Mardi, soit la veille de la marche projetée à Kinshasa, l’Hôtel de ville est parvenu finalement à convaincre les leaders de Lamuka, principale force politique de l’opposition, à renoncer à leur marche du 29 septembre. En échange, Lamuka a obtenu l’autorisation de tenir, le 9 octobre 2021, un meeting populaire à la Place Sainte-Thérèse, dans la commune de N’Djili. Décidément, les deux parties ont mis de l’eau dans leur vin. Pour combien de temps ? Nul ne sait jusqu’où s’étendra la trêve. Si Lamuka a cédé à la demande de l’Hôtel de ville, ce n’est pas pour autant qu’il va lâcher la pression. C’est dans la rue que Lamuka se propose désormais de porter son combat politique. Sa stratégie est connue : multiplier des provocations jusqu’à ce que le pouvoir excelle dans la répression. Lamuka n’attend que cette occasion. Dans ses rangs, l’annulation de la marche du 29 septembre est un repli stratégique, avant le meeting populaire du 9 octobre. Pour le tandem Muzito-Fayulu, tout est fait pour pousser Félix Tshisekedi à la faute. Objectif : le présenter comme une négation de la démocratie et un tortionnaire des libertés publiques. Le prochain test grandeur nature est prévu le 9 octobre à la Place Sainte-Therèse de N’Djili.
Econews
L’état d’exception de Gentiny Ngobila décrété dans la partie Est de la ville de Kinshasa ne fait pas l’unanimité dans l’opinion publique, principalement au sein de Lamuka, principale force politique de l’opposition. Le duo Fayulu et Muzito, les deux irréductibles de Lamuka, vont multiplier des manifestations publiques jusqu’à faire commettre au camp Tshisekedi des fautes qui seraient fatales. C’est de bonne guerre que de pousser son adversaire à la faute.
La tactique est connue, mais en face il y a une forte dose d’amateurisme et surtout un élan totalitaire inquiétant.
Marche du 29 septembre annulée
Mardi, c’est au terme d’âpres négociations entre l’Hôtel de ville de Kinshasa et les représentants de Lamuka, en présence des services de défense et de sécurité de la ville, que les deux parties sont finalement parvenues à un compromis.
Compte tenu des impératifs d’ordre sécuritaire, les délégués de Martin Fayulu et Adolphe Muzito ont accepté d’annuler la marche de ce mercredi. En lieu et place, ils ont convié les Kinois, de commun accord avec l’Hôtel de ville de Kinshasa, à un meeting populaire, le 9 octobre 2021, à la Place Sainte-Therèse, dans la commune de N’Djili.
Ce meeting populaire, qui se substitue apparemment à la marche annulée du 29 septembre, sera une occasion, se dit-on à Lamuka, de «dire non au glissement du délai électoral, non à la politisation de la CENI et oui au consensus sur les réformes électorales».
Quand Ngobila tombe dans le piège de l’opposition
Le gouverneur PPRD, avant de se fondre dans l’Union sacrée de la nation, Gentiny Ngobila Mbaka, est l’homme par qui la faute fatale risque d’arriver. D’ailleurs, sa position le prédispose à jouer un rôle salvateur ou néfaste pour le Chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo.
Comme s’il se trouvait dans son salon, le gouverneur de Kinshasa croit disposer de tous les moyens possibles pour régenter l’espace démocratique. D’abord, il a interdit à Lamuka de marcher le 15 septembre 2021, loin du Palais du Peuple où se déroulait la rentrée parlementaire. Il lui était pourtant loisible d’encadrer cette marche, comme le voulaient d’ailleurs des technostructures sécuritaires.
L’un de ses cerveaux avait fait des confidences à Econews : «Il nous était plus facile d’encadrer cette marche que de la réprimer. Un cordon aurait été dressé de commun accord avec les organisateurs. S’arrêter à l’Echangeur de Limeté aurait été un compromis satisfaisant pour toutes les parties». Dommage que la répression ait été la première solution trouvée pour empêcher que la marche puisse avoir lieu.
La première conséquence est qu’un journaliste a été violenté faisant la Une des médias. La répression elle-même a été reléguée au second plan et le duo n’a eu que le temps de se tordre en rires parce que le coup a réussi.
Fayulu et Muzito n’ont pas besoin de drainer des foules. Ce n’est pas l’objectif recherché par ces marches qui vont se multiplier. Ils ont besoin d’incidents, jusqu’à ce que la communauté internationale réunisse les preuves évidentes d’une dérive totalitaire en République Démocratique du Congo.
Vu sous cet angle, Lamuka a besoin d’apporter la preuve des erreurs de l’Union sacrée de la nation auprès de l’opinion publique congolaise et internationale. En effet, Muzito et Fayulu savent très bien qu’en face on prendra peur et la réaction ne conviendrait pas pour un État de droit.
Pendant ce temps, à l’Union sacrée de la nation, on semble ne pas intégrer cette importante donne qui peut au final s’imposer en arbitre lorsqu’il sera question de passer à l’essentiel : les urnes !
En imposant des restrictions dans les marches politiques à Kinshasa, Ngobila est finalement tombé dans le piège de Lamuka. Pour preuve, dans l’opinion, il essuie des critiques de toutes parts.
Pour le député provincial Mike Mukebayi, le gouverneur Ngobila n’a pas le droit d’instaurer un état d’exception dans la partie est de la capitale congolaise.
Jonas Tshiombela, coordonnateur de la Nouvelle Société civile du Congo (NSCC), s’oppose aux restrictions de l’Hôtel de ville de Kinshasa et note que «la démocratie, c’est la cohabitation des contradictions dans la tolérance et le respect».
Jean-Claude Katende, défenseur des droits humains et président national de l’ASADHO, embouche le même discours : «Nous ne voulons pas d’un pays où les uns ont tous les droits et les autres ont une partie des droits ou pas de droits du tout. Ça, on ne veut pas et on ne voudra jamais ».
Tshisekedi prévenu
Le Chef de l’Etat est prévenu. «Attention danger », avait averti lundi Econews. Ces mesures liberticides du gouverneur Ngobila ne vont pas dans le sens de consolider le régime Tshisekedi.
Tout est fait pour saper l’image de l’Union sacrée de l’intérieur. Tout se fait comme si le gouverneur de Kinshasa avait la mission de faire détester Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo des Kinois et donc des Congolais. Il faut rapidement ouvrir l’œil.
Pour le moment, c’est la trêve. Ainsi en ont convenu les parties conviées aux négociations autour du gouverneur Gentiny Ngobila. Ce n’est évidemment qu’un sursis. Ce n’est pas tout aussi évident que Lamuka renonce aux actions de la rue. C’est le seul moyen, pense-t-on, de se faire entendre ou de se faire enterrer politique.
C’est dire l’annulation de la marche du 29 septembre 2021 ne doit pas être perçue comme une capitulation de Lamuka. Ce geste a plutôt valeur de test pour juger de la bonne foi des autorités urbaines. C’est le 9 octobre prochain, jour de son meeting de N’Djili, que Lamuka attend l’Hôtel de ville au tournant.
Est-ce que les autorités urbaines feront librement jouer le jeu démocratique ? Vont-ils brandir un autre interdit pour empêcher Lamuka de tenir sa manifestation politique ? Autant de questions qui ne trouveront des réponses que le 9 octobre prochain.
La marche de Lamuka reportée sine die
Le gouverneur de la ville de Kinshasa, Gentiny Ngobila Mbaka, a tenu une séance de travail, mardi 28 septembre 2021 à l’hôtel de Ville de Kinshasa, avec les représentants de l’ECIDE de Martin Fayulu et du Nouvel élan d’Adolphe Muzito, dans le but d’harmonisation des points de vue sur la marche pacifique qui a été projetée par la coalition LAMUKA. A l’issue de cette réunion, une déclaration a été faite par les deux parties.
Pour des raisons sécuritaires, la marche qui devrait être organisée le mercredi 29 septembre est reportée à une date ultérieure. Et l’itinéraire de cette marche sera discuté et fixé conjointement avec l’hôtel de ville de Kinshasa. Entre-temps, les partis politiques ECIDE et Nouvel élan vont organiser un meeting au terrain Sainte-Thérèse de N’Djili ce, après avoir saisi l’autorité urbaine.
Kinshasa, le 28 septembre 2021
Celcom/HVK