En bouclant par la République Démocratique du Congo sa tournée en Afrique Centrale, le président français Emmanuel Macron savait qu’il venait dans un terrain miné, tout aussi imprévisible. Samedi en conférence de presse qu’il a co-animée avec son homologue congolais, Félix Tshisekedi, on a véritablement eu droit à une passe d’armes qui a tourné au pugilat. De commentaires en commentaires, les deux Chefs d’Etat se sont livrés à un véritable jeu de ping-pong qui augure – nous l’espérons – de nouvelles relations entre Kinshasa et Paris.
Devant la presse, Félix Tshisekedi, autant d’Emmanuel Macron, se sont pratiquement démarqué de code diplomatique qui oblige quelque fois à la retenue. Les deux chefs d’Etat se sont dits de vérités, sans porter de gants.
Et lorsque Macron évite nommément de citer le Rwanda, promettant à la RDC de s’impliquer pour un retard rapide de la paix dans l’Est, Félix Tshisekedi lui lance : «Les annonces du président Macron sont satisfaisantes, mais c’est encore théoriques, on attend la pratique ».
Félix Tshisekedi craint que la situation de crise dans l’Est n’oblige finalement la Céni à revoir le calendrier électoral. « Dans la partie Est, nous attendons que l’ordre et la sécurité reviennent pour ne pas impacter la date prévue pour les élections», a-t-il dit, répondant à une question de la presse.
Dans tous les cas, Emmanuel Macron s’est refusé à indexer le R wanda comme principal agresseur de la RDC. Il note cependant que les engagements politiques et humanitaires de la France sont « très clairs ». Avant de nuancer : « Mais, ce n’est pas la France qui va apporter la solution. J’espère ne pas avoir le sentiment de ne pas aller jusqu’aux sanctions ».
Quand Kinshasa exige de Paris une condamnation claire, Macron ne se retient pas : «N’accusez pas la France pour quelque chose qui dépend de vous »
Quant aux élections, prévues en décembre prochain, le chef d’Etat français a usé des mots justes : « Si on veut que les choses marchent, il faut partir avec la confiance et se donner les moyens de la confiance. Il faut qu’il y ait un processus de confiance qui soit mis en place, avec une clarté démocratique pour que les choses se déroulent normalement ».
Le président français est allé plus loin : « J’ai été très clair sur la condamnation et tous ceux qui le (Ndlr : le M23) soutiennent. La France est un soutien et un allié contre ce pillage et cette volonté de balkanisation de la RDC ».
Toujours est-il que Macron croit au processus sous-régional, mené avec l’accompagnement de Nairobi et de Luanda. « Il y a un processus qui avance. Je souhaite que ce plan régional, qui me paraît sérieux et crédible, aboutisse ». Et de promettre : « Si les engagements ne sont pas respectés, on peut alors envisager les sanctions ».
Paris s’accroche cependant à sa logique de non-ingérence : « Chacun doit prendre ses responsabilités, y compris le Rwanda.
Quoi qu’il en soit, le président Macron confirme sa vision pour l’Afrique. « Ma vision avec l’Afrique est de bâtir un nouveau partenariat ».
A son tour, Félix Tshisekedi s’est présenté en défenseur d’une Afrique qui veut pleinement s’assumer. « Nous voulons du respect. Pas de regard paternaliste», a-t-il lancé à son homologue français.
C’est à quoi Macron lui a répondu, sans broncher : « Je ne voudrai pas que de mal entendu s’installe. Il n’y a pas de double standard. Il n’y a pas irrespect. Ce n’est pas vrai. Quand un journaliste pose de questions, ce n’est pas la France ».
Dans tous les cas, la conférence de presse du palais de la Nation a permis à Kinshasa et Paris de se dire des vérités en face. C’est d’ailleurs sur un ton amical que le président Macron a terminé ce rendez-vous avec la presse : « On est ensemble!». Un engagement qu’il a décliné dans les quatre langues nationales de la RDC.
Econews