Pendant les travaux préparatoires du 11ème sommet de Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba, le ministre d’Etat en charge de l’Intégration régionale, Antipas Mbusa Nyamuisi, avait insisté sur la revitalisation du compromis d’Addis-Abeba qui, en dix ans de mise en oeuvre, a montré ses limites. Samedi en marge de la rencontre entre les Chefs d’Etat et de Gouvernement, le Président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, a emboîté le pas au ministre d’Etat Mbusa, soulignant également la nécessité de revitaliser l’Accord-cadre d’Addis-Abeba pour lui donner plus d’efficacité.
En dix ans de mise en œuvre, le Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba a nettement montré ses limites. A Bujumbura (Burundi) où s’est tenu samedi le 11ème Sommet de ce Mécanisme, son président sortant, Félix-Tshisekedi, qui passait le flambeau au Burundais Evariste Ndayishimiye, a posé la nécessité de « revitaliser» l’Accord-cadre d’Addis-Abeba pour lui permettre de jouer véritablement son rôle.
Convoqué par le président entrant de ce Mécanisme régional, le président burundais Evariste Ndayishimiye, le sommet de Burundi a finalement levé l’option, entre autres objectifs, de revitaliser cet accord qui avait suscité beaucoup d’espoir pour le retour de la paix en RDC en ce qu’il constitue la première initiative de paix visant à mettre fin au conflit le plus meurtrier depuis la deuxième guerre mondiale et à résoudre les causes profondes de la violence et des guerres à répétition dans l’Est de la RDC.
En plus des garants de l’Accord-Cadre, comme le secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres et le Président de la Commission de l’Union Africaine Moussa Faki, la CIRGL et la SADEC, le Sommet des Chefs d’Etat a vu la participation de cinq sur les treize Chefs d’Etat signataires de l’Accord, tandis que d’autres se sont faits représentés. Il s’agit des Présidents de la RDC, de l’Afrique du Sud, de l’Ouganda et de la République Centrafricaine et du Burundi, pays hôte.
Ce 11ème Sommet a coïncidé avec la célébration du 10ème anniversaire de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République Démocratique du Congo et de la région.
Tshisekedi tonne, Ndayishimiye tempère
Prenant la parole pour la circonstance, Félix Tshisekedi, par ailleurs, président sortant du Mécanisme Régional de suivi de l’accord-cadre, n’a pas mâché ses mots lorsqu’il a accusé le rôle du Rwanda quant au soutien important aux terroristes du M23, alors qu’il figure sur la liste des pays signataires de ce Mécanisme. Il a ainsi exhorté la communauté internationale de tout faire pour que l’Est de la RDC recouvre sa paix et sa sécurité, avant de passer le témoin au Président burundais.
«Les dix ans ont été marqués par des changements géopolitiques importants et des réalisations remarquables enregistrées dans la recherche de la paix en RDC, mais également, par des obstacles et des défis qui s’observent encore aujourd’hui. L’on peut mentionner, entre autres, l’adhésion de la RDC à l’EAC », a dit, pour sa part, le président burundais, au moment de prendre les commandes du Mécanisme régional de suivi.
«La question de paix et de sécurité en RDC fait partie de l’agenda de la communauté Est africaine. En effet, depuis que la RDC est devenue officiellement l’un des nôtres au sein de la Communauté Est Africaine, la Communauté s’est naturellement impliquée pour contribuer aux efforts de pacification d’un pays frère», a indiqué le Président Ndayishimiye, faisant remarquer qu’en plus des forces de la MONUSCO qui interviennent en RDC, des contingents de la Force est-africaine s’y sont aussi déployés pour apporter leur contribution au retour et au maintien de la paix dans cette Nation sœur.
«On ne manquera pas de souligner la pauvreté et le chômage, ennemis communs de tous les citoyens congolais, ont été aggravés par l’exploitation illégale et illicite des ressources naturelles qui devraient servir à juguler ces problèmes. En plus, la persistance des forces négatives et la résurgence des combats menés par le M23 a exacerbé un climat malsain entre la RDC et le Rwanda, ce qui ajoute le drame au drame», a insisté le président burundais, rassurant qu’à tous ces défis, des solutions doivent être trouvées.
Le Chef de l’Etat burundais a rappelé que la sagesse africaine les interpelle à trouver des solutions africaines aux problèmes africains, et que c’est dans cette même logique qu’il faut des solutions régionales aux problèmes régionaux.
Partant du fait que le Burundi a pu sortir d’une histoire triste marquée par des massacres répétitifs sans précédent, des discriminations, des persécutions et des violations graves des droits de l’homme, le Président du Burundi reste confiant que la RDC, elle aussi, va s’en sortir.
«Le Burundi réitère sa ferme détermination à tout mettre en œuvre pour contribuer significativement au retour de la paix et à la stabilité de la RDC et de toute la région. Cela se passera sans doute par la mise en œuvre effective des décisions prises concernant la paix et la sécurité dans notre région», a conclu le Président Ndayishimiye avant de solliciter un soutien financier et logistique de la communauté internationale et plus spécialement des Nations Unies.
L’appel de l’ONU
Invité de marque de cette rencontre de Bujumbura, le secrétaire général de Nations Unies, Antonio Guterres, note que le retour de la paix dans la région des Grands Lacs exige «une volonté politique collective pour s’attaquer aux causes profondes de l’instabilité, de briser le cercle vicieux des conflits dans la région et de mettre à terme le calvaire des populations qui ont tant souffert, notamment en République Démocratique du Congo ».
Il a, dès lors, appelé à la désescalade, à l’apaisement et à la retenue. Et d’interpeller les groupes armés locaux et étrangers opérant en RDC à déposer les armes : «Chacun doit en finir avec les discours de haine, œuvrer pour rétablir la confiance et s’abstenir de toute action susceptible de saper les progrès réalisés pour la paix en RDC».
Antonio Guterres a apprécié les efforts fournis par les dirigeants de la région notamment dans le cadre des processus de Nairobi et Luanda. Selon lui, ces processus ont permis de contenir l’escalade des tensions et de créer les conditions d’un dialogue aux parties prenantes : «Ces processus, menés par et pour les Africains, doivent être renforcés et soutenus par toute la communauté internationale. Chacun doit mettre en œuvre les engagements pris dans le cadre de ces deux processus complémentaires ».
Il a rassuré que les Nations Unies, à travers son bureau de l’envoyé spécial dans la région des Grands-Lacs et sa mission de maintien de la paix en RDC (Monusco), continueront à soutenir les initiatives régionales pour la paix, y compris les mécanismes établis dans le cadre des processus de Nairobi et de Luanda. «Tous les partenaires internationaux doivent en faire de même. Contribuer à renforcer l’appui technique et financier pour ainsi œuvrer pour la paix et la stabilité en RDC et dans la région».
Selon le secrétaire général des Nations Unies, il n’y a pas de chevauchement entre la Force régionale de l’EAC et la Monusco, avant de confier que l’ONU est en train d’étudier les mécanismes qui puissent permettre à la Monusco d’augmenter son appui à la Force régionale.
«Les deux organes ont exactement les mêmes objectifs et sont complémentaires. La force régionale a un rôle particulier. C’est une force des pays qui connaissent le mieux la RDC et qui ont un contact direct avec les Congolais», a promis le patron de l’ONU, convaincu que la solution durable pour la sécurité en RDC se trouve dans la concrétisation de tous les engagements faits dans le cadre des processus de Luanda et Nairobi.
Econews