Le gros bâton

De mémoire de Kinois, jamais la circulation dans la ville-capitale de Kinshasa n’a été autant paralysée que ce vendredi 6 mai 2020. Après la petite pluie tombée aux petites heures du matin, des dizaines de milliers de véhicules à deux, trois et quatre roues ont pris d’assaut toutes les grandes artères de la ville qui convergent dans leur quasi-totalité vers le centre des affaires de la Gombe. Une fâcheuse coïncidence a voulu que ce jour, l’opposition projetait un sit-in devant le parlement. En réaction, la police a fermé l’artère vitale du boulevard triomphal, empirant la situation. Le chef de l’Etat est revenu sur ses recommandations antérieures lors du conseil des ministres, avançant même des innovations.
Parechoc contre parechoc, taxis, bus de transport en commun, voitures personnelles et engins de chantier étaient immobilisés sur le boulevard Lumumba, sur le tronçon compris entre la 7ème rue à Limete, et la bifurcation Université-Sendwe. Avançant à pas de tortue, le carrefour du pont Kasa-Vubu semblait impossible à atteindre. Certains conducteurs étaient sur la voie depuis plus d’une heure. Arrivés enfin à l’ex-pont Cabu, une mauvaise nouvelle les attendait : le boulevard triomphal était fermé en raison de la manifestation de l’opposition et de la société civile au palais du peuple. Seule alternative : remonter vers le rond-point de la Victoire, dans l’espoir de continuer sur Kasa-Vubu et emprunter plus loin l’avenue de la Libération à la hauteur du rond-point Moulaert. Sauf que là non plus, l’immobilisation était totale. Même les voies secondaires de Matonge, venant du stade Tata Raphaël étaient saturées.
Cet état de choses était reproduit à l’identique partout dans la ville, que ce soit à l’entrée Ma Campagne et les deux sens de l’avenue Nguma vers, ou en venant de Delvaux. La route des Poids lourds et le centre-ville, avec son boulevard du 30 Juin n’étaient pas épargné. Des centaines de piétons attendaient des heures sous un soleil de plomb. Généralement agglutinés par dizaines aux carrefours les plus «rentables», ce jour pourtant, les agents qualifiés de la police de circulation routière (PCR), les «fameux roulages» étaient curieusement invisibles ? Ils avaient purement et simplement désertés leurs postes, dépassés par les événements.
La situation, catastrophique, est arrivée aux oreilles du chef de l’Etat qui, au cours du Conseil des ministres qu’il présidait entre-temps, s’est étonné que ses recommandations du 14 janvier 2022 sur le sujet n’aient pas connu d’avancée. Il a donc demandé au premier ministre de se pencher sur la question avec le ministre et les services compétents. Mais surtout il a proposé – en fait instruit – que soit associée la police militaire dans la régulation de la circulation sur les grandes artères.
Il reste à voir en quoi la mesure, si elle est appliquée, serait efficace tant que la conduite anarchique prêtée aux conducteurs des vieux taxibus destinés à la casse en Europe, mais aussi l’indiscipline des conducteurs des taxis-motos qui terrorisent les autres usagers de la route n’auront pas trouvé un début de solution de la part de l’hôtel de ville de Kinshasa.

ECONEWS