Force régionale de l’EAC : une nébuleuse qui échappe au contrôle de Kinshasa

Le Chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi, ne croit presque plus à l’efficacité de la force régionale de l’EAC (Communauté de l’Afrique de l’Est). Vendredi en Conseil des ministres, le Président de la République n’a pas caché sa déception, faisant allusions aux «pesanteurs fonctionnelles » qui étouffent cette force déployée dans la partie Est de la République Démocratique du Congo. A terme, la Chef de l’Etat craint qu’en s’enlisant sur le terrain des opérations, cette force régionale ne bruise finalement la confiance au sein de la communauté sous-régionale. Que se passe-t-il finalement ? Kinshasa se sent-il trahi par une force régionale qui ne rentre pas dans son schéma de défense face aux terroristes du M23 ? Pour le moment, aucune option n’a été encore levée au sein du Gouvernement. En mars prochain, la RDC devra célébrer l’an 1 de son adhésion à l’EAC. ça sera aussi l’occasion de passer en revue les retombées réelles de sa décision de rejoindre le bloc des pays de l’Afrique de l’Est.
Vu de Kinshasa, la force régionale de l’EAC passe pour une nébuleuse. En effet, Kinshasa ne cache plus son dépit de voir une force, censée disposer d’un mandat offensif, se contenter de faire le décompte de morts et d’attaques des terroristes du M23. On se rappelle qu’en marge du dernier sommet de l’EAC à Bujumbura, le Président Félix Tshisekedi avait directement recadré le commandant kenyan de cette force régionale en lui lançant :«Vous ne devez pas aider le M23». Plus loin, le Chef de l’Etat a invité le même commandant à travailler davantage pour rétablir un climat de confiance avec la population locale.
Y aurait-il déjà des frustrations que le Président de la République n’a pas voulu révéler devant les caméras ? Certainement. Sinon, rien ne saurait justifier cette interpellation.
C’est dire qu’il y a quelque chose qui ne va pas dans les rapports entre Kinshasa et la force régionale de l’EAC. I y a une sorte de cassure qui commence à indisposer les autorités établies à Kinshasa. Vendredi en Conseil des ministres, le président Tshiseke-di l’a rappelé, sans aller évidemment dans les détails. Mais, on sent déjà qu’entre Kinshasa et la force régionale, on est encore loin de la lune de miel dont on a eu droit il y a quelques mois.
La force régionale de l’EAC déçoit. Et pour le dénoncer, Kinshasa ne porte plus de gants. Bien sûr, le langage est encore modéré, mais on sent que le ton monte depuis la capitale congolaise.
Bien avant le Président de la République, l’on se rappelle que le président de l’Assemblée nationale, Christophe Mboso, n’avait pas aménagé cette force régionale de l’EAC lors des échanges à la chambre basse du Parlement avec le ministre de la Défense nationale et l’état-major général des Forces armées de la RDC.
Pour dire vrai, Kinshasa s’agace d’une force régionale qui échappe totalement à son contrôle. C’est désormais une nébuleuse aux contours difficiles à décrypter.
Kinshasa serait-il sur le point de reconsidérer son accord sur le déploiement de la force régionale de l’EAC sur son sol ? On n’y est pas encore. Mais, des sources concordantes rapportent que l’hypothèse est à l’étude.
Quoi qu’il en soit, près d’un an après son adhésion à la Communauté d’Afrique de l’Est, la RDC reste engluée dans un conflit avec les terroristes du M23. Entre impasse diplomatique, poursuite des combats et tensions autour de la force régionale, Félix Tshisekedi n’a qu’une faible marge de manœuvre qui l’oblige à garder la dynamique d’une diplomatie qui présente, malheureusement, des signes d’essoufflement.
«L’an 1 de la RDC au sein de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) n’a sans doute pas grand-chose à voir avec ce que Félix Tshisekedi avait imaginé en la rejoignant en mars 2022. Fruit de trois années de procédure et d’une stratégie diplomatique initialement tournée vers ses voisins de l’Est, cette adhésion à l’une des organisations régionales les mieux intégrées du continent semblait alors rimer, pour le RDC, avec opportunités économiques. Le passage à l’offensive du M23 et la crise qui oppose Kinshasa à Kigali auront finalement pris le pas sur tout le reste», commente Jeune Afrique.
Face à une force régionale difficile à manœuvrer, Kinshasa pense déjà changer de fusil d’éapaule. De quelle manière ? Difficile à prédire.

Econews