Incroyable perte de motivation de l’opposition politique en RDC

L’opposition politique congolaise prétend incarner l’aspiration du peuple, mais se montre encore démotivée à aller au bout de sa démarche. Quatre mois après les élections générales organisées dans le pays, le 20 décembre 2023, elle est  fragilisée par les querelles d’ego, divisée, et donne l’impression de ne rien maîtriser. Tout se passe sans qu’elle ne puisse vraiment agir. Quand on l’observe, avec ses travers abjects, la déduction est vite faite : la RDC est malade de son opposition politique en perte de motivation. Incroyable ! Cet état de fait soulève des inquiétudes quant aux espoirs placés en lui par les Congolais.  

L’opposition politique congolaise, à quoi sert-elle ? 

Cette question taraude sans cesse les esprits et revient toujours dans les débats au sujet de la situation politique, économique et sociale de la RDC, qui est en fait déplorable et rend difficile son émergence. Pourtant, cette opposition a tout ce qu’il faut comme matière grise. Seulement, elle montre, tous les jours que Dieu fait, qu’elle n’est constituée que des amateurs non éclairés et non motivés. Sinon, elle ne se ferait pas balader, jour et nuit, de midi à quatorze heures, du 1er janvier au 31 décembre par une majorité au pouvoir qui, à la vérité, peine à satisfaire les aspirations du peuple.

L’opposition est-elle assez démotivée pour dénoncer haut et fort la misère noire et indescriptible dans laquelle vivent les Congolais, abandonnés à eux-mêmes dans un dénuement total ? N’a-t-elle pas de la fougue et de l’ardeur nécessaires pour mener à bien le combat politique ? Ce sont là les questions essentielles que tout le monde se pose, car la situation dans laquelle se trouve le pays ne semble pas l’offusquer ! C’est là que le bât blesse.

Les marches (une liberté contrôlée par le pouvoir) n’ont plus aucun sens. Les Congolais sont fatigués des journées d’action sans lendemain. Et au niveau de la diaspora, en Europe notamment, les manifestations, les réunions, les conférences, les rencontres…sont organisées. Mais si ces initiatives sont louables, il convient de reconnaitre qu’elles n’ont eu, jusqu’à présent, aucun impact sur la situation dans le pays.

OPPOSITION CLOCHARDISEE

La situation politique, économique et sociale de la RDC est angoissante. Elle est potentiellement dramatique. Les Congolais sont aujourd’hui embarqués dans une crise  qui ne cesse de prendre de l’ampleur au vu et au su d’une opposition en panne de réflexion, incapable de s’organiser, de dire la vérité aux dirigeants au pouvoir, de s’opposer aux injustices institutionnalisées, de combattre les antivaleurs, et de mesurer le poids de la responsabilité qui est la sienne ! Elle ne réalise à quel point son attitude porte préjudice à la bonne marche du pays.

Ce n’est pas lui faire injure que de dire qu’elle ne joue pas son rôle face à la majorité au pouvoir, ni vis-à-vis du peuple et de la nation; qu’elle n’est pas à mesure de s’acquitter de sa tâche. La vérité est qu’elle est aussi prise dans l’engrenage de l’opportunisme.

La victoire de Bassirou Diomaye Faye, candidat du parti de l’opposition, Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), à l’élection présidentielle sénégalaise du 24 mars 2024, est une bonne leçon de ténacité et de la patience dans le combat politique à l’endroit de l’opposition congolaise en particulier et la classe politique en général enclines au nomadisme pour les intérêts bassement égoïstes.

Amoindrie par l’électrochoc de la «défaite» aux dernières élections, l’opposition a subi la lobotomisation ultime. Plus de pouls, plus d’influx nerveux, on peut rabattre le drap sur le visage de cette caste déjà en décomposition et organiser les funérailles. En d’autres termes, elle semble ne pas exister.

MAJORITÉ-OPPOSITION, MÊME COMBAT ! 

Aujourd’hui, les conditions de vie des Congolais se sont considérablement dégradées : le travail n’est plus aussi protecteur que par le passé, et il n’est pas rare de trouver des familles qui connaissent le chômage depuis deux ou trois générations avec toutes les conséquences que l’on peut imaginer. La seule solution qui reste, c’est le chemin de l’exil, et les plus pessimistes se transforment en «Kuluna» ou délinquants urbains.

En  RDC, la majorité de la population n’a pas accès à l’eau et à l’électricité. Un pays irrigué par une multitude de rivières, et par le deuxième fleuve le plus puissant au monde, et riche de nombreux lacs, les habitants manquent d’eau potable… Des infrastructures désuètes ou inopérantes. De même, l’électricité est une denrée rare dans les foyers congolais. Les coupures d’électricité sont devenues plus intempestives et prolongées. L’accentuation des délestages électriques fait grincer les dents. « Le courant est-il revenu ? » Telle est la question obsédante que  se posent quotidiennement les Congolais, qui, au mieux, bénéficient d’électricité un jour sur deux.

Sentiment d’insécurité mais aussi sentiment d’injustice. La plupart des Congolais ont le sentiment de vivre dans un pays de plus en plus injuste, et cela va crescendo. Par exemple, on comprend mal qu’une infime partie de la population – Les hommes politiques, leurs familles, amis et proches -, roule carrosse, pendant que l’immense majorité des Congolais se battent pour survivre. La pauvreté ne cesse d’augmenter. Les conséquences que cela entraîne en termes d’exclusion et de destruction de vie, en termes aussi de stigmatisation des pauvres, sont alarmantes.

Si l’on ajoute à ce qui précède des antivaleurs comme la corruption, des comportements partisans, tribaux et démagogiques, le détournement de deniers publics, le mensonge, le népotisme…, on se demande si l’opposition ne se  complait-elle pas dans la mal gouvernance. Elle ne dit mot, silence (complice ?) Motus et bouche cousue !

Si l’attitude et l’image des hommes au pouvoir à Kinshasa jettent un discrédit sur leur engagement, parce qu’ils n’ont pas su montrer, jusque-là, toute la noblesse du service politique, il faut dire aussi que les membres de l’opposition ne sont pas exempts de responsabilités. Comme leurs pairs de la majorité, ils mènent tous le même combat. Lapidairement : assumer le pouvoir politique, coûte que coûte. Autrement dit, les aspirations populaires, on verra plus tard.

Quid de la solution pour mettre un terme à l’insécurité qui sévit dans l’Est du pays,  ayant déjà fait 10 millions de morts, 500 000 femmes violées, 7,1 millions de déplacés ? Ni la majorité, ni l’opposition ne semblent proposer un remède en termes de dynamique libératrice.

La solution diplomatique a épuisé toutes les possibilités de compromis. Autrement dit, elle a échoué. Par conséquent, il faut changer de paradigme. Ceux qui sont au pouvoir ont-ils réellement le pouvoir ou n’ont-ils que des titres ou des fonctions ?

BESOIN D’UNE OPPOSITION RÉELLE ET FORTE

Pourquoi la RDC est-elle malade de ses opposants politiques ? Pourquoi doit-elle se remettre en cause ? Pourquoi  a-t-elle besoin d’un nouveau souffle ? C’est effectivement les questions que l’on peut, que l’on doit se poser !

Au regard de ce qui se passe en RDC, aujourd’hui, on a l’impression que l’opposition n’existe que par l’étiquette qu’on lui donne. Minés par des querelles intestines et des egos surdimensionnés, les opposants congolais s’emploient corps et âme à s’autodétruire, courbent l’échine devant le régime au pouvoir et ont une conception d’opposition désuète et folklorique.

Les Congolais n’ont point besoin d’une opposition amorphe et dont la cupidité se dispute à la fourberie. Ils ont besoin d’un véritable contre-pouvoir à même de leur apporter des solutions pour se tirer du bourbier dans lequel ils se trouvent actuellement. En d’autres mots, ils réclament une opposition forte, structurée et unie, pas une opposition faible (« Opposition ya pete ») minée par la guéguerre de quelques barons qui ne pensent qu’à leur ego, et a du mal à se distinguer avec le pouvoir parce qu’elle n’arrive pas à sortir des corporatismes.

À ce jour, l’opposition politique congolaise semble être trouée, perdue et ne propose aucune alternative réelle face au régime actuel. Qu’elle n’oublie pas que l’immobilisme, c’est la mort à long terme.

Si elle veut se définir comme une réelle force d’opposition, il est donc temps qu’elle puisse constituer un véritable contre – pouvoir, incarner aussi la possibilité d’une alternance politique crédible et enfin permettre de renouveler le personnel politique. Le peuple congolais mérite l’excellence et non la médiocrité.

Robert Kongo (CP)