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Retrait des troupes rwandaises avant toute chose : l’Accord du 27 juin dans l’impasse, Kinshasa oppose son veto

L’optimisme autour de l’Accord RDC-Rwanda du 27 juin 2025 s’est brutalement éteint. Les négociations pour finaliser le Cadre d’intégration économique régionale (CIER) ont été bloquées in extremis vendredi à Washington par Kinshasa. Le Président de la République, Félix Tshisekedi, a refusé de donner le feu vert, ramenant les discussions à la case départ. La raison de ce coup d’arrêt ? La RDC conditionne la signature du CIER par le retrait « effectif » des militaires rwandais de son territoire, une présence que Kigali continue de nier. Les récentes prises de position du conseiller Afrique de Donald Trump, Massad Boulos, auraient également déplu à Kinshasa, renforçant la fermeté congolaise. Tandis que l’administration Trump, garante de l’accord, garde le silence face à cette condition sine qua non, une source gouvernementale congolaise dénonce «l’hypocrisie » de Kigali et met la pression sur les États-Unis pour obtenir un véritable engagement de paix. L’avenir de l’Accord du 27 juin est désormais en suspens.

Le rideau est tombé brutalement sur les espoirs de normalisation entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda. Vendredi, à Washington, le gouvernement congolais a réservé une fin de non-recevoir à la signature du Cadre d’intégration économique régionale (CIER), bloquant in extremis un processus diplomatique patiemment négocié sous l’égide des États-Unis. Ce veto présidentiel, intervenu au moment où les délégations techniques pensaient finaliser le texte, renvoie les deux pays rivaux à la case départ et jette une lumière crue sur la fragilité du processus de paix dans la région des Grands Lacs.

Selon plusieurs sources concordantes, c’est dans les dernières heures des discussions, alors que les experts des deux pays avaient travaillé toute la journée du vendredi pour peaufiner les derniers détails du texte, que l’ordre est venu directement de la Présidence de la République.

Félix Tshisekedi a refusé de donner quitus à sa délégation, exigeant un «réexamen complet des prérequis sécu-ritaires » avant toute signature.

La condition posée par Kinshasa est claire, ferme et sans ambiguïté : aucune avancée sur le volet économique ne sera possible sans le retrait effectif, vérifiable et ir réve rsible des troupes rwandaises du sol congolais.

Une position que le gouvernement congolais justifie par «l’absence de sincérité» de la partie rwandaise, qui continue de nier toute implication militaire aux côtés des rebelles du M23.

UNE SOURCE GOUVERNEMENTALE S’EXPLIQUE

Dans les couloirs du Palais de la Nation, l’exaspération est palpable. Une source haut placée au sein du gouvernement congolais s’est confiée dans des termes sans équivoque : «Comment voulez-vous que nous signions des accords de coopération économique avec un pays qui

maintient ses troupes sur notre territoire et soutient des groupes armés qui tuent nos citoyens ? La logique voudrait qu’on règle d’abord les questions de sécurité avant de parler d’intégration économique.»

Le ton se fait plus incisif lorsqu’il est question du rôle des Etats-Unis : «L’administration Trump doit choisir son camp.

Soit elle assume son rôle de médiateur impartial et met la pression sur Kigali pour un retrait immédiat de nos provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, soit elle devient complice de cette hypocrisie internationale.

Nous ne sommes plus à l’époque où la RDC signait des accords sous la dictée. »

Le Cadre d’intégration économique régionale qui devait être signé ce vendredi représentait pourtant la concrétisation la plus avancée de l’Accord du 27 juin 2025. Ce document ambitieux prévoyait une coopération structurée dans sept secteurs stratégiques, à savoir : l’exploitation minière conjointe et transparente; le développement d’infrastructures transfrontalières; l’interconnexion des réseaux énergétiques; la création de zones industrielles partagées; la modernisation de l’industrie agroalimentaire; la coordination des systèmes de santé publique et le développement du tourisme transfrontalier.

Autant de projets qui devaient jeter les bases d’une intégration économique inédite entre les deux pays, et qui se trouvent aujourd’hui suspendus aux impératifs de sécurité congolais.

LE RWANDA DÉNONCE, LES ÉTATS-UNIS SE TAISENT

À Kigali, la réaction ne s’est pas fait attendre. Le gouvernement rwandais a exprimé sa «profonde déception » face à ce qu’il qualifie de «revirement inexplicable » de la partie congolaise. Dans un communiqué laconique, le ministère des Affaires étrangères rwandais a réaffirmé «son engagement en faveur du processus de paix », tout en regrettant «les obstacles mis à la mise en oeuvre des accords signés ».

Côté américain, le silence est pour l’instant de rigueur.

L’administration Trump, qui avait pourtant mis un point d’honneur à faire de la réconciliation RDC-Rwanda une priorité de sa politique africaine, n’a émis aucune déclaration officielle. Seules des sources anonymes au Département d’État évoquent «des discussions techniques en cours pour surmonter les derniers obstacles ».

L’OMBRE DE MASSAD BOULOS

Plusieurs observateurs pointent du doigt l’influence des récentes déclarations de Massad Boulos, le conseiller Afrique de Donald Trump, dont les prises de position perçues comme favorables à Kigali auraient «Ulcéré » les autorités congolaises. «Les déclarations de Boulos ont confirmé les craintes de Kinshasa quant à la partialité de la médiation américaine », analyse un diplomate européen sous couvert d’anonymat.

Ce blocage diplomatique intervient dans un contexte sécuritaire particulièrement tendu dans l’Est de la RDC, où la recrudescence des combats entre l’armée congolaise et les rebelles du M23 a provoqué une nouvelle crise humanitaire. Plus de 100.000 personnes ont été déplacées ces dernières semaines, selon les agences humanitaires des Nations Unies.

La communauté internationale suit avec inquiétude cette nouvelle crise. L’Union africaine, par la voix de son président, a appelé « à la retenue et à la poursuite du dialogue », tandis que plusieurs capitales européennes s’activent en coulisses pour éviter une rupture complète du processus de paix.

QUEL AVENIR POUR L’ACCORD DU 27 JUIN ?

La question se pose désormais avec acuité : l’Accord du 27 juin 2025, dont le CIER était la pièce maîtresse, est-il déjà moribond ? Les observateurs les plus pessimistes évoquent un « processus en coma dépassé », tandis que les optimistes estiment qu’il s’agit d’une «crise de croissance nécessaire » dans une relation bilatérale historiquement conflictuelle.

Le plus évident est que Kinshasa a envoyé un message clair à la communauté internationale. La RDC n’est plus disposée à signer des accords économiques avec un pays qu’elle considère comme un agresseur et attend des garanties sécuritaires tangibles, avant de reprendre quelque discussion que ce soit.

Alors que les délégations quittent Washington les mains vides, tous les regards se tournent désormais vers la Maison-Blanche. L’administration Trump saura-t-elle, ou pourra-t-elle, mettre la pression sur Kigali pour obtenir, les concessions que Kinshasa exige ? La réponse à cette question déterminera l’avenir non seulement des relations entre les deux pays, mais aussi la stabilité de toute la région des Grands Lacs.

ECONEWS

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