64 ans d’indépendance : l’ECC lance un appel pour un nouveau processus de «vérité et réconciliation»

A l’occasion du 64ème anniversaire de la République Démocratique du Congo, le Président national de l’ECC, le Rév. Dr André-Gédéon BOKUNDOA-bo-LIKABE, a lancé un appel pour un nouveau processus de vérité et de réconciliation, appuyé par une approche rationnelle transcendant les divisions sociologiques, idéologiques, politiques et religieuses, afin de permettre au pays de guérir de son passé douloureux et de progresser vers un avenir plus juste et prospère pour tous les Congolais prononcé un discours réconciliateur. Dans son mot de circonstance, le patron de l’ECC a mis l’accent sur la situation actuelle du pays, en mettant l’accent sur les défis socio-économiques, politico-idéologiques, diplomatiques et sécuritaires auxquels le pays est confronté. Ci-dessous le mot du Président de l’ECC.

TIGHANA MASIALA

MOT DU PRÉSIDENT NATIONAL DE L’ECC A L’OCCASION DU 64ème ANNIVERSAIRE DE L’INDÉPENDANCE DE LA RDC

« VERITE ET RECONCILIATION » Jean 8, 32

Chers compatriotes et Peuple de Dieu,

En ce jour du 30 juin 2024 où nous commémorons le 64e anniversaire de notre indépendance, que la grâce et la paix nous soient accordées de la part de Dieu notre Père et de Jésus-Christ notre Seigneur et Sauveur.

Jean 8, 32 dit : « Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous affranchira ». La vérité en rapport avec la commémoration de cet événement est celle de dire que des efforts sont encore à fournir à tous les niveaux pour que 64 ans après l’accession de notre Pays à l’indépendance, nous puissions vivre son effectivité. Si durant les 75 ans de la colonisation, le Pays avait été victime des pillages systématiques de ses ressources naturelles et sa population avait été soumise à des traitements infrahumains, fort est de constater que depuis l’indépendance, la situation générale laisse à désirer, faisant de cette indépendance une illusion pour une population qui demeure encore un peuple meurtri.

Et le passé d’un peuple meurtri n’est jamais passé tant qu’il n’est pas encore guéri par un processus courageux et consciencieux de vérité et réconciliation. Voilà pourquoi même pour nos morts qui sont des invisibles et non des absents, la justice doit être rendue par le triomphe de la vérité et de la réconciliation. Une Nation foncièrement religieuse comme la nôtre devrait sans cesse laisser la vérité questionner le sens et la place de la vie dans la triade Dieu, Univers et Homme.

Entre Histoire et Mémoire d’un peuple, « La vérité peut dire sans vouloir tout dire pour ne pas dire ce que les autres refusent de dire et d’entendre ». La vérité relève donc de l’acte de la Parole et de l‘attitude de l’entendre.

Victime des crimes de masse ayant fait près de 10 millions de morts et continuent à faire couler le sang de nos compatriotes, à cause des agressions et des conflits armés perpétrés depuis près de trois décennies, sous le silence coupable de la communauté internationale, la République Démocratique du Congo devient un cas d’école de la justice transitionnelle et un symbole de la banalité du mal par la désacralisation de la vie humaine dans notre contemporanéité.

Ce 30 juin 2024 trouve notre Pays confronté aux multiples défis socio-économiques, politico-idéologiques, diplomatiques et sécuritaires qui, d’un côté, sont le fruit de notre incapacité de nous arrêter en vue d’analyser sans complaisance les causes profondes de nos souffrances à partir d’une reprise consciente de notre passé commun et, de l’autre, par l’absence de notre responsabilité collective de mettre en place un cerveau collectif en vue de repenser notre autodétermination face à la reconfiguration des blocs de puissance et aux chocs civilisationnels de l’heure.

Chers compatriotes et Peuple de Dieu,

Décidées de faire de notre Pays un réservoir mondial d’exploitation illicite des ressources naturelles et de la biodiversité, certaines puissances se sont livrées aux crimes de masse par la traite négrière, la colonisation et autres formes d’esclavages perpétrés sur nos populations.

Plusieurs rapports d’experts nationaux et internationaux attestent qu’un partenariat d’affaires s’est cristallisé principalement au Nord-Kivu et en Ituri entre les groupes armés, certains pays voisins et quelques multinationales dans l’exploitation des minerais du sang.

64 ans après l’accession de notre Pays à son indépendance, nous devons avoir le courage d’avouer que plusieurs processus initiés pour tenter de réparer ce long passé sombre et le plus récent ont été conjoncturels et ont montré leurs limites face aux problèmes endémiques.

Qu’il s’agisse des processus politiques internes, notamment la démocratisation du Pays en 1990 passant par la Conférence nationale souveraine en 1992 et la longue période de transition politique de 1990 à 2003, du Dialogue inter congolais de Sun City en 2002 ayant mis en place l’actuel ordre constitutionnel grâce auquel il a été organisé les quatre cycles électoraux de 2006 à 2023, pour ainsi légitimer et articuler les institutions en vue d’une gouvernance démocratique de l’Etat ; qu’il s’agisse des processus diplomatiques basés sur les relations internationales, notamment par des adhésions dans différentes organisations continentales et mondiales passant par la signature de différents traités et accords internationaux jusqu’à la tentative de réparation du passé colonial, le Pays reste confronté aux défis géopolitiques et géostratégiques de l’heure.

64 ans après, il est temps de quitter le monde de célébration d’un événement historique et lui donner un contenu pratique de l’affranchissement du Pays et de sa population de tout ce qui les maintiendrait encore dans un état d’esclavage déguisé. Il nous faut donc engager notre Pays dans un nouveau processus hautement spirituel de sagesse et d’intelligence en vue de guérir son passé, mieux vivre le présent et retrouver son destin initial.

Psaumes 133,1 est interpellateur lorsqu’il déclare : « Voici, oh ! qu’il est agréable, qu’il est doux pour des frères de demeurer ensemble.» Demeurer ensemble appelle à l’unité des fils et filles du Pays, à regarder dans la même direction, à l’acceptation de vivre ensemble avec les autres dans la tolérance mutuelle, et l’engagement dans la recherche du bonheur collectif.

Engager le Pays dans un tel processus courageux et consciencieux exige absolument une approche rationnelle qui transcende les pesanteurs sociologiques, idéologiques, politiques et religieuses pour arriver à identifier des causes profondes de notre plus grande tragédie dans l’historiographie des humains et, par conséquent, parvenir aux résultats escomptés.

L’Eglise du Christ au Congo (ECC) lance un vibrant appel aux fils et filles du Pays, dirigeants et dirigés, à s’unir comme un seul Homme derrière l’initiative de vérité et réconciliation en ces temps difficiles que traversent notre Pays et sa population.

Mettons nous ensemble comme frères et sœurs pour parler en profondeur du Congo, notre Congo, cela est doux et agréable, le Seigneur nous enverra la bénédiction, la vie pour l’éternité ! Debout congolais !

L’Eglise du Christ au Congo exhorte le Chef de l’Etat, en sa qualité de Représentant de la Nation et Symbole de l’unité nationale (Art. 69 de la Constitution du 18 février 2006) à prendre des initiatives courageuses et consciencieuses d’engager le Pays dans le processus susmentionné. Car, il est écrit : « vous connaîtrez la vérité et la vérité vous affranchira » (Jean 8, 32).

Le processus dont il est question ici n’est nullement celui de partage du gâteau ou de naïveté collective. C’est plutôt un processus spirituel qui marquera un changement de paradigme de notre combat, pour ainsi donner l’occasion à notre peuple de tirer des véritables leçons de son passé et de construire l’espérance de son rêve collectif.

Il s’agit ici de briser le silence pour accéder à la vérité, de manière à reconnaitre les vrais acteurs internes et externes, pour ainsi établir les responsabilités en vue de parvenir à la réparation ou au pardon.

Ce processus permettra une justice réparatrice d’une part, entre peuple congolais et, d’autre part, entre les Congolais et les autres peuples du monde qui se sont rendus coupables des faits susceptibles d’être qualifiés de crimes de masse et de pillages des ressources naturelles de la République Démocratique du Congo.

Cette justice réparatrice permettra de mettre fin au silence complice de la communauté internationale et de redonner à la dignité humaine son fondement éthico-spirituel en vue de reconstruire une paix durable et lancer le processus du développement durable dans notre Pays. Elle aura aussi le mérite d’influencer la stabilité et la prospérité de la sous-région des Grands-Lacs en particulier et de la Région d’Afrique Centrale en général.

Si notre Hymne national consacre et immortalise la date du 30 juin, c’est pour qu’à la fois nous défendions notre serment de liberté et que nous prenions le sacré engagement de bâtir un Pays plus beau qu’avant, d’assurer sa grandeur et de léguer dans les limites de ses frontières à notre postérité pour toujours.

Je termine en lançant un vibrant appel très particulier aux fils et filles de l’Eglise, les affranchis de Christ, devenus réellement libres de tout ce qui peut maintenir l’homme dans le contraire de la vérité, qui est le mensonge et de l’affranchissement, qui est l’esclavage. De la même manière Dieu nous a délivrés de la puissance des ténèbres et nous a transportés dans le royaume du Fils de son amour (Col.1,13), il nous donne aussi la mission de faire pareil pour nos semblables et notre Pays de qui dépend notre bonheur.

Il dit à chacun et chacune par Paul : « Je t’ai choisi du milieu des congolais, vers qui je t’envoie, afin que tu leur ouvres les yeux, pour qu’ils passent des ténèbres à la lumière et de la puissance de la dépendance, de l’esclavage, de l’exploitation à la vraie indépendance, pour qu’ils reçoivent en héritage les retombées des richesses dont regorge leur Pays.» (Actes 26,17-18).

Nous avons été délivrés pour délivrer, nous avons été bénis pour devenir une source de bénédiction pour notre Pays et non le contraire.

Nous avons donc l’obligation de persévérer, quoi qu’il arrive, dans la prière avec foi et la recherche du bonheur de notre Pays et de sa population pour ainsi devenir un exemple à suivre pour les autres qui ne connaissent pas encore Christ, le vrai Libérateur.

C’est dans ces conditions que la République Démocratique du Congo, Pays béni de Dieu, retrouvera son rôle prophétique pour le salut de l’humanité.

Que l’Eternel, notre Dieu, bénisse la République Démocratique du Congo et son Peuple.

Bonne fête de l’indépendance à toutes et à tous. Je vous remercie !

Fait à Kinshasa le 30 juin 2024

Rév. Dr André-Gédéon BOKUNDOA-bo-LIKABE 

Président National, Représentant Légal de l’ECC