverses raisons. Curieusement, depuis l’avènement du président Tshisekedi au pouvoir, ces rebelles se sont réinstallés allègrement sur le sol congolais. Ils occupent et contrôlent des villages entiers où ils ont érigé administrations et positions militaires.
La question est de savoir comment ont-ils quitté avec des armes les territoires rwandais et ougandais sans que les autorités de ces deux pays ne soient informés ? Pourquoi Kagame et Museveni ont-ils libéré ces chiens enragés pour envahir de nouveau la RDC et y semer mort et désolation ? Quel est l’objectif poursuivi en libérant ces hors-la-loi dotés d’armes sophistiquées?
Oui ! Les M23 ont pris le dessus sur les militaires congolais parce qu’ils combattent avec des armes sophistiquées dotées par le Rwanda et l’Ouganda. Des mitraillettes infrarouges utilisés pour massacrer des dizaines de militaires congolais avec la complicité de la nuit sont la preuve de l’implication des officiels rwandais et ougandais en plus du fait qu’ils ont laissé ces « réfugiés » retourner sur le sol congolais et organisé une offensive de cette envergure.
Tout couper
Il faut tout couper avec ces deux pays. La plus grosse erreur serait de croire que l’Ouganda ne serait pas impliqué par cette agression. Les deux capitales ont planifié et autorisé cette agression. En libérant des éléments du M23 réfugiés en Ouganda, Museveni a poignardé Tshisekedi. Aujourd’hui que les troupes ougandaises sont déployées jusqu’en Ituri, il est gravissime pour la République Démocratique du Congo de se défendre parce que le serpent venimeux est dans la maison sous deux formes : ADF et UPDF. Tshisekedi a intérêt d’exiger le départ des uns pour combattre les autres. Le gros des hommes du M23 dans les offensives viennent de l’Ouganda. On ne mène pas des opérations conjointes avec des agresseurs. Tshisekedi est averti.
Quant au Rwanda, l’heure est venue de tout suspendre, à commencer par le survol de Rwandair du territoire congolais et surtout ce juteux contrat de raffinage d’or. Il faut être intraitable lorsqu’il s’agit de l’agression et de l’annexion des territoires congolais.
La sincérité des USA en jeu
L’autre partenaire privilégié, les États-Unis, a maintenant l’occasion de se déployer et de dire à ses amis rwandais et ougandais que cette situation est inacceptable. Son silence et surtout son indifférence signifierait acceptation de l’opprobre. D’ailleurs, il est strictement inconcevable que les États-Unis ne disposent pas de renseignements fiables sur la préparation et l’exécution de cette offensive. Il est même risqué de les absoudre. Le président de la République qui a fait confiance aux uns et aux autres de les mettre face à la réalité. Elle est là comme le nez au milieu du visage. Le Rwanda et l’Ouganda agressent une nouvelle fois la RDC. Impunément !
Depuis l’arrivée massive en RDC de Hutu rwandais accusés d’avoir massacré les Tutsi durant le génocide de 1994, le Rwanda a été régulièrement accusé par Kinshasa d’incursions en RD Congo et de soutien à des groupes armés dans l’est du pays.
Les relations se sont apaisées avec l’arrivée au pouvoir début 2019 de Félix Tshisekedi, qui a rencontré à plusieurs reprises son homologue rwandais Paul Kagame. Mais le regain d’activité du M23 a ravivé le soupçon.
Également appelé «Armée révolutionnaire congolaise», le M23 est issu d’une ancienne rébellion tutsi congolaise jadis soutenue par le Rwanda et l’Ouganda, pays frontaliers de la province du Nord-Kivu en proie depuis plus de 25 ans aux violences de nombreux groupes armés.
Défait en 2013 par les FARDC, le M23 fait de nouveau parler de lui depuis novembre, lorsqu’il a été accusé d’avoir attaqué plusieurs positions militaires dans la région de Rutshuru. Le mouvement rebelle reproche notamment aux autorités de Kinshasa de n’avoir pas respecté des engagements pris pour la démobilisation et la réintégration de ses combattants.
Econews