Entre la majorité au pouvoir et la Commission électorale nationale indépendante (CENI), les violons ne semblent pas s’accorder. Les deux partenaires au processus électoral n’émettent pas sur une même longueur d’ondes sur plusieurs dossiers. Avec le Gouvernement, des fonds destinés au budget opérationnel tombent à compte-gouttes. On apprend que la dernière cagnotte transmise à la CENI remonte à mars. Pas un sou ne lui a été alloué pour les mois d’avril et mai 2022. Bien plus, la CENI se montre réticente face à la ferme volonté du Gouvernement d’actionner les opérations de recensement et identification de la population, concomitamment à celles de l’enrôlement des électeurs. Des indiscrétions parvenues à Econews rapportent que le Gouvernement a décidé de s’allier avec une firme ouest-africaine pour la mutualisation des opérations de recensement- identification et enrôlement des opérations. Un montage financier qui rencontre une sérieuse résistance de la CENI. Peu coopératif à un pouvoir qui pensait le tenir en laisse, le président de la CENI, Denis Kadima, se prépare à traverser une zone de très fortes turbulences.
A Kinshasa, l’attention est tournée vers les visiteurs de marque qui ont décidé d’honorer la République Démocratique du Congo : le roi des Belges et le pape François. Deux temps forts, deux rendez-vous importants pour une République qui peine à retrouver une vie normale après autant d’années de déstabilisation sur tous les plans.
C’est pendant cette même période que le Rwanda se fait signaler par des actions de déstabilisation détournant l’attention de tout le monde vers la protection et la défense du territoire national, une question d’intérêt majeur.
Pendant ce temps, il se passe des choses difficilement acceptables en temps normal comme cette reprise de la mutualisation des actions de la CENI, de l’ONIP et de l’INS. Les trois cycles électoraux connus par le pays n’ont pas pu sortir le pays du tunnel. Bien au contraire ! Ce quatrième cycle, que tout le monde attend, est considéré comme la consolidation des acquis!
Le président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), Denis Kadima, est clair sur le sujet. « Il n’y aura plus d’élus nommés par le jeu des combinaisons frauduleuses», avait-il annoncé lors d’une récente rencontre avec les forces sociales. Cet engagement est de nature à rassurer. Il est aussi de nature à permettre une meilleure compréhension de ce qui se passe et d’établir le cas échéant les responsabilités des uns et des autres par rapport à ce qui risque d’arriver.
Il y a d’abord ce projet de mutualisation des opérations. Pour le Gouvernement, il s’agit d’une question de vie ou de mort parce que des intérêts financiers importants sont en jeu. Certains invoquent des indices de détournements, si pas, une volonté de glissement du calendrier électoral. D’où, il est régulièrement constaté que la CENI n’est pas disposée à se laisser entraîner dans une opération de violation de la Constitution quand au délai à tenir pour organiser les élections dans le pays.
Pour le moment, la CENI fait de la résistance en exigeant au gouvernement de financer les élections comme convenu. Dans les rangs de la majorité au pouvoir, Denis Kadima devient agaçant et commence à gêner. Son discours ne plait plus.
Pour le lui faire savoir, le Gouvernement n’accélère pas le rythme de libération des fonds pour les opérations préélectorales. Il y a déjà deux mois et demi de retard dans la sortie des fonds en faveur de la Centrale électorale. La CENI ne se plaint pas encore, mais cela ne va plus tarder.
A l’interne, le secrétaire exécutif national de la CENI se comporte comme un potentat, prenant des engagements au nom de la Centrale électorale sans respecter les procédures, rapportent plusieurs témoignages. Dans ces conditions, il apparaît clairement que sans une requalification des approches, la CENI va droit dans une zone de fortes turbulences, hypothéquant la bonne organisation de prochains scrutins de 2023.
Que cache cet acharnement?
En réalité, certaines forces du pouvoir voudraient que ces opérations de mutualisation soient financées à travers un partenariat public-privé (PPP) dont l’acteur principal est déjà connu par eux. Cet opérateur, qui pourrait, selon des indiscrétions, venir de l’Afrique de l’Ouest, est, apprend-on, disposé à apporter le financement de certaines opérations qui seront mutualisées. En même temps, il est acquis que le Trésor public sortira des fonds pour les mêmes opérations.
Serait-ce cette raison qui a pousse le Gouvernement à ne pas reculer ? Nul ne peut le confirmer. Mais, cela reste une hypothèse plausible dans un contexte des urgences d’organisation des élections qui ne pouvaient souffrir de ce type de manœuvres dilatoires.
La dissociation des opérations électorales d’avec le recensement de la population est une exigence qui s’impose à tous. Ces stratagèmes, qui tendent à tout faire au même moment, en alignant simultanément le recensement et l’identification de la population à l’enrôlement des électeurs, ne participent pas à la crédibilisation du processus électoral. Une fois de plus, ils jettent un discrédit total, avec des risques évidents des violences pré et post-électorales.
Entre le Gouvernement et la CENI, on n’est plus loin d’un langage des sourds.
Econews