Kinshasa ne ferme pas la porte à la diplomatie : Pas de quartier au M23, oui au dialogue «sincère » avec Kigali

Patrick Muyaya rassure : «Vouloir la paix, ça ne signifie pas être naïf »

Au regard des propos malsains, plusieurs fois décriés, de son voisin belliqueux, le Rwanda, la République Démocratique du Congo a décidé de durcir le ton pour se faire respecter. Mardi, devant l’ambassadeur du Rwanda, convoqué au ministère des Affaires étrangères, Kinshasa a exprimé, dans des termes clairs et diplomatiques corrects, sa protestation, sa désapprobation et sa mise en garde au pouvoir en place à Kigali. Si Kinshasa s’inscrit dans la logique de la paix, au grand bonheur de la région des Grands Lacs et de son peuple, il n’attend plus se laisser faire. Lundi, au cours du traditionnel briefing, Patrick Muyaya, porte-parole du Gouvernement congolais, n’a pas fait dans la dentelle. « Vouloir la paix, ça ne signifie pas être naïf », a-t-il lancé, rappelant que le Gouvernement exclut toute négociation avec le M23, une créature qui ne doit pas son existence qu’à son créateur, le Rwanda.
La République Démocratique du Congo ne négociera pas avec les rebelles du M23 qu’elle considère désormais commune groupe terroriste qui devait, par conséquent, être traité comme tel.
Lundi, devant la presse, Patrick Muyaya Katembwe, ministre de la Communication et Médias, porte-parole du Gouvernement, l’a redit dans des termes clairs, estimant que Kinshasa a réuni suffisamment des preuves confirmant l’implication directe du Rwanda derrière l’aventure militaire du M23.
Ce qu’a, du reste appuyé, le général Léon-Richard Kasonga, porte-parole des Forces armées de la RDC, qui s’est étonné que le M23 ait parvenu à se reconstituer, après avoir été battu et défait en 2013.
« En 2103, nous avons battu et vaincu le M23. Toutes les armes ont été saisies et rendues à la DC, avec l’accompagnement de la communauté internationale. Aujourd’hui, il est superbement équipé. On a la preuve éloquente que le M23 est un strapontin qui agit sous les ordres du Rwanda », a fait observer le général Kasonga.
Mouvement terroriste qui a choisi de saper tous les efforts de paix entrepris dans la région des Grands Lacs, Patrick Muyaya estime que le M23 s’est inscrit en faux contre toutes les initiatives lancées pour ramener la paix dans l’Est de la RDC.
Et quand le Rwanda brandit, comme à ses habitudes, la menace des rebelles FDLR qui pèserait sur sa sécurité, Patrick Muyaya balaie d’un revers de main ce raccourci. « On a trop abusé de notre bonne foi (…) Le disque rayé qu’on nous chante sur les FDLR n’a plus de sens ».
Kinshasa met une croix sur tout dialogue avec le M23, il ne ferme cependant pas la porte à d’autres initiatives. « Nous voulons la paix, mais nous le ferons avec ceux qui veulent le faire avec ns, en toute honnêteté et sincérité », rassure Muyaya.
Kinshasa n’attend pas non plus revenir à la vielle recette de mixage et brassage qui a montré ses limites, après toutes ces années d’expérimentation.
«Il ne sera plus question de brassage ni mixage. Ceux qui entreront dans le processus déboucheront dans la vie civile », confirme Muyaya.
Qu’en sera-t-il si jamais le Rwanda persistait sur sa voie de la provocation ? A cette question, Patrick Muyaya s’est voulu rassurant : « Le Gouvernement prévoit d’autres mesures si le Rwanda persiste sur sa voie. Choisir la paix n’est pas le choix de la naïveté ».

Ignorer le M23
Tout compte fait, la guerre par procuration a repris dans l’Est de la RDC. Ceux-là même, qui ont toujours instrumentalisé des bandits dans l’Est, ont remis en service le M23 afin de justifier la déstabilisation du pays. Le Rwanda, qui passe par des groupes armés pour déstabiliser la RDC, n’a même plus froid aux yeux pour formuler et porter les revendications du M23.
Dans une déclaration de son ministre des Affaires étrangères, Kigali indique que cette guerre est interne entre Congolais. Il exige du gouvernement congolais d’engager des discussions directes avec des rebelles du M23 qui sont, en réalité, des marionnettes de Kigali. Sur des télévisions rwandaises, des spécialistes rwandais passent pour porter des revendications du M23. Des plaidoyers qui démontrent suffisamment que pour le Rwanda, le M23, son pion, doit se retrouver autour de la table et jouer un rôle prépondérant dans le processus des décisions dans la politique congolaise.
Kigali veut et tient absolument à ce que ces Congolais d’un genre spécial participent absolument à la gouvernance du pays. Le ministre rwandais des Affaires étrangères a même organisé une conférence de presse pour répéter ce qui est considéré comme le cahier des charges du M23.
Finalement, il faut que le gouvernement congolais ignore le M23 parce que désormais, le patron de ce groupe évolue à découvert. Il porte le discours du M23 et s’appelle Kigali.
Aussi curieux que cela puisse paraître, Kigali estime que les Rwandophones seraient persécutés en RDC. C’est tellement curieux qu’il y a plusieurs rwandophones ministres, généraux, hauts cadres du pays et des partis politiques.
En négociant directement avec Kigali, Kinshasa ferait l’économie des énergies, des vies et des frais. On ne peut pas perdre du temps. On ne peut pas non plus donner de l’importance à des gens qui sont manipulés à longueur de journée. Kigali doit désormais s’engager à retirer ses militants, battant pavillon M23. C’est en négociant avec Kigali que la solution sera trouvée.
De toutes façons, Kinshasa a tracé la voie à suivre et il n’attend s’en détourner. A Kinshasa, la possibilité d’engager des pourparlers directs avec Kigali n’est pas écartée. Pourvu que la sincérité soit au rendez-vous.
Quant au M23, Kinshasa se veut intraitable. « À quoi ça va servir de discuter avec un groupe terroriste qui doit être traité comme tel ? Le M23 a été défait depuis des années, mais comment il arrive à se réarmer pour avoir du matériel sophistiqué et aller jusqu’à faire écraser un hélicoptère de la Monusco », s’est indigné Patrick Muyaya.

Econews