En 1970, un Congolais, en avance sur son temps, lance, à partir de son village Katanga, dans un coin perdu de la province, un ambitieux projet de production énergétique par la création de la toute première centrale solaire du pays. Son nom : Fabien Monga Katanga. Plus d’un demi-siècle après c’est son fils, Eric Monga Mumba, aux commandes d’une entreprise, Kipay Energy, qui s’inscrit dans la vision de son père, c’est-à-dire produire de l’énergie propre dans la province du Haut-Katanga. Avec son projet hydroélectrique Sombwe, développé sur la rivière Lufira, dans le territoire de Mitaba, Eric Monga voit grand, très grand. Comme son père, précurseur en son temps dans un secteur où seul l’Occident avait le monopole, Eric Monga veut briser le mythe et prouver que les Congolais sont prêts à se prendre en charge pour bâtir un pays plus beau qu’avant. De père en fils, dans la lignée Monga, investir dans l’électricité verte est une passion.
Dans le cadre de sa visite d’État en République Démocratique du Congo, le couple royal belge s’est rendu, samedi dernier, dans le village Katanga, situé dans la province du Haut-Katanga. Cette région renferme de très riches gisements de minerais, nécessaires à la transition énergétique mondiale. C’est aussi une région qui souffre d’un déficit criant en électricité avec un taux d’accès d’à peine 1%. Le développement de l’immense potentiel énergétique de la province représente ainsi un enjeu majeur pour le développement durable économique, environnemental et social de la région et une opportunité pour des investisseurs congolais et étrangers.
C’est précisément dans le village Katanga que l’une des premières centrales solaires du pays a vu le jour dans les années 1970. Elle a été développée, en partenariat avec l’Université de Mons et l’Université de Lubumbashi, par un fils du village, Fabien Monga Katanga. Aujourd’hui, c’est son fils Eric Monga Mumba, qui poursuit l’ambition de son père en misant sur l’énergie hydraulique et solaire pour contribuer à la résorption du déficit énergétique et au développement durable de sa région natale.
Un potentiel énergétique vert largement inexploité
La RDC regorge d’immenses réserves énergétiques grâce à une ressource hydrologique et solaire abondante. Le pays possède suffisamment de potentiel énergétique pour alimenter en électricité les trois quarts du continent africain. Le potentiel d’énergie hydraulique représente plus du tiers du potentiel total africain et près de 6% du potentiel hydroélectrique mondial et se traduit par une puissance exploitable d’environ 100.000 MW. Aujourd’hui, ce potentiel n’est exploité qu’à 2 %.
L’énergie solaire offre elle aussi un potentiel remarquable pour alimenter des mini-réseaux de distribution électrique. Le Haut-Katanga possède un fort potentiel avec un niveau d’ensoleillement qui atteint en moyenne 5 kWh/m²/jour, voire au-delà de 6.75 kWh/m².
La libéralisation du secteur de l’électricité par l’État congolais en 2014 représente une opportunité pour le secteur privé d’investir massivement dans les énergies renouvelables et de contribuer ainsi à l’électrification de la RDC et au développement économique et social durable du pays.
Les gisements de minerais, vecteur de développement socio-économique
Le Haut-Katanga dispose d’importantes et de diverses réserves en minerais dits verts qui permettront l’abandon de l’énergie fossile. La RDC est le premier producteur mondial de cobalt, une matière première stratégique pour l’industrie automobile, et le premier producteur africain de cuivre. Selon la Banque mondiale, la production de minéraux pourrait augmenter de près de 500 % d’ici à 2050 pour répondre à l’augmentation de la demande mondiale de technologies énergétiques propres. La RDC deviendra ainsi un fournisseur clé dans cette transition énergétique mondiale.
La RDC se positionne d’ores et déjà comme «pays solution» et prévoit de développer une chaîne de valeur régionale autour de l’industrie des batteries, des véhicules électriques et des énergies propres. Un objectif conforté par une étude de BloombergNEF qui affirme qu’il sera trois fois moins cher d’installer une usine de ce type en RDC, qu’aux Etats-Unis ou en Chine.
Le développement du secteur nécessite toutefois de l’énergie électrique. Le développement du secteur d’énergie renouvelable va ainsi de pair avec le développement du secteur des minerais vert.
L’énergie renouvelable pour un développement durable du Haut-Katanga – une ambition transmise de père en fils et née dans le village Katanga
Katanga (qui a donné son nom à la province) a été l’un des premiers villages en RDC à développer un projet d’énergie solaire. C’est dans les années 1970 que Fabien Monga Katanga (fils d’un prince de Katanga et d’une princesse de Pande), en partenariat avec l’Université de Mons et l’Université de Lubumbashi, a installé une centrale solaire photovoltaïque dans son village. L’implantation a été installée sur un champ d’un demi-hectare et destinée à fournir en électricité les villageois au travers d’une école et d’une centre de santé. Il s’agissait d’un projet précurseur et avant-gardiste à l’époque qui a marqué l’histoire du village Katanga.
Suite aux troubles politiques qui ont secoué la région au cours des années 1970 et la disparition de Monga Katanga, le projet pourtant achevé, n’a pas pu s’inscrire dans la durée. Mais la mémoire reste vive et l’héritage demeure au travers d’Eric Monga Mumba, fils de Monga Katanga.
Il s’en souvient : «Enfant, j’ai visité la centrale solaire photovoltaïque construite par mon père. Cela m’a marqué. Et c’est des décennies plus tard, que moi aussi, je m’investis dans le secteur des énergies renouvelables ».
Eric Monga Mumba est aujourd’hui à la tête de Kipay Energy qui développe actuellement le projet hydroélectrique de Sombwe sur la rivière Lufira, dans le territoire de Mitwaba de la province du Haut-Katanga. Une centrale solaire complètera le dispositif pour assurer un approvisionnement stable en énergie.
Sombwe fournira de l’énergie propre aussi bien aux acteurs économiques de la région qu’aux populations des villages avoisinants qui vivent pour la plupart sous le seuil de pauvreté. La centrale aura une puissance de 160 MW. L’énergie produite permettra une résorption d’environ 10% du déficit en électricitéì du Grand Katanga, une production de l’équivalent de 300.000 tonnes de cuivre, l’éclairage de 100.000 foyers et la création de plus de 4.000 emplois directs et indirects durant les quatre ans de construction.
L’engagement de Kipay Energy a d’ores et déjà un impact réel sur la vie de ces populations : création d’emplois, formations, soutien à l’autonomisation des agriculteurs, installation d’infrastructures vitales tels que des puits d’eau donnant accès à l’eau potable et des routes désenclavant les villages.
Le secteur de l’énergie – une opportunité pour renforcer la coopération économique entre la Belgique et la RD Congo
Dans un entretien accordé à RFI, Thomas Dermine, secrétaire d’État belge pour la relance et les investissements stratégiques, partage son appréciation de futures relations entre la Belgique et la RDC : «Nous voyons le Congo avant tout comme une grande puissance économique à devenir, comme un partenaire commercial […]. Et donc moi j’inscris résolument les relations entre la Belgique et le Congo dans ce cadre, et dans l’optique de construire les bases d’une relation d’amitié partagée et qui aura des bases importantes pour la prospérité de nos deux pays ».
Dans cette perspective, le secteur de l’énergie représente une opportunité majeure pour renforcer la coopération économique entre nos deux pays, à l’instar de la centrale solaire du village Katanga, fruit d’un partenariat entre une université belge et une université congolaise.
Econews avec Kipay Actualités