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Affaire des honoraires d’avocats dans le procès Kabila : quand le jugement par défaut révèle l’inutilité d’une défense « civile » pléthorique (Ambroise Mamba)

L’affaire fait grand bruit sur la toile. Le ministère de la Justice demande au trésor public plus de 2.000.000 USD pour rémunérer sept (7) cabinets d’avocats chargés de défendre les intérêts de la République dans le procès intenté contre l’ancien président Joseph Kabila. La polémique a éclaté lorsque la répartition des honoraires a révélé que chaque cabinet toucherait près de 400.000 USD.  

Un scandale financier, dans un pays où la population peine à survivre, où les infrastructures routières, l’éducation et la santé publique sont en déliquescence. Pourtant, malgré l’indignation générale, aucune mesure n’a été prise pour revoir ces montants à la baisse.

Coupable indifférence collective 

Les priorités sociales de la RDC ne semblent émouvoir personne. Du sous-gestionnaire des crédits du ministère de la Justice jusqu’aux bénéficiaires finaux, l’indifférence est totale. On dirait même une hypnose collective, tant il est difficile d’expliquer pourquoi un pays en crise accepte de dilapider ainsi ses ressources.

400.000 USD par cabinet, est-ce justifié ? Même si ces avocats étaient des « super-génies », la question demeure : faut-il dépenser autant dans un contexte de vaches maigres ? Un barème plus raisonnable aurait été préférable.

L’inutilité d’une défense civile pléthorique

Joseph Kabila est jugé par défaut pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et participation à un mouvement insurrectionnel. Il n’est pas présent, ni représenté par un avocat.

Dans ce cas, à quoi serviraient les sept (7) cabinets engagés ? 

La défense des intérêts de la République se résume essentiellement à une question : la réparation. Or, celle-ci repose sur un seul article du Code civil congolais (l’article 258).

Questions : Fallait-il sept (7) cabinets d’avocats pour un seul article de loi ? Était-il nécessaire de saigner le Trésor public pour réclamer des réparations concernant l’occupation du Nord-Kivu et du Sud-Kivu ? La réponse est évidente : cette défense civile pléthorique est inutile. Elle semble cacher une exagération barémique avec pour intention de dilapider les ressources de l’état.

Une gestion rigoureuse des finances publiques aurait exigé un ou deux cabinets au maximum.

L’exemple décourageant du procès des 100 jours  

L’affaire Vital Kamerhe devrait servir de leçon. Deux éminents avocats, Dieudonné Kaluba et Coco Kayudi, avaient perçu plus de 200.000 USD pour défendre les intérêts de l’État. Les résultats sont connus. Kamerhe a été acquitté en appel, et la République n’a rien récupéré.

Pendant ce temps, les avocats, eux, ont empoché leur fortune. Un précédent qui rend d’autant plus incompréhensible la décision d’engager sept cabinets pour le procès Kabila.

Conclusion 

Ceci devrait constituer une opportunité de bonne gouvernance. Le procès Kabila se déroule par défaut, ce qui simplifie la tâche des parties civiles. Plutôt que de gaspiller des millions en honoraires d’avocats, ce dossier aurait dû être l’occasion: d’un changement de mentalité dans la gestion des fonds publics; d’un signal fort montrant que les dirigeants servent le peuple, et non leurs intérêts.

Hélas, l’occasion est ratée. Une fois de plus, les priorités semblent ailleurs.

Ambroise Mamba Ntambwe

Journaliste et chercheur en sciences

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