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Négociations à Doha, combats à Uvira : le double jeu périlleux dans l’Est de la RDC

Alors que des pourparlers de paix, soutenus par le Qatar et les États-Unis, reprennent discrètement à Doha entre le gouvernement congolais et la rébellion M23, les armes, elles, continuent de crépiter sans relâche autour de la ville stratégique d’Uvira, au Sud-Kivu. Cette contradiction frappante illustre le profond fossé entre les discours diplomatiques et la réalité meurtrière sur le terrain, plongeant les civils dans un cruel dilemme entre espoir ténu et crainte persistante.

Dans les salles climatisées de Doha, au Qatar, les représentants de Kinshasa et de l’AFC/M23 sont de nouveau autour de la table. Selon le ministère qatari des Affaires étrangères, les discussions, qui auraient officiellement repris le 20 août, se concentrent sur deux piliers fragiles : la mise en place d’un mécanisme de surveillance du cessez-le-feu et l’épineuse question de l’échange des prisonniers. Ce processus, soutenu techniquement par le Comité international de la Croix-Rouge et politiquement par les États-Unis, représente l’ultime tentative de donner une chance à la paix née de la Déclaration de principes signée en juillet.

Pourtant, à plus de 4.000 kilomètres de là, le son des armes lourdes assourdit une fois de plus les collines du Sud-Kivu. La trêve, si fragilement acceptée, vole en éclats aux portes d’Uvira, où les Forces armées de la RDC (FARDC) et les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda selon les experts de l’ONU, se livrent à de violents affrontements. Cette reprise des combats constitue un cinglant déni aux efforts des médiateurs et jette une ombre lugubre sur la crédibilité même des discussions à Doha.

Washington hausse le ton

Washington, architecte principal de l’accord-cadre entre le Rwanda et la RDC qui sert de base aux pourparlers, a récemment haussé le ton. Les États-Unis s’inquiètent de la poursuite des exactions contre les civils et appellent avec insistance toutes les parties à « respecter la trêve contenue dans la déclaration de principes signée à Doha ». Un appel qui, pour l’instant, semble tomber dans l’oreille de sourds alors que la population locale, prise en étau, subit les conséquences humanitaires désastreuses de ces combats.

Cette situation schizophrénique – parler de paix à Doha tout en faisant la guerre à Uvira – révèle les limites de la diplomatie face aux logiques militaires et aux agendas géopolitiques complexes qui dépassent largement les acteurs locaux. Pour de nombreux observateurs, le M23 utiliserait la pression militaire sur le terrain comme un levier pour obtenir des concessions maximales à la table des négociations.

Alors que les discussions se poursuivent dans le secret qatari, les habitants d’Uvira, eux, vivent au rythme anxiogène des bombardements et des déplacements précipités. Ils attendent, désemparés, un signe tangible que les mots prononcés à Doha puissent un jour se traduire par un silence durable des armes dans leur vallée. La communauté internationale, elle, retient son souffle, espérant que la raison diplomatique finira par l’emporter sur l’escalade militaire, avant que la ville d’Uvira ne bascule définitivement.

Econews

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