Dans les années 90, les journées villes mortes ont été un moyen populaire d’exprimer le ras-le-bol des Congolais contre la mauvaise gouvernance ambiante de l’époque. Les organisateurs maitrisaient les conséquences de la neutralisation des activités dans la Ville de Kinshasa. Parmi ces conséquences, il y a celle sociale parce que les habitants paupérisés vivant au jour le jour, étaient confrontés à des difficultés d’accès à la débrouillardise, aux services essentiels tels que les transports en commun, les soins de santé et autres en raison de la paralysie des activités. Tous les gouvernements de l’époque redoutaient l’inanition des activités économiques parce qu’elles engendraient une perte significative de revenus pour les entreprises, les commerces et spécifiquement pour le Trésor public. C’est ce qui a expliqué partiellement l’hyperinflation que l’on a vécue, car les gouvernements ne pouvaient qu’actionner la planche à billets pour financer les déficits budgétaires astronomiques. Ce qui a conduit à la déglingue systémique de notre économie forçant l’effondrement des mécanismes de gouvernance, facilitant et accélérant le chute et la désintégration de la Grande République du Zaïre. En somme, les « journées villes mortes » étaient des puissants leviers de contraindre les gouvernements à changer leurs politiques.
Aujourd’hui, nous subissons une « Journée Ville Morte » organisée par des citoyens non identifiés et tolérée par les gouvernants contre les agressions du Rwanda et l’Ouganda et en soutien inconditionnel à nos forces de défense pour garantir l’intégrité et la souveraineté de notre pays. Oui, le peuple a le droit souverain de manifester son mécontentement contre ces invasions ayant déjà entrainé des millions de morts innocentes, des centaines de milliers de concitoyens en errance permanente dans notre propre pays, des destructions d’infrastructures, et surtout, des pillages de nos ressources naturelles pour financer leurs développements respectifs. Oui, le peuple a raison de manifester sa frustration.
Cependant, cette journée ville morte organisée à Kinshasa est totalement contreproductive. Pourquoi ? Elle n’est pas une réaction citoyenne contre les ennemis qui se trouvent à plus de 2000km. Elle n’a aucun impact sur eux, car elle n’affecte nullement sur leurs Trésors publics. Elle n’annihile pas leurs capacités à nous infliger du tort. En revanche, elle cause un tort considérable à notre propre capacité en tant que Kinois à générer les ressources pour financer nos forces de défense. En effet, les chiffres, de la Banque Mondiale, suivants le démontrent :
- Le PIB de la RDC à fin 2023, était d’USD66.38 milliards ;
- La contribution de Kinshasa au PIB de la RDC à fin 2023 est d’USD18,6 milliards, soit 13.5% ;
- Si l’on considère un homogène de 8.4% du PIB de la RDC en 2024, la contribution de Kinshasa serait d’USD20 milliards, soit USD55,2 millions par jour ;
- Ce mardi 28 janvier 2025, la « journée ville morte » a paralysé environ 80% de la production et des ventes, soit un revenu attendu d’USD11 millions ;
- Réduction des activités économiques et financières engendrant une réduction des recettes du Trésor pour financer la guerre.
En fait, cette action est contreproductive parce qu’elle n’affecte pas la nocivité de nos ennemis et, malheureusement, impacte notre aptitude à financer l’effort de libération de notre pays. Les USD11 millions seraient encore moins à cause des pillages malheureux constatés, vu que nos services n’ont pas anticipé ces dérapages. « N’oublions jamais cette vérité fondamentale : l’État n’a pas d’autre source d’argent que l’argent que les gens gagnent eux-mêmes. Si l’État souhaite dépenser plus, il ne peut le faire qu’en empruntant vos économies ou en vous taxant davantage. Il ne sert à rien de penser que quelqu’un d’autre paiera – ce ‘quelqu’un d’autre’, c’est vous ». M. Thatcher. Dans la situation du pays, aller emprunter à l’étranger coûterait excessivement cher à nos générations futures. C’est pourquoi, il ne faut pas détruire ce que nous possédons en pensant infliger du tort aux ennemis. Nous nous faisons harakiri.
Aussi, certains de nos citoyens sont des victimes collatérales parce qu’ayant déposé leurs passeports à la Maison Schengen pour obtenir un visa pourraient constater que leurs titres de voyage ont disparu. Parmi eux, il y a ceux sollicitent un visa pour des raisons sanitaires urgentes. Quel désarroi ! Et ceux qui ont déjà plusieurs visas en cours de validité pour des voyages d’affaires.
Les actes de vandalismes perpétrés contre certaines ambassades sont également inadmissibles. Le gouvernement vient d’exprimer ses regrets aux ambassades touchées. Mais, il faudrait exiger une redevabilité parce qu’il y aurait une rupture dans la chaine d’alerte.
Les Congolais ont le droit de manifester, c’est l’un des droits impératifs de notre Constitution. Mais, ce droit n’autorise pas la licence de destruction. Quel gâchis cette journée !
(*) Le titre est de la rédaction
Nkoy Mobali (CP)