Mboso donne une leçon de droit à Bahati : « Les décisions de la Cour constitutionnelle sont sans appel. Vous n’avez pas à les discuter devant la tribune ». 

En République Démocratique du Congo, le ridicule n’a jamais tué. Si non, certains dirigeants politiques seraient déjà disparus des radars en raison d’une prise de position en déphasage avec le fonctionnement d’un Etat, dit normal, où le respect des institutions et des lois de la République constitue la règle.

Malheureusement, en RDC, tout fonctionne à l’inverse. Ainsi, l’interprétation des décisions de la Justice est guidée, sans scrupules, par des considérations politiques.

C’est inadmissible que les deux chambres du Parlement (Sénat et Assemblée nationale) étalent au grand jour leurs contradictions sur l’interprétation réelle des décisions de la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire congolais, à savoir la Cour constitutionnelle.

L’on se rappelle que, dans le dossier Matata lié au Parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo, le président du Sénat, Modeste Bahati Lukwebo, n’a pas hésité à remettre en cause l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle qui s’était déclarée « incompétente » de juger l’ancien Premier ministre.

Ce qui n’était pas de l’avis du tout puissant président du Sénat. Sans détours, Modeste Bahati a rejeté l’arrêt de la Cour constitutionnelle, renvoyant les juges constitutionnels aux études.

Se plaçant au-dessus de l’arrêt de la haute Cour, Modeste Bahati a tranché : « La Cour constitutionnelle a interprété autrement l’article 164 de la Constitution. Ce que la Cour a fait ne sous engage pas ».

« Chassez le naturel, il revient au galop », rappelle un vieil adage. Un autre indique que « quelle que la longueur de la nuit, le jour finit toujours par poindre ».

Si le président du Sénat s’est entêté sur sa voie de contredire la Cour constitutionnelle, vouant une haine viscérale contre le sénateur Matata, la meilleure réplique à son interprétation erronée de l’arrêt de la haute Cour ne pouvait venir que du même Parlement. Et c’est son collègue, Christophe Mboso Nkodia Pwanga, président de l’Assemblée nationale, qui la lui a réservée.

Répondant à Daniel Nsafu, élu national de Kinshasa/Mont-Amba, qui a remis en cause l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle dans la victoire de Félix Tshisekedi à la présidentielle de décembre 2018, Mboso a trouvé les mots justes pour renvoyer Daniel Nsafu dans les cordes

« Les décisions de la Cour constitutionnelle sont sans appel. Vous n’avez pas à les discuter devant la tribune de l’Assemblée nationale. Il faut respecter nos institutions », a déclaré Mboso. C’est tout dit.

Ça devient clair comme l’eau de la source que le dossier Matata est plus politique que judiciaire. Quoi que la Cour constitutionnelle lui ait rendu toute sa liberté, le président du Sénat s’entête – pour des raisons qui lui sont propres – à lui rendre ses immunités. Modeste Bahati est d’avis que la Cour constitutionnelle s’est trompé dans son arrêt rendu en faveur de Matata.

Apparemment, le président du Sénat se laisse toujours guider par ces « juristes de dimanche ». Un avis partagé par le professeur Evariste Boshab, constitutionnaliste de son état.

En tout état de cause, Christophe Mboso ferait mieux de rappeler à son collègue du Sénat, Modeste Bahati Lukwebo, que « les décisions de la Cour constitutionnelle sont sans appel ». Par conséquent, « vous n’avez pas à les discuter devant la tribune » du Parlement.

Autant l’Assemblée nationale a refusé tout débat sur l’arrêt de la Cour constitutionnelle à l’élection de Félix Tshisekedi, autant le Sénat devait aussi se soumettre à l’arrêt de la même Cour sur le dossier Matata. Au nom de l’Etat de droit !

Econews