Coup dur pour les opérations militaires, dites « conjointes et concertées », que les Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) mènent dans la partie Est, avec l’appui des troupes ougandaises. A Kampala, l’intervention des militaires ougandais sur le sol congolais dans la traque des rebelles de l’ADF passe pour une pullule amère. Le Parlement ougandais a refusé d’accorder des fonds à son armée pour continuer ces opérations. Les députés ougandais ont posé un préalable avant de faire sauter le verrou : être informé de ce que font les troupes ougandaises en RDC et ce que gagne leur pays avant d’engager des fonds publics dans ces opérations.
Trois mois après le lancement des opérations militaires dans l’Est de la République Démocratique du Congo, lancées conjointement entre la RDC et l’Ouganda, Kinshasa serait peut-être obligé de revoir ses calculs. A Kampala, les députés ougandais ont posé leur veto, bloquant l’initiative du gouvernement de solliciter des fonds pour financer ces opérations. Les députés ougandais exigent de Kampala des explications nécessaires sur la présence des troupes ougandaises en République Démocratique du Congo (RDC).
La Commission du budget du Parlement ougandais a décidé mardi de suspendre les allocations aux opérations de l’armée ougandaise dans l’Est de la République Démocratique du Congo, jusqu’à ce que le corps législatif soit informé de l’opération, a rapporté la presse locale et un compte rendu du Parlement parvenu à l’Agence Anadolu. Les troupes ougandaises sont déployées en RDC, depuis fin novembre 2021.
Le ministère ougandais de la Défense a sollicité 89,7 milliards de shillings (environ 25 millions USD) pour financer les opérations, mais les députés ont déclaré que le Parlement devait être informé avant d’engager des fonds publics dans l’opération.
«Pendant le déploiement de l’armée, le Parlement a été contourné. Nous ne savons pas combien de bataillons se trouvent au Congo. Nous sommes en droit de connaître la stratégie de sortie et les rapports sur les pertes de notre côté», a déclaré le chef de l’opposition, John Baptist Nambeshe.
«Quand nous avons demandé un briefing, ils ont dit que nous n’avions rien à faire avec le Parlement; maintenant, pourquoi viendraient-ils au même Parlement pour de l’argent ? Pour moi, ma proposition est que cela devrait attendre jusqu’à ce que nous soyons informés », a déclaré le député, Ibrahim Ssemujju, emboîtant le pas au chef de file de l’opposition au Parlement.
Le président de la Commission du budget au Parlement ougandais, Patrick Isiagi Opolot, a approuvé les arguments de ses collègues. «Avant de présenter une proposition de financement, nous devons être informés [et vous devez faire un rapport] sur les défis rencontrés », a-t-il déclaré.
Les députés ont, également, plaidé en faveur d’une augmentation de la solde des militaires ougandais, qui, selon eux, pourrait s’avérer utile, compte tenu de l’augmentation du coût de la vie.
La solde des miltaires ougandais a été augmentés pour la dernière fois, en 2014. La rémunération mensuelle actuelle d’un soldat au rang de simple soldat est de 485.000 Shs (140 USD).
Les opérations conjointes de l’armée ougandaise et des forces armées de la République Démocratique du Congo ciblent les rebelles des forces démocratiques alliés (ADF), auteurs du massacre de plusieurs milliers de civils dans la province du Nord-Kivu (principalement le territoire de Beni) et celle de l’Ituri. Les deux provinces congolaises sont frontalières avec l’Ouganda.
L’Ouganda a désigné les ADF comme responsables d’un double attentat-suicide ayant fait trois morts et 33 blessés à Kampala en novembre 2021, trois semaines après deux attaques à la bombe dans la capitale, elles aussi attribuées aux rebelles.
Depuis avril 2019, certaines de leurs attaques sont revendiquées par l’organisation Etat islamique qui désigne le groupe comme sa «province d’Afrique centrale». En mars, les Etats-Unis ont placé les ADF parmi les «groupes terroristes» affiliés à Daech.
Les ADF sont à l’origine d’une coalition de groupes armés ougandais, dont les plus importants étaient opposés au régime du Président Yoweri Museveni.
Ils sont installés dans l’Est de la République Démocratique de Congo depuis 1995. Le déploiement des troupes ougandaises a été précédé par la proclamation de l’état de siège depuis le mois de mai 2021 dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri. Cette mesure a consacré la gestion politique et administrative de ces provinces, de leurs villes et territoires par des officiers supérieurs de l’armée et de la police.
Elle reste critiquée pour son bilan mitigé, marqué notamment par l’accroissement du nombre de victimes et des atrocités. Les Nations Unies qui disposent d’une mission de maintien de la paix en RDC depuis plus de 20 ans ont refusé de participer aux opérations, mais ont déclaré surveiller le respect des droits de l’Homme.
Econews avec Agence Anadolu