Affaire Matata et interprétation de l’article 164 de la Constitution : la leçon magistrale d’Evariste Boshab ()

Mes chers collègues,

J’enseigne le droit public à l’Université de Kinshasa et ailleurs. Je suis avocat près la Cour d’Appel de Kinshasa/Gombe depuis 1987, accordez-moi la présomption de connaître quelques notions de droit, puisque celui-ci est vaste.

Grand est mon étonnement de me voir traiter d’hypocrite parce que je défends un point de vue de droit et non le militantisme abject. Ceux qui brillent par les insultes savent eux-mêmes ce qu’ils représentent.

Revenons au droit : dans une assemblée législative, le droit à la parole est sacré, puisque c’est l’unique instrument de travail dont dispose chaque élu. Ce n’est ni l’aumône ni une libéralité.

Il est étonnant que le président du Sénat écoute les juristes de dimanche pour donner, face à la nation, une interprétation totalement erronée de l’article 164 de la Constitution, en prétendant corriger la Cour Constitutionnelle.

En effet, tous ceux qui ont fait les bonnes  études de droit,  connaissent la signification exacte de l’expression «les infractions commises dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice des fonctions ». C’est une expression technique pour dire «directement ou indirectement par personne interposée», rien de commun avec tout ce qui a été débité hier. Il suffirait de consulter le Code pénal de l’article 145 à 150 pour comprendre la constance du législateur, s’agissant de l’expression dont question.

Je suis intervenu dans l’affaire opposant le sénateur Matata au Ministère Public puisqu’il est de notoriété publique que ceux qui savent et qui se taisent, sont coupables par leur silence. Humblement, je ne voudrais pas être jugé par le tribunal de l’histoire.

Je suis intervenu dans l’affaire opposant le sénateur Matata au Ministère Public puisque l’affaire Dreyfus qui mit plus tard la République Française en péril, commença de la même manière : mépris du droit, indifférence des acteurs politiques, silence des sachants…

Je suis intervenu, puisque la démocratie est assise sur certaines valeurs et certains principes qu’il faut défendre et préserver quel qu’en soit le prix.

Honni soit qui mal y pense.

(*) Remake

Prof Evariste Boshab

Sénateur