Saisi dans l’affaire opposant Jean-Pierre Bemba Gombo, leader du Mouvement de libération du Congo (MLC) à la Régie des voies aériennes (RVA) et la République Démocratique du Congo pour « sa flotte détruite et le manque à gagner dû à l’immobilisation de ses avions pendant une période de 11 ans », le Tribunal de grande instance de Kinshasa/Gombe (TGI/Gombe) a rendu, le 2 septembre 2021 son verdict condamnant solidairement la RVA et la RDC à « payer au demandeur (Ndlr : Jean-Pierre Bemba Gombo) la somme de 17.239.000 Usd représentant sa flotte détruite ; la somme de 3.168.000 Usd représentant le manque à gagner dû à l’immobilisation de ses aéronefs ; la somme de 1.000.000 Usd à titre de dommages-intérêts pour tous préjudices subis ». Tout compte fait, c’est plus de 20 millions Usd que la RVA et la République doivent au leader du MLC. Dans les rangs de la défense, on crie à une injustice, pour autant que, devant le tribunal, le demandeur s’est retrouvé dans l’incapacité de prouver le lien de propriété sur les aéronefs mis en cause. Pire, la défense considère que le TGI/Gombe devait se déclarer incompétent dans un dossier relevant en principe du Tribunal de commerce. Ce qui soulève de vives interrogations : Bemba aurait-il bénéficié, via cette condamnation, d’une prime politique par le fait de son soutien à l’Union sacrée de la nation ? A la défense, on est convaincu d’une chose : la politique a eu raison sur le droit !
Une décision judiciaire vient de tomber en faveur de Jean-Pierre Bemba Gombo, président du Mouvement de libération du Congo (MLC), un parti de la constellation Union sacrée de la nation (USN), actuellement au pouvoir en République Démocratique du Congo.
Depuis quelque temps, il se constate une certaine distance entre Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi, leader d’Ensemble pour la République. Lors des négociations dans le cadre des consultations initiées par le Chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi, le duo avait fait front afin d’obtenir la fin du système Kabila. Leur cahier des charges semblait être rédigé conjointement. Mais depuis quelque temps, on n’a pas besoin de loupe pour se rendre compte que le duo n’existe plus.
La dernière sortie médiatique du président d’Ensemble pour la République, le très populaire Moïse Katumbi, a démontré aux sceptiques que les deux hommes ne partagent plus les mêmes objectifs. Entre Bemba et Katumbi, il n’y a plus de convergences dans le combat politique. Les signaux d’éloignement sont bien visibles.
Dommages et intérêts ou prime?
C’est curieusement en ce moment où le président-candidat Félix Tshisekedi Tshilombo se cherche des alliés pour sa victoire à un second mandat que le Chairman du MLC se voit gagner des procès en cascade, comme celui l’opposant à la Régie des voies aériennes (RVA) et la République Démocratique du Congo, en rapport avec la destruction, il y 11 ans, de ses aéronefs, sur une décision de l’Etat congolais, exécutée par la RVA.
Avec le jugement rendu, le 2 septembre 2021, par le tribunal de grande instance de Kinshasa/Gombe, dont Econews a pu consulter une copie, le leader du MLC a bénéficié d’une condamnation obligeant solidairement la RVA et la RDC à lui payer une bagatelle de plus de 20 millions Usd, représentant sa flotte détruite, l’immobilisation de ses aéronefs détruits et tous les préjudices subis.
A la défense, la décision du TGI/Gombe a soulevé un tollé général. On crie à un déni du droit, pour autant, affirme-t-on, le leader du MLC s’est retrouvé, tout au long du procès, à prouver le droit de propriété des aéronefs mis en cause, exploités dans le temps par l’entreprise Coza, sans lien avec lui. Pire, la défense estime que cette affaire ne relevait pas de la compétence du TGI/Gombe qui devait, si le droit était respecté, se déclarer incompétent et renvoyer l’affaire devant le tribunal de commerce.
Qu’est-ce qui s’est donc passé ? Qu’est-ce qui a finalement joué en faveur du leader du MLC ? Difficile à dire.
Toujours est-il que, dans les milieux judiciaires, on estime que le jugement du TGI/Gombe est considéré comme une prime d’allégeance versée au chef du MLC sans que personne ne crie à la corruption.
La signification du jugement, consultée par Eco-news, est exhibé comme la preuve parfaite de ces faveurs « suspectes » au bénéfice de Jean-Pierre Bemba.
Le droit à rude épreuve
Un juriste proche du dossier, qui a préféré garder son anonymat, ne cache pas sa déception : « Ce jugement n’honore pas ceux qui l’ont rendu. C’est une décision politique bidon. Les avions réclamés par Bemba ne sont pas immatriculés à son nom, mais à celui d’une société, dénommée COZA. Comment Bemba peut-il agir en réclamation de biens qui ne sont pas à son nom? Comment justifier qu’une indemnisation d’un préjudice commercial soit prononcée par un juge civil ? »
Il va plus loin : « Comment imaginer que le juge civil censure les décisions prises en Conseil des ministres et mises en œuvre par notification administrative du ministre des Transports? » Et de poursuivre : «En réalité, ce montage grossier aurait dû être fait devant le Conseil d’Etat en réparation de préjudice exceptionnel, en application de l’article 155 de la Constitution. Pour conclure, en confiant notre destin judiciaire à des magistrats incompétents et corrompus, nous faisons le choix volontaire de franchir la ligne rouge de notre suicide ».
Econews