Et Kwamouth alors …

L’attention de l’opinion reste tournée vers le Nord-Kivu, avec le vrai-faux cessez-le-feu proclamé par le M23 le 7 mars. Car aussitôt annoncée en fanfare et aussitôt violée, la cessation des hostilités n’a en réalité jamais cessé. Le porte-parole du gouvernement ne s’y est pas trompé. S’adressant aux médias la veille de l’annonce du mouvement rebelle pro-rwandais, Patrick Muyaya n’avait pas caché son scepticisme : l’improbable «bonne foi» de Paul Kagamé, parrain de la guerre au Nord-Kivu, devait être jugée aux actes. Et force est de reconnaître que les événements lui donnent amplement raison :
le despote rwandais, conforté par l’absence d’une condamnation formelle de la part d’Emmanuel Macron lors de son séjour congolais, est passé dans un radicalisme sanglant, jusqu’à menacer la prise de Goma, la capitale provinciale.
Or, pendant que tous les regards sont tournés vers l’Est de la RDC, les territoires de Kwamouth, Bagata et une partie de la province du Kwango sont en proie à des actes de violence depuis plus de six mois. Des incendies de villages et des décapitations d’innocents sont monnaie courante. Des centaines de familles sont constamment jetées sur les routes, certaines d’entre elles étant même arrivées aux portes de Kinshasa.
Kwamouth oublié ? Le conflit dit interco-mmunautaire opposant les Téké aux Yaka est en voie d’être relégué aux oubliettes. Certes, de temps à autre, les médias rapportent une arrestation ou une interpellation de l’un ou l’autre acteur majeur supposé instigateur des tueries, sans qu’une suite soit réservée au dossier.
Et pourtant. Autant la situation d’instabilité dans le Nord-Kivu et l’Ituri requiert une attention soutenue des pouvoirs publics, de même les provinces occidentales du pays méritent que les forces armées et les services de sécurité s’investissent pour garantir un processus électoral dans la sérénité.
Le conflit dit inter-communautaire de Kwa-mouth est le feu qui couve sous la cendre. Il a déjà étendu ses métastases aux portes mêmes de la capitale. Les autorités ne peuvent pas en être informées. Mais à force de regarder ailleurs risque d’occasionner un retour dévastateur de la manivelle.
Le président français a annoncé un pont aérien humanitaire en faveur des déplacés de guerre du Nord-Kivu. A se demander s’il était informé du drame qui se déroule aux portes de Kinshasa. Ici aussi, ce sont des milliers de familles poussées à l’errance.