Vital Kamerhe, ancien directeur de cabinet du président de la République et président du parti politique UNC, regagne bientôt le pays après un séjour de quelques semaines en Europe. Les observateurs font remarquer qu’il n’a certainement pas manqué l’occasion de rencontrer le chef de l’Etat qui vient également de séjourner en Belgique d’abord pour un séjour privé, avant de prendre part au Sommet sur l’adaptation climatique en Afrique à Rotterdam (Pays-Bas) le 5 septembre. Quant au contenu de leurs entretiens, rien n’en a filtré, mais le décryptage ne pose pas mystère à une année et demi de la présidentielle.
Dans la foulée de sa rentrée politique, Vital Kamerhe, président national du parti politique Union pour la nation congolaise (UNC), avait annoncé son intention de conduire une «caravane de la paix» dans les provinces de l’Est de la République Démocratique du Congo en proie à une agression étrangère au Nord Kivu par l’armée rwandaise camouflée derrière la rébellion du M23. Une coalition qui occupe la cité de Bunagana depuis six semaines.
Mais aussi en Ituri où sévissent les rebelles ougandais des ADF qui s’adonnent à des exactions meurtrières en dépit de l’instauration de l’état de siège dans cette province depuis 16 mois. Le Sud-Kivu non plus n’est pas épargné. Les hauts plateaux de Mwenga-Fizi voient s’affronter des groupes mai-mai aux insurgés Banya-mulenge dont certains bénéficient de l’appui de miliciens burundais des Imbonerakure.
C’est donc dans la perspective «d’apporter sa contribution à la recherche de la paix» que Kamerhe entreprend à partir de lundi 12 septembre un périple qui devrait le conduire à Goma et Butembo (Nord-Kivu), Bukavu, Uvira (Sud-Kivu) et à Bunia (Ituri).
En pré-campagne pour FATSHI
Etant quasiment acquis que Vital Kamerhe n’a pas exprimé à ce jour l’ambition de briguer la présidence de la République, il va de soi que sa tournée annoncée revêt des allures d’une campagne en faveur de son allié Félix Tshisekedi.
Dès lors, il est hors de question de laisser le champ occupé jusqu’à une date récente par Jean-Pierre Bemba. Le leader du Mlc qui vient de parcourir quelques villes et localités de l’ex-province de l’Equateur battant ouvertement campagne pour le candidat déclaré de l’Union sacrée à la présidence de la République. Une région sillonnée régulièrement par d’autres leaders natifs de l’Equateur (à l’instar du ministre Guy Loando) qui s’arrogent également la paternité d’une campagne pro-Tshisekedi, même si la démarche n’est pas particulièrement appréciée par les sympathisants du MLC/Equateur.
«Un important rôle à jouer» pour Kamerhe
Est-ce à dire que la tournée qu’entreprend Vital Kamerhe sonne les prémices du «rôle important qu’il est amené à jouer dans ce pays», selon les termes mêmes du chef de l’Etat prononcés, alors que l’intéressé était sous les verrous, poursuivi pour le détournement de plus de 50 millions de dollars US du Programme dit de 100 jours ?
Il n’est pas risqué de répondre par l’affirmative. Le ton en a été donné quand, au lendemain de sa rentrée politique, il était aperçu dans les salons de la Cité de l’Union africaine pendant que le chef de l’Etat recevait l’ancien président nigérian Olusegun Obasanjo. Après son aparté avec l’envoyé de l’Union africaine, des spéculations en tout genre avaient enflammé la toile. Certains le voyant déjà à la Primature en lieu et place de Sama Lukonde proprement remercié, ou comme un plénipotentiaire en charge de … « la recherche de la paix» !
Entre Kamerhe et Bemba, Tshisekedi en maître des horloges a l’embarras du choix. Si le premier avance sans précipitation ses pions, étant le seul à se faire une idée exacte de son proche avenir politique, le second, pour sa part, semble mettre à profit son influence croissante auprès du chef de l’Etat pour conforter et fructifier ses affaires au prix de procès gagnés contre des structures étatiques indélicates.
Au fur et à mesure que le temps s’égrène et qu’approchent les échéances électorales, il viendra le moment où le candidat Tshisekedi devra se déterminer entre les deux hommes. Tant il est évident que les deux lions ne peuvent guère prospérer sur la même colline.
Revisiter l’Accord de Nairobi
Revenu en force au sein du sérail, il est patent que Kamerhe et Tshisekedi, liés par l’Accord de Nairobi, doivent tôt ou tard revisiter l’essence même de cette alliance électorale à l’origine du Cap pour le Changement (CACH). Il va donc de soi que le Front Commun pour le Congo (FCC), ayant perdu sa majorité parlementaire et en état de mort cérébrale, l’existence de CACH ne se justifie plus.
Quitte dès lors à redéfinir les traits d’une nouvelle alliance au sein de laquelle Kamerhe jouerait les grands rôles en dépit de l’animosité que lui vouent certains proches conseillers de Félix Tshisekedi du fait non seulement de son acquittement, mais aussi de leur perte d’influence au moment où l’opinion en général fustige leur train de vie, auquel leur patron, excédé, serait immanquablement amené à mettre un terme. Et sans ce cas, il est aisé d’imaginer qui en recueillerait les avantages.
Avec ces deux poids lourds de la scène politique congolaise, Félix-Antoine Tshisekedi est en train de préparer sa victoire à la prochaine présidentielle. Le Président de la République sait qu’il doit ratisser le plus largement possible pour que sa victoire soit éclatante. Une victoire contestée ne servirait pas les intérêts de celui qui a été accusé d’avoir » volé » la victoire de Martin Fayulu. La très sérieuse Eglise catholique a été la première à monter au créneau. Vital Kamerhe dans l’Est, Jean-Pierre Bemba dans l’Ouest, le Président-candidat, lui-même ayant en sa faveur son fief du Centre, ne manquerait plus que le Sud-Est minier pour boucler la boucle. Le Premier ministre, Jean-Michel Sama Lukonde, devait en principe aider le Chef de l’État dans la bataille du Grand Katanga.
Econews
