Taxe RAM : Félix Tshisekedi devant un dilemme

Augustin Kibassa Maliba : c’est la grande vedette du Gouvernement Sama Lukonde Kyenge. Depuis la nomination du Gouvernement Ilunga Ilunkamba, il était tranquille dans sa peau de ministre des Postes, Téléphones, Nouvelles technologues de l’information et de la communication, jusqu’à ce que la taxe RAM (Registre des appareils mobiles) s’invite dans le débat. Aujourd4hui, c’est Augustin Kibassa qui porte seul la croix d’une initiative qui ne fait pas l’unanimité dans l’opinion. L’Assemblée nationale qui a été finalement alertée par une question orale remet en cause la portée de cette taxe Ram qui rogne terriblement le maigre pouvoir d’achat d’une population qui vit déjà sous le seuil de la pauvreté. A l’Hémicycle, tous ne jurent que par la suppression de cette taxe. Pour le Chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, la taxe RAM le met dans une position délicate. Soit il protège son ministre et repousse le retrait de cette taxe, auquel cas il devra renier le pacte du «Peuple d’abord» qui le lie à son électoral, soit il sacrifie son ministre, mais il devra alors s’attendre au retour des flammes. Car, l’Assemblée nationale exigera un audit sur tous les fonds mobilisés par la taxe RAM et l’utilisation qui en a été faite. Quoi qu’il en soit, l’interpellation de Kibassa à l’Assemblée nationale est un vrai dilemme pour Félix Tshisekedi.

Dans l’Union sacrée de la nation, c’est la grande mobilisation autour de l’initiative lancée à l’Assemblée nationale contre le ministre des Postes, Téléphones, Nouvelles technologies de l’information et de la communication, Augustin Kibassa Maliba. En cause : la taxe RAM (Registre d’appareils mobiles).

Au ministère des PTNTIC, le RAM comme «le Registre central d’appareils mobiles établi en RDC et qui contient la base de données de tous les IMEI connectés aux réseaux d’un groupe d’opérateurs de téléphonie mobile ou de l’ensemble des opérateurs de téléphonie mobile». A ce titre, il permet de «lutter efficacement contre le vol et la contrefaçon des terminaux mobiles, protéger la santé des usagers contre les effets toxiques des appareils non conformes aux normes locales et internationales (comme le taux élevé de plomb), accroître la sécurité et la qualité de service des réseaux mobiles en RDC ».

Toujours est-il que, dans l’opinion publique, la taxe RAM, opérationnelle depuis septembre 2020, ne fait pas l’unanimité. Et le tollé général a été tel que la question est parvenue finalement à l’Assemblée nationale qui venait d’interpeller le ministre Kibassa.

Depuis lors, sa réplique va de report et report, ravivant davantage la polémique.

Augustin Kibassa reviendra-t-il à l’Assemblée nationale pour répondre aux préoccupations des députés ? A l’Union sacrée de la nation, on continue à y croire.

Mais, ce n’est pas dans l’opposition parlementaire, portée essentiellement par le FCC de Joseph Kabila, qui soupçonne l’USN de laisser pourrir la situation jusqu’à sauver dans les ultimes minutes le ministre Kibassa.

Depuis lors, le FCC, qui menaçait de lancer une motion de défiance contre le ministre Kibassa, est passé à l’action mardi en déposant finalement cette pétition visant le patron des PTNTIC.

Pour Kibassa, la terre semble déjà se dérober sous ses pieds. Sortira-t-il indemne de ce chaudron de l’Assemblée nationale ? L’USN se bat pour le tirer des griffes des élus nationaux. Lundi, des députés, estampillés USN, étaient conviés au Fleuve Congo Hôtel à une réunion stratégique autour de Christophe Mboso, président de l’Assemblée nationale, Jean-Marc Kabund, 1er vice-président de l’Assemblée nationale, et Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge, Premier ministre. Sur la table des discussions : comment sauver Kibassa ?

Selon des indiscrétions parvenues à Econews, la réunion a accouché d’une souris. Aucun compromis n’a été dégagé autour de la stratégie à actionner pour un ultime sauvetage de Kibassa. Est-ce pour autant que son sort est désormais scellé ? A l’USN, on relativise.

«Nous continuons à discuter. Mais, la question est délicate, car nous souffrons tous de cette taxe, en tant qu’usagers des services de télécommunications. C’est un choix difficile », a confié à Econews un député national, présent lundi à la réunion du Fleuve Congo. Il pense, néanmoins, que dans cette affaire de RAM, quelqu’un devra payer : «Dans cette affaire de RAM, il faut qu’un fusible saute pour ramener le calme. Lequel ? Difficile à dire ».

Entre le marteau…

Le Président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, est entre le marteau et l’enclume. Le dossier RAM n’est pas une bonne chose pour lui dans la mesure où il est mis en position inconfortable d’entériner ou de se désolidariser d’une décision gouvernementale.

L’affaire RAM est une corde au cou aussi bien du Chef de l’État que de l’Union sacrée de la nation. Une patate chaude !

Rien n’indique donc que la légalité a été respectée par ceux-là même qui sont appelés à préserver les intérêts de la population. Bien au contraire !

Le ministre Augustin Kibassa, qui a porté l’affaire devant le Conseil des ministres, n’a pas été en mesure d’apporter la démonstration nécessaire à la meilleure compréhension du dossier. Devant les députés nationaux, il s’est davantage embrouillé dans ses propres explications, alimentant le mystère autour de la taxe RAM et l’utilisation de tous les fonds collectés.

Le Front commun pour le Congo de Joseph Kabila s’est donné l’opportunité de taper là où ça fait le plus mal. Une motion de défiance est déposée. L’objectif n’est pas d’obtenir la chute du ministre de PTNTIC. Il s’agit de provoquer le débat et surtout discréditer à fond le camp présidentiel. Le FCC va s’employer, à cœur joie, à démontrer à la face du monde que Félix Tshisekedi et ses partisans ont pris sur eux l’argent du peuple – un peuple qui vit déjà sous le seuil de la pauvreté, avec moins d’un dollar américain par jour. Quelle cruauté ? S’exclamerait sûrement le FCC.

… et l’enclume

Le chef de l’Etat va-t-il tenir tête et donc maintenir la taxe RAM en même temps que le ministre Kibassa ? En le faisant, Félix-Antoine Tshisekedi donnera la preuve éclatante qu’il serait insensible aux cris de la population. Dans sa posture de garant des intérêts du peuple issu en plus du parti dont la lutte a jalonné l’histoire politique du pays, Félix-Antoine Tshisekedi perdra des plumes.

Dans les urnes, cela aura un impact certain. Une importante frange de ceux qui lui font confiance ira voir ailleurs. Dans l’urne, la sanction se fera sentir. Absolument !

Le Président de la République a aussi la possibilité de se désolidariser de son gouvernement. Il s’agit pour lui de révoquer cette taxe et de sanctionner le ministre Kibassa qui va servir de soupape. Un scenario qu’attendent ses détracteurs. Les affaires de L’Etat ne se gèrent pas avec des états d’âme. Froidement, le Président de la République décidera de se séparer de son ministre avec qui, il a des liens de famille.

La sanction contre le ministre Kibassa ne doit pas attendre la pression de l’opposition.

Au sein de l’Union sacrée, il fallait trouver des mécanismes pour garder l’initiative dans ce dossier. S’il n’y a aucune certitude sur la loyauté des troupes, il y a donc matière à inquiétude. C’est le cas de le dire, parce que la dernière réunion stratégique des élus de l’Union sacrée de la nation n’a pas accouché d’une bonne solution. Bien au contraire. Des fissures provoquées par des divisions ont émergé.

La plénière pour débattre de cette question promet d’être à rebondissements.

Econews