Action contre APPLE. Me William Bourdon : «La RDC ne ferme pas la porte à toute négociation pour obtenir réparation»

Depuis avril 2024, une action en justice est lancée simultanément en France et aux Etats-Unis contre le géant américain de Hi-tech, APPLE, pour incorporation dans ses produits des minerais extraits illégalement sur le sol congolais via principalement le Rwanda. En séjour à Kinshasa, le collectif d’avocats de la RDC, constitué de Mes William Bourdon et Petr Amsterdam, accompagné du prof Mingashang, coordonnateur de la task force juridique du gouvernement congolais, était jeudi devant la presse, sous la direction du porte-parole du Gouvernement, Patrick Muyaya Katembwe, pour faire le point de la mise en demeure lancée contre l’entreprise américaine. Malgré des réticences exprimées par APPLE, Me William Bourdon, avocat de la RDC dans cette affaire, n’exclut pas l’option des négociations : « La RDC ne ferme pas la porte à toute négociation pour obtenir réparation ».

Depuis avril 2024, la République Démocratique du Congo a lancé une action en justice contre le géant américain de la technologie, APPLE. Cette action vise à dénoncer l’incorporation de minerais extraits illégalement du sol congolais, principalement via le Rwanda dans les produits de la société américaine.

Lors d’une conférence de presse à Kinshasa, le collectif d’avocats de la RDC, comprenant des personnalités telles que Me William Bourdon et Me Petr Amsterdam, a exposé les démarches judiciaires entreprises par le gouvernement congolais. Le professeur Mingashang, coordonnateur de la task force juridique du gouvernement, était également présent aux côtés du porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya Katembwe.

Malgré les réticences initiales exprimées par APPLE, Me William Bourdon, avocat représentant la RDC dans cette affaire, a affirmé que la porte des négociations reste ouverte. «La RDC ne ferme pas la porte à toute négociation pour obtenir réparation», a-t-il déclaré.

LE FOND DU PROBLEME

Prenant le premier la parole, le prof Mingashan est revenu sur le récent rapport produit par les cabinets sur «les minerais de sang » extraits de la RDC.

Depuis lors, la RDC a initié, au niveau international, une action judiciaire contre APPLE sous forme d’une mise en demeure.

Jeudi devant la presse, il s’agissait essentiellement de faire le point sur «comment l’opinion perçoit cette démarche et fournir des infos nécessaires pr comprendre cette initiative », a indiqué le prof Mingashang.
Me Peter Amsterdam juge légitime la voie choisie par la RDC pour comprendre APPLE à réglementer ses circuits d’approvisionnement en minerais utiles.

«Ce qui se passe est inacceptable. Il faut agir et trouver des vecteurs d’influence pour alerter le monde. Tout le monde sait ce qui se passe dans l’Est de la RDC, mais personne n’en parle», note-t-il, rappelant qu’«il est temps que la RDC fasse valoir ses droits».

Quelles sont dès lors les chances de la RDC dans cette démarche ? Me Peter ne s’avoue pas vaincu : «Nous allons mener cette campagne jusqu’au bout. On ne va pas lâcher ».

Pour sa part, Me William Bourdon s’est dit prêt à accompagner la RDC a non seulement faire entendre sa voix, mais aussi revendiquer ses droits. «C’est une grande responsabilité qui pèse sur nos épaules», reconnaît-il.
Même si APPLE semble marginaliser l’action entamée contre elle, Me Bourdon promet, à son tour, de maintenir la pression.

«On a reçu, sous de courrier sans papier à en-tête de l’entreprise, une réponse d’Apple. Une réponse laconique que nous considérons comme une forme de mépris, de cynisme, d’arrogance et de déni judiciaire », a-t-il déclaré.
Ce qui n’ébranle pas leur volonté d’aller de l’avant. «Ce qui nous réconforte, c’est la détermination du Président de la République (…) Notre objectif est d’avoir des résultats concrets et amener ces entreprises à renoncer à la culture de l’impunité», a-t-il souligné.

Pourquoi la RDC s’attaque-t-elle aux consommateurs finals tels qu’Apple et ne se préoccupent pas de tous ceux qui participent à la chaîne d’approvisionnement ? A cette question, le prof Mingashang a tenu à dissiper tout malentendu : « La finalité est de déstabiliser la chaîne d’approvisionnement qui implique directement le Rwanda ».

Le porte-parole du Gouvernement ne perd pas non plus espoir, même s’il reconnaît que la RDC n’en tirera pas profit de sitôt : «C’est une action qui sera sûrement longue. On a juste donné un aperçu du front judiciaire dans ce qui nous oppose au Rwanda…».

Les avocats de la RDC n’excluent pas la possibilité d’étendre leur action contre Apple jusqu’à l’Union européenne.
«On est en train d’examiner de façon très aiguëe comment intégrer l’Union européenne dans cette action. La question est sur la table », a promis Me Bourdon.

Pour le moment, la RDC agit sur deux tableaux contre Apple, simultanément à Paris (France) et en Californie (Etats-Unis).

Cette initiative légale souligne l’engagement du gouvernement congolais à faire respecter les lois nationales et internationales en matière d’exploitation minière et de commerce de minerais. En mettant en lumière les pratiques potentiellement illégales de grandes entreprises technologiques, la RDC envoie un signal fort quant à sa détermination à lutter contre l’exploitation abusive des ressources naturelles du pays.

DES SEMAINES DE SILENCE

Le 22 avril 2024, un groupe d’avocats dirigé par Amsterdam&Partners LLP à Washington et par William Bourdon of Bourdon&Associés à Paris avait posé au PDG d’Apple, Tim Cook, ainsi qu’à la filiale d’Apple en France, une série de questions fondées sur l’approvisionnement de la compagnie en minerais provenant de régions où les droits de l’homme étaient bafoués.

Amsterdam & Partners LLP avait également publié un rapport sur les minerais de sang en avril dernier, soulignant que des ressources acquises dans un contexte d’exploitation violentes dans l’Est de la RDC passaient ensuite au Rwanda par des réseaux de contrebande.

Par l’expression «minerais de sang», on désigne quatre minerais et métaux – étain, tungstène, tantale et or – issus de zones de conflit. Ces minerais présents dans de nombreux produits tels que les smartphones, les ordinateurs portables et bien d’autres appareils électroniques sont extraits et importés principalement de l’Est de la RDC, en conflit armé depuis une trentaine d’années.

Faustin K.