Déclaration du G13 sur la feuille de route électorale de la CENI

Le Groupe des personnalités du G13 a examiné en profondeur la feuille de route rendue publique par la CENI en vue de la préparation et de l’organisation des élections de 2023;

1. Le G13 rappelle le contenu de sa déclaration du 11 juillet 2020, publiée un an après sa déclaration fondatrice du 11 juillet 2020 pour rappeler l’impératif du consensus comme paradigme structurant d’un processus électoral apaisé dans les délais constitutionnels.

2. A 578 jours de l’éché-ance légale de convocation des élections générales prévues en 2023, la feuille de route publiée par la CENI présente une matrice de contraintes dont plusieurs points constituent des choix délibérés susceptibles de compliquer la tenue effective des élections en 2023 plus que d’en faciliter la préparation et le bon déroulement conformément à la Constitution et aux attentes de la population.

3. Le G13 rappelle que le processus électoral reste une combinaison d’activités intersectorielles dont l’efficacité est tributaire de la cohérence des choix, qui doivent non seulement tirer les conséquences des expériences antérieures, mais aussi demeurer compatibles avec les ressources publiques mobilisables dans un souci permanent de maximiser les gains de temps, l’économie des coûts et la fluidité du concours d’activités des différents secteurs : sécurité, finances, législation.

4. A cet effet, le G13 relève que la présentation des contraintes faite par la CENI ne tient pas compte du rapport général publié en son temps, par la Centrale électorale sur le processus électoral précédent. Et pourtant, en le parcourant, ce rapport présente des options plus claires et opérationnelles ainsi que les choix possibles pour la meilleure organisation du processus électoral 2023.

4.1. Sur la contrainte sécuritaire :

1) Le G13 tient à rappeler que depuis 2006, la contrainte sécuritaire a toujours été une composante du processus électoral. Ce fut le cas en 2006, 2011 et 2018. Cette contrainte relative n’a jamais revêtu un caractère absolu pour s’ériger en obstacle à la tenue des élections de manière générale et définitive. Bien au contraire, un plan de contingentement des risques liés et afférents a toujours prévalu pour atténuer l’impact de l’insécurité sur le processus électoral.

2) Le G13 invite donc les institutions politiques ainsi que la CENI à faire prévaloir et à privilégier la mise en œuvre d’un plan de contingentement des risques sécuritaires approprié, qui inclut l’adaptation des mesures d’exception prises dans le cadre de l’état de siège proclamé dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu afin d’éviter que l’état de siège ne devienne la justification politique de la non-tenue des élections dans les délais. Dans ce cadre, le G13 recommande, pour la paix et la stabilité de notre pays, de ne pas réitérer, sous le prétexte sécuritaire pour les élections de 2023, l’expérience de 2018 de l’exclusion et de la non-participation de certains territoires aux élections.

4.2. Sur la contrainte financière :

1) Le G13 déplore que sa proposition d’une planification du financement des élections dans un cadre pluriannuel å travers un compte d’affectation spéciale n’ait pas retenu l’attention des institutions publiques. A l’approche du lancement des opérations électorales, la RD Congo risque de sombrer à nouveau comme en 2011 et 2018 dans le cycle de la loterie des finances électorales par l’impréparation et les pratiques de la dépense en matière électorale, caractérisées par le clientélisme, la gabegie, la corruption et la surfacturation.

2) Le G13 rappelle que l’autonomie financière de la GN! ne peut être interprétée comme une licence à la mauvaise gestion des finances électorales ou une caution pour l’impunité. De même, la G13 invite le Gouvernement à s’abstenir d’user des cordons de la bourse pour s’assurer une part de profit dans la gestion des finances électorales.

3) Le G13 appelle toutes les institutions à privilégier la transparence des finances électorales en examinant le coût réel des élections, en imposant le respect des lois en matière de passation des marchés publics et à rationaliser la gestion des actifs existants de la CENI pour atténuer le coût des finances électorales. A cet effet, le G13 appelle les institutions publiques à l’ouverture officielle du financement électoral à des concours financiers extérieurs.

4.3. Sur la contrainte du cadre légal :

1) Le G13 rappelle qu’il a déposé depuis le 17 septembre 2020 la proposition de loi «Lokondo » portant modification de la loi électorale, proposition alignée depuis la session ordinaire de mars 2021, sans que jusqu’à ce jour elle n’ait reçu une sérieuse attention de la part des institutions et du Bureau de l ‘Assemblée nationale qui en a pourtant accusé réception depuis sa transmission au Premier ministre en date du 12 mai 2021.

2) Le G13 rappelle qu’après les consultations qu’il a menées en 2020, un consensus minimal s’était dégagé sur les options majeures de la loi électorale, y compris sur la révision constitutionnelle. Ce consensus peut constituer le point de départ de l’examen de cette importante matière au cours de la session ordinaire de mars 2022.

3) Le G13 est convaincu que le retard pris sur la réforme du cadre légal est tributaire du manque de volonté politique qui peut être surmonté à la double condition de :

3.1. Mettre la proposition de loi «Lokondo» à débat sans délai, au plus tard à la première quinzaine d’avril 2022;

3.2. Lever l’option sur l’opportunité politique ainsi que l’étendue de la révision constitutionnelle.

4.4. Sur la contrainte de mutualisation des processus d’identification nationale et d’enrôlement des électeurs :

1) Le G13 appelle les parties prenantes à ne pas faire de cette question un motif de complication du processus électoral mais un cadre de normalisation administrative et de simplification progressive des processus électoraux ultérieurs.

2) A cet effet, le G13 recommande que le choix des solutions techniques procède de l’état de l’existant à la CENI plutôt que de partir d’une nouvelle solution technique budgétivore et dont l’impact technique et financier serait négatif.

3) Plus spécifiquement, le G13 rappelle qu’il a toujours soutenu une collaboration étroite entre la CENI et l’ONIP. Du point de vue technique, la base de données résultant du dernier enrôlement électoral de 2016-2017 est un bon point de départ pour rétablissement d’un véritable fichier d’identification nationale devant donner lieu à la délivrance des cartes d’identité. C’est à partir du fichier d’identification nationale que la CENI devrait tirer le fichier électoral. Cette opération est la plus grande source d’économies du processus électoral en RDC.

Elle va permettre de mettre un terme aux suspicions qui entourent habituellement le fichier électoral et réduire sensiblement le coût de l’enrôlement car le fichier d’identification nationale est censé être actualisé de manière continue.

4.5. Sur les contraintes logistiques :

1) Le G13 souligne que les contraintes logistiques sont réelles et sont connues et ont été expérimentées au cours des processus antérieurs (2006, 2011 et 2018) et peuvent devenir un facteur des coûts inexpliqués faute de planification et de coopération nécessaires avec les ressources des partenaires disponibles.

2) Le G13 recommande dans le cadre de l’admission des concours financiers des partenaires à admettre le concours logistique de ces derniers et à améliorer la planification des opérations électorales dans le cadre d’un mécanisme transparent;

3) Le G13 exprime ses profondes réserves sur l’exigence présentée en termes d’autonomie logistique dont l’expérience de 2018 avait montré les limites avec les avions et autres hélicoptères dont se serait équipé la CENI, sans efficacité sur terrain.

4.6. Sur la contrainte politique

1) Le G13 rappelle que la tenue des élections libres, démocratiques et transparentes est plus un facteur de volonté politique, en commençant par la CENI, les institutions politiques, les parties prenantes : partis politiques et société civile.

2) La volonté politique implique la prédisposition éthique de chacun à favoriser la tenue d’un processus libre de toute velléité directe ou indirecte de contrôle partisan de différentes phases du processus électoral. II est donc impératif que tous les acteurs adhèrent aux principes et valeurs démocratiques. Car il ne saurait y avoir de démocratie sans démocrates.

Le G13 met en contribution non seulement la proposition de loi Lokondo sur les élections mais également les options de consensus obtenues dans le cadre de l’AGENDA CITOYEN et en appelle au sens de responsabilité de tous pour garantir au pays un processus électoral apaisé, démocratique, libre et transparent.

Fait à Kinshasa, le 1er mars 2022

Les signataires

Honorable Mamba Jean-Jacques,

Député national élu, Kinshasa/Lukunga

Honorable Mambidi Jean-Marc,

Député national, élu de Watsa

Honorable Munobo Juvénal,

Député national, élu du territoire de Walikale

Honorable Djoli Eseng’Eli Jacques,

Député national, élu de Boende

Honorable Lubaya Claudel-André,

Député national, élu de la ville de Kananga

Madame Manya Riche,

Société civile

Monsieur Muongo Jean-Pierre,

Ancien directeur général de l’OCPT

Honorable Sesanga Hipungu Delly

Député national, élu de Luiza

Honorable Makengo Charles,

Député national, élu de Kinshasa/Tshangu