Tensions post-électorales : le Gouvernement choisit la voie de la fermeté

Alors que l’opposition politique, regroupée autour de Fayulu, Mukwege, Théodore Ngoy, et deux autres candidats à la récente élection présidentielle du 20 décembre dernier, projette une marche de protestation ce mercredi 27 décembre contre les irrégularités et dysfonctionnements constatés lors des opérations de vote, le Gouvernement a décidé d’étouffer cette initiative par la méthode forte. Mardi, devant la presse, le VPM (Vice Premier ministre en charge de l’Intérieur et Sécurité, Peter Kazadi, n’a pas fait dans la dentelle, optant pour la fermeté.

Le mardi 26 décembre 2023, le ministre de la Communication et des Médias, Patrick Muyaya, ainsi que le vice-Premier ministre, ministre de l’Intérieur, de la Sécurité et des Affaires coutumières, Peter Kazadi Kankonde, ont animé une conférence de presse consacrée à la situation générale du pays à la suite des élections du 20 décembre 2023.

Dans son discours d’ouverture, le vice-ministre de l’Intérieur a appelé les politiciens congolais qui ont pris part au processus électoral à persévérer dans le respect des règles établies. Il a précisé : «Toute contestation doit attendre la proclamation des résultats définitifs avant d’être soumise à la Cour constitutionnelle, conformément aux dispositions de la Constitution et de la loi électorale.»

Des contestations

Le vice-Premier ministre Peter Kazadi est d’avis que « remettre en question les résultats à cette étape du processus ne peut être interprété que comme une transgression de la loi. Le gouvernement a pris toutes les mesures nécessaires pour maintenir l’ordre public. » Il a également souligné sa disposition à assumer les éventuelles répercussions de toute action entreprise dans le cadre du contentieux postélectoral.

Pour rassurer la population, le VPM Kazadi a lancé un appel à la sérénité en appelant les citoyens congolais à ne pas céder à la manipulation.

«C’est ici l’occasion d’appeler la population à être rassurée que rien ne va se passer dans le pays, ne cédez pas aux appels de querelles. Pendant cette période où l’ennemi extérieur et intérieur veut semer la désolation, la justice sera active pour réprimer tous les actes contraires à la loi. Nous nous sommes engagés dans un processus démocratique. Il y a eu des élections auxquelles nous avons tous accepté de participer, s’il y a de contestations, c’est devant la Cour (ndlr : constitutionnelle) qu’il faut les emmener. Ce jeu des élections a des règles que nous devons tous accepter de suivre jusqu’au bout », a précisé le patron de la sécurité congolaise.

«Quiconque a besoin de contester n’a qu’à saisir la cour constitutionnelle ou les juges compétents pour exprimer sa désapprobation sur la manière dont les choses se sont déroulées, faire le contraire c’est marcher sur la loi et là ils trouveront l’état sur leur chemin. Personne n’est au dessus de la loi, personne ne peut intimider l’Etat. Je répète les dispositions tant visibles qu’invisibles sont prises », a-t-il conclu.

De son côté, le porte-parole du Gouvernement, Patrick Muyaya, a insisté sur le fait que la situation est globalement calme et a appelé à la vigilance.

«Généralement en période des élections, il y a toujours quelques troubles. Les dispositions sont prises de manière à ce que la police et l’armée puissent assurer la sécurité. Nous ne ferons pas de commentaire sur le travail de la CENI mais nous allons revenir sur les éléments du contexte », a expliqué le porte-parole du Gouvernement. Et d’ajouter : «Si on compare au processus d’il y a cinq ans, à la même période il n’y avait pas internet. Ça peut paraître anodin mais beaucoup de gens pensaient que le gouvernement allait couper l’internet, on aurait donné l’impression qu’il y a de choses à cacher. Et toutes les irrégularités que nous voyons sur les réseaux sociaux, nous les voyons parce que dès le départ  nous avions voulu que ce processus soit à la fois inclusif, transparent, et il est différent. Inclusif parce que beaucoup pensaient que certains candidats ne seraient pas retenus. D’autres croyaient un moment que certains n’allaient pas battre campagne mais ils ont battu campagne. Nous avons vu les Congolais aller massivement voter. Ceux qui attendaient le chaos, le chaos n’est pas arrivé et n’arrivera pas non plus »

Patrick Muyaya a dès lors appelé ceux qui ne seront pas d’accord  avec la « vérité des urnes » à utiliser les voies légales qui autorisent la contestation devant les Cours et tribunaux.

Mesures sécuritaires exceptionnelles

Pour sa part, le VPM Peter Kazadi est longuement revenu sur les mesures sécuritaires. «Nous avons pris toutes les dispositions pour faire face à certains menaces internes et externes », a-t-il lancé. Et de préciser : «En interne, nous avons des acteurs majeurs qui sont en collusion avec des éléments extérieurs. En interne, il y a également des éléments qui cherchent à semer les troubles aux yeux des actes d’incivisme. Pour ce faire, nous avons pris toutes les mesures : l’armée est en alerte, de même que la police pour faire face à tous les débordements ».

«Nous n’allons pas établir un état maréchal, mais nous serons les plus fermes possible pour parer à tous débordements d’où qu’ils viennent », a expliqué le patron de la sécurité intérieure, tout en invitant la population au calme.

« La paix passe à certaines menaces, tant internes qu’externes. Pour cette raison, nous, en tant que Gouvernement, nous avons pris toutes les mesures. L’armée est mise en alerte générale, de même que la police, pour faire face à toute éventualité, a-t-il martélé, avant de prévenir : «Nous n’allons pas établir un État martial, mais nous allons essayer d’être les plus fermes possibles pour faire face à tout débordement d’où qu’il vienne ».

Tighana Masiala