Cour constitutionnelle et l’affaire Bukanga-Lonzo : un groupe de sénateurs remet en cause l’arrêt du 18 novembre 2022

A force de vouloir plaire à ses maîtres qui lui dictent la ligne à suivre dans l’affaire Bukanga-Lonzo qui met en cause l’ancien Premier ministre, Matata Ponyo Mapon, la Cour constitutionnelle, dans le format du juge-président Dieudonné Kamuleta Badibanda, s’est tirée une balle dans les pieds. La voilà prise dans son propre piège, obligée de se défendre pour justifier son arrêt controversé du 18 novembre 2022. Après le député national Willy Bolio qui a soulevé la question devant l’Assemblée nationale, c’est au tour d’un groupe de 12 sénateurs de remettre en cause le dernier arrêt de la Cour constitutionnelle dans l’affaire Bukanga-Lonzo.
A l’instar de la Cour de cassation qui a sollicité, à son temps, l’interprétation de l’article 168 de la Constitution, ce groupe de sénateurs demandent également à la haute Cour «  de dire recevable et amplement fondé le présent recours en interprétation de l’article 168 de la Constitution; par conséquent de dire non conforme à la Constitution et nul de plein droit l’arrêt rendu le 18 novembre 2022 sous R. Const 1816 ».
Les 12 sénateurs résument leur requête en ces termes : « En effet, par l’arrêt rendu sous le RP 0001 en date du 15 novembre 2021, la Cour Constitutionnelle s’était déclarée incompétente de juger un ancien premier ministre. En substance, cet arrêt a décidé que la Cour Constitutionnelle relève que la compétence juridictionnelle étant d’attribution le prévenu Matata Ponyo Mapon Augustin, qui a cessé d’être Premier ministre en fonction au moment où les poursuites contre lui sont engagées, doit être poursuivi devant son juge naturel, de sorte que autrement, il serait soustrait du juge que la Constitution et les lois lui assignent, et ce, en violation de l’article 19 alinéa 1 de la Constitution. De ce fait, le prévenu Matata Ponyo Mapon Augustin ne saurait être poursuivi devant elle sur la base de l’article 163 de la Constitution.
Cet arrêt qui était d’exécution immédiate, n’était susceptible d’aucun recours, et demeurait obligatoire, s’imposant aux pouvoirs publics, à toutes les autorités administratives et juridictionnelles, civiles et militaires ainsi qu’aux particuliers.
À la suite de cet arrêt, le Parquet Général près la Cour de cassation avait, sur la base du même dossier, saisi la Cour de cassation qui dans son arrêt avant-dire droit, a à son tour saisi la Cour Constitutionnelle en matière de contrôle de constitutionnalité et d’interprétation de la Constitution.
De cette procédure, un arrêt vient d’être rendu le 18 novembre 2022 sous le R.Const 1816 par lequel la Cour Constitutionnelle s’est déclarée compétente pour connaître les infractions commises par le Premier Ministre honoraire dans l’exercice de ses fonctions ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions.
Devant la contradiction flagrante de ces deux arrêts rendus en l’espace d’une année, Nous soussignés demandons l’interprétation de l’article 168 ainsi libellé : « Les arrêts de la Cour constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours et sont immédiatement exécutoires. Ils sont obligatoires et s’imposent aux pouvoirs publics, à toutes les autorités administratives et juridictionnelles, civiles et militaires ainsi qu’aux particuliers.
Aussi, nous interrogeons-nous sur le fondement constitutionnel du pouvoir régulateur qui a permis à la Cour Constitutionnelle de se déclarer être le juge pénal d’un Premier Ministre qui n’est plus en fonction au moment des poursuites judiciaires, et ce, en totale contradiction avec l’arrêt rendu sous RP 0001 du 15 novembre 2021, devenu exécutoire depuis son prononcé ».
Que reste-t-il encore à faire à la Cour constitutionnelle ? En effet, Dieudonné Kamuleta n’a qu’une seule issue de secours pour rétablir non seulement sa crédibilité ais surtout sauvegarde l’image de la Cour constitutionnelle, en raison de son rôle dans la consolidation de la démocratie. Faut-il rappeler que c’est à la seule Cour constitutionnelle que revient le pouvoir de valider les résultats définitifs de la présidentielle et des législatives nationales ? Que se passera-t-il aux élections du 20 décembre 2023 si la Cour constitutionnelle se dédit jusqu’à se contredire dans ses propres arrêts. Ça serait certainement l’hécatombe.
En soulevant cette question, ce groupe de 12 sénateurs, dans lequel se retrouve Matata Ponyo Mapon, ne se bat pas pour sauver un « collègue » d’un procès injuste qui lui est imposé, mais il s’agit de respecter les principes de l’Etat de droit. Que vaudrait encore la justice dès lors qu’elle perd toute sa consistance et qu’elle se laisse guider par des mains obscures ? Par quelle magie aussi la même Cour constitutionnelle rendant le 15 novembre son arrêt dans l’affaire Bukanga-Lonzo où elle se déclare « incompétente » peut-elle se raviser une année après, en se déclarant enfin « compétente ». Qu’est-ce qui s’est donc passé pendant l’espace d’une année pour que la Cour constitutionnelle se rende enfin compte de sa compétence dans la même affaire ?
Autant de zones d’ombre que le juge-président président Dieudonné Kamuleta devrait élucider pour l’honneur de la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire de la RDC. L’Etat de droit en péril ! Seul Dieudonné Kamuleta pourrait le sauver en annulant son arrêt « cynique » du 18 novembre 2022.
Voici la requête de 12 sénateurs à la Cour constitutionnelle.
Econews

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