Grand Inga : Kinshasa zappe l’Australien FMG et relance le Chinois de «Three Gorges»

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Au grand désarroi du groupe minier australien Fortescue Metals Group (FMG), Le pouvoir congolais entend relancer la piste du Chinois Three Gorges pour son barrage hydroélectrique Inga III.
Après de nombreux revirements de situation dans le dossier des méga-barrages du Grand Inga, l’exécutif congolais penche désormais pour revenir à l’option portée par China Three Gorges, révèle le site spécialisé Africa Intelligence. Au grand dam du minier australien Fortescue Metals Group, qui craint de voir le projet lui échapper.
Une réunion de haut niveau s’est tenue le 5 juin, au palais de la Nation, pour faire le point sur le dossier des barrages hydroélectriques du Grand Inga. Présidée par le directeur de cabinet du chef de l’Etat, Guylain Nyembo, assisté de son adjoint chargé des questions économiques et financières, André Wameso, elle comptait également deux ministres, celui chargé des ressources hydrauliques et de l’électricité, Olivier Mwenze, et son collègue à l’industrie, Julien Paluku Kahongya.
Selon les informations d’Africa Intelligence, l’assemblée présente à cette réunion fait désormais peu de cas de l’option avancée par le minier australien Fortescue Metals Group (FMG) et sa filiale énergies vertes, Fortescue Future Industries (FFI). Cette dernière avait signé en 2020 un protocole d’entente (MoU) avec Kinshasa pour le développement de plusieurs projets – dont les méga-barrages Inga III à Inga VIII. Elle n’attendait plus que la signature d’un avenant à sa convention pour lancer des études complémentaires.

La COP28 en ligne de mire
Plutôt que de miser sur l’australien, l’exécutif congolais propose aujourd’hui de relancer la piste de l’entreprise étatique China Three Gorges Corp, signataire en 2018, sous la présidence de Joseph Kabila, d’un « accord de développement exclusif » du barrage Inga III. Ce deal avait pourtant été battu en brèche au début du mandat de Félix Tshisekedi en 2019, notamment par l’ancien conseiller spécial chargé des infrastructures, Alexy Kayembe de Bampende. Fervent soutien de Fortescue, celui-ci avait argué que la partie chinoise n’avait jamais financé les études de faisabilité du projet.
Si les intentions du géant chinois demeurent floues, Kinshasa juge désormais nécessaire de redimensionner le projet pour le cantonner à Inga III. Une position maintes fois répétée par les bailleurs, parmi lesquels la Banque africaine de développement (BAD) et certains conseillers à la présidence. Ligne de mire des partisans du retour de China Three Gorges : la Conférence de Dubaï de 2023 sur les changements climatiques (COP 28) prévue du 30 novembre au 12 décembre, qui pourrait offrir une vitrine mondiale au projet.

La piste sud-africaine
Reste toutefois à déterminer les off takers pour rendre le projet économiquement viable. Un gigawatt pourrait être dédié à la ville-province de Kinshasa, à condition de moderniser le réseau de la Société nationale d’électricité (SNEL). D’autres pistes sont à l’étude, notamment parmi les opérateurs miniers dans l’ex-Grand Katanga, ainsi que du côté de l’Afrique du Sud. Confronté à la crise de sa société publique d’électricité ESKOM, Pretoria avait déjà manifesté par le passé son intérêt pour acheter la production d’Inga III. Les errements du projet côté congolais, conjugués à des finances publiques en délicatesse, ont réfréné les ardeurs des autorités sud-africaines. Aujourd’hui, le ministre des ressources minières et de l’énergie, Gwede Mantashe, s’intéresse plutôt à la solution des bateaux-centrales du turc Karpowership.
Conscient que la situation est en train de tourner en sa défaveur, Fortescue pourrait redéfinir sa stratégie en RDC, quitte à se tourner vers des projets de moindre envergure. Des discussions sont ainsi en cours pour la réhabilitation de la turbine 24 sur le site d’Inga II. Dans un domaine plus proche de son corps de métier d’origine, Fortescue s’intéresse également au secteur minier congolais.

Les préalables à vider
Pour convaincre la partie chinoise, les autorités congolaises devront cependant considérer les différents aspects du modèle économique du projet, note le site projetafriquechine.com.

Le financement : Évalué à 14 milliards de dollars, la construction d’Inga III va exiger d’énormes moyens financiers. Dans sa volonté de relancer la piste de relancer le chinois Three Gorges, le gouvernement congolais devra réfléchir à d’autres sources de financement du projet, et ce d’autant plus que les institutions financières chinoises sont devenues frileuses quant au financement des projets gigantesques en Afrique. Une approche multilatérale intégrant plusieurs acteurs pourrait être une solution pour limiter les risques des participants. Cependant une pluralité des acteurs va soulever aussi la question de la capacité de la RDC à gérer la complexité d’un tel projet. En 2016, la Banque Mondiale s’était retirée du projet sur fond de contradictions avec les autorités congolaises.

Consommateurs finaux : Jusqu’à présent l’Afrique du Sud, qui connait des problèmes en dessertes électriques, a manifesté son intérêt pour le projet Inga III. Cependant, le projet est contesté en Afrique du Sud où plusieurs estiment le projet coûteux. L’Afrique du sud va devoir débourser 4 milliards de dollars pour construire les 3.000 Km de ligne nécessaires à la transmission du courant jusque chez elle. Outre l’Afrique du Sud, Il y aussi l’industrie minière congolaise qui est en plein essor et qui prévoit plus de transformation minière sur place. Outre l’industrie minière locale congolaise, c’est l’industrie minière régionale, en pleine mutation, qui pourrait bénéficier de la mise en service d’Inga III. Mais au-delà de l’industrie minière, la RDC devra planifier et organiser comment elle compte consommer efficacement les 11,000 mégawatts qui seront produits par Inga III.

Viabilité économique : Les facteurs précédents posent finalement la question de la viabilité économique du projet dans son ensemble. En 2020, le gouvernement congolais et la BAD avaient suggéré un développement en plusieurs phases, jugé non viable par Three Gorges.

Normes ESG : Si les institutions financières chinoises sont considérées pour financer le projet, les autorités congolaises devront prendre en compte les critères ESG que ces institutions mettent désormais en avant dans le financement de ce type de projets. Ce qui pose la question du règlement de la controverse environnementale qui entoure le projet Inga III.
Avec Africa Intelligence