L’armée russe est entrée en action contre l’Ukraine sur plusieurs fronts simultanés, jeudi vers 4 heures du matin. L’invasion tant redoutée et sans doute le pire conflit en Europe depuis 1945 a débuté. Les condamnations sont unanimes du côté des Occidentaux. L’intervention militaire de la Russie en Ukraine a ouvert un nouveau chapitre de la crise à l’échelle mondiale, rallumant la flamme de la guerre froide entre la Russie et le bloc occidental. Face à la fermeté de Vladimir Poutine, le conflit est devenu mondial.
Un jour sombre pour l’Europe. L’armée russe a commencé l’invasion de l’Ukraine sur plusieurs fronts aux alentours de 4 heures ce jeudi matin. L’offensive est fulgurante, puisque moins de 2 heures après son déclenchement à base de bombardements massifs par avions, missiles de croisière et balistiques, des troupes au sol progressaient vers plusieurs villes ukrainiennes, Odessa, Karkhiv, la plus grande ville orientale du pays, ou depuis la Crimée, au sud.
L’aéroport de Kiev aurait été pris par des forces russes aéroportées. Des lignes de défense ukrainiennes semblent enfoncées, et la marine du pays, réduite il est vrai à une simple frégate, serait anéantie. Un assaut amphibie est en cours près de Marioupol, plus grand port oriental de l’Ukraine, ainsi que tout le long de la côte de la mer d’Azov et en mer Noire.
Le président russe Vladimir Poutine a annoncé, dans la nuit du mercredi, le début d’attaques militaires en Ukraine, assurant ne viser que des sites militaires. Il assure ne pas vouloir d’«occupation» de l’Ukraine, mais sa «démilitarisation», et promet «des conséquences que vous n’avez encore jamais connues» à ceux «qui tenteraient d’interférer».
La Russie dit avoir détruit les bases aériennes et la défense antiaérienne ukrainiennes, après de nombreux tirs de missiles. L’Ukraine, qui a fermé son espace aérien, dit avoir subi des «bombardements intensifs » sur tout son territoire, selon son commandant en chef. Des responsables ukrainiens font état d’un début d’invasion terrestre à la frontière avec la Biélorussie et depuis la Crimée annexée.
Poutine a d’ores et déjà averti : «Ceux qui tenteraient d’interférer avec nous, de menacer notre pays ou notre peuple, ils doivent savoir que la réponse de la Russie sera immédiate et conduira à des conséquences que vous n’avez encore jamais connues».
En Ukraine, où la loi martiale a été déclarée, le président, Volodymyr Zele-nsky, a appelé la population au calme. «Nous sommes en train de bâtir une coalition anti-Poutine. Le monde doit contraindre la Russie à la paix», a-t-il dit après des discussions avec les dirigeants américain, britannique et allemand.
Les réactions diplomatiques se sont multipliées : le président des Etats-Unis, Joe Biden, a dit que «la Russie est seule responsable de la mort et de la destruction que cette attaque entraînera», tandis qu’Emmanuel Macron a demandé la fin immédiate des attaques. Les ambassadeurs des trente pays membres de l’OTAN vont se réunir en urgence jeudi, tout comme les membres de l’Union européenne, qui avaient averti que des sanctions «massives» contre Moscou seraient prises en cas d’attaque de l’Ukraine.
L’OTAN désarmée, Washington embarrassé
Pour l’instant, une intervention militaire de l’OTAN (Organisation du traité de l’Atlantique Nord) est presqu’exclue. En effet, l’Ukraine ne fait pas partie de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), une alliance politico-militaire dont les membres s’engagent à se protéger mutuellement en cas d’attaque. Une intervention directe de l’Alliance atlantique sur le territoire ukrainien n’est donc pas envisageable. Concrètement, plusieurs pays fournissent du matériel militaire à Kiev, mais aucun n’enverra de troupes combattre sur son sol. Les sanctions économiques constituent un autre levier d’action pour faire pression sur Vladimir Poutine.
Tout comme, une intervention militaire paraît presqu’improbable. Non impliquée directement dans le conflit ukrainien, l’intervention américaine risque plutôt d’envenimer le conflit et le transformer en une guerre mondiale aux conséquences désastreuses. Une situation embarrassante autant pour l’OTAN que les Etats-Unis.
Quelles sont les sanctions que risque la Russie ?
Les Etats membres de l’Union européenne (UE) ont annoncé une première série de sanctions mardi. Ces mesures visent d’une part des responsables politiques russes – désormais interdits de visa dans l’UE, où leurs avoirs seront gelés – et d’autre part des banques impliquées dans le financement des séparatistes prorusses – qui ne pourront plus émettre ou échanger des obligations sur les marchés européens. L’Allemagne a porté le coup le plus symbolique : le chancelier, Olaf Scholz, a annoncé mardi suspendre l’autorisation de Nord Stream 2.
En accord avec leurs alliés européens, les Etats-Unis ont choisi de couper les financements occidentaux de la Russie. Concrètement, Moscou ne peut plus lever de fonds aux Etats-Unis ou en Europe, et ses nouvelles émissions de dettes ne peuvent plus être négociées sur les marchés financiers américains ou européens. Deux banques publiques russes sont également visées – la Vnesheconombank et la Promsvyazbank
Ces sanctions devraient avoir des conséquences limitées. En tout cas, certainement pas au point de faire fléchir Vladimir Poutine. Il faut rappeler ici que les représailles décidées contre le Kremlin s’inscrivent dans une stratégie de graduation : en cas d’escalade russe, les Occidentaux se réservent la possibilité de mener des actions supplémentaires.
Jeudi matin, à la suite du lancement de l’opération militaire russe en Ukraine, Josep Borrell, le chef de la diplomatie de l’UE, a déclaré que les Vingt-Sept préparaient un nouveau train de sanctions, soulignant que ce serait le «plus sévère jamais mis en œuvre».
La Chine se tient à l’écart
Pékin a exhorté jeudi toutes les parties à la «retenue», se refusant toutefois de décrire l’attaque militaire russe comme une «invasion». «La Chine suit de près les derniers développements», a précisé une porte-parole du ministère des affaires étrangères chinois.
La Chine est sur une ligne de crête diplomatique dans cette crise ukrainienne. Elle ne souhaite pas s’opposer frontalement à la Russie, pays ami avec lequel elle partage certaines vues, comme une opposition à un élargissement de l’OTAN. Mais Pékin ne souhaite pas non plus apparaître comme soutenant une invasion de l’Ukraine, ni donner le sentiment d’être systématiquement en accord avec son partenaire russe.
Quelles sont les forces militaires en présence dans les deux camps ?
Les affrontements démarrent en Ukraine après l’annonce d’une intervention par Vladimir Poutine. Sur place, le rapport de force semble défavorable à l’Ukraine.
Par les airs, mais aussi au sol et par la mer… L’offensive russe démarre ce jeudi en Ukraine, après l’annonce de Vladimir Poutine d’une intervention militaire. De l’ouest du pays, à Lviv, comme à Kiev, la capitale, ou à Kharkiv, plus proche du front de l’est, des explosions sont entendues dans plusieurs grandes villes du pays.
Sur place, le rapport de force militaire semble très favorable à la Russie qui rappelons-le est la deuxième puissance armée du monde. Tout d’abord pour des raisons géographiques. Par ses kilomètres de frontières, mais aussi ceux de son allié biélorusse, la Russie peut encercler son opposant ukrainien. A l’ouest, en Transnistrie, l’armée russe a aussi placé des troupes dans la petite enclave russophone en Moldavie dont l’indépendance n’est reconnue que par le Kremlin. Au sud, sur la mer Noire, les Russes ont l’avantage sur l’eau.
Quant aux troupes, il y aurait près de 150.000 hommes côté russe rassemblés aux frontières de l’Ukraine et prêts à intervenir, depuis la Russie, la Biélorussie mais aussi en Crimée.
Un armement ukrainien moins renouvelé
Côté ukrainien, l’armée est sensiblement plus nombreuse en nombre, mais avec des équipements bien moins modernes. L’armement des hommes du président Zelensky date en partie de la fin de la guerre froide, quand le pays faisait encore partie de l’Union soviétique. Des armes plus lentes, moins létales, donc. En revanche, avec l’introduction de la loi martiale par le chef de l’État Volodymyr Zelensky en Ukraine, le pays pourrait aussi compter sur la mobilisation de réservistes.
On estime également à 1200 le nombre de chars russes pré-positionnés ces derniers jours autour de l’Ukraine et prêts à intervenir. Face à eux, le chiffre n’est pas précis, mais on juge à quelques centaines les chars ukrainiens. Sur ce point-là aussi, l’armement russe est bien plus moderne.
Un seul navire de combat
Dans les airs, l’armée russe est capable de déployer plusieurs centaines d’avions, alors qu’on estime à 125 le nombre d’avions côté ukrainien, technologiquement moins avancés également. Lors des affrontements de 2014, l’Ukraine a perdu une bonne partie de son armement, sans être capable de s’équiper à nouveau depuis.
Via la mer Noire, les navires ukrainiens ne font pas le poids face au potentiel russe. L’armée de Vladimir Poutine peut mobiliser plusieurs navires de combat et six sous-marins. En face, l’Ukraine ne compte qu’un seul navire de combat.
Econews